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Primature-SOS Amadou Bâ

Primature

SOS Amadou Bâ

La remise en fonction de ses comptes sociaux, même s’il ne les utilise pas, est un premier signe de retour à la civilisation du Premier ministre Amadou Bâ : depuis 2019 pratiquement, il maintenait courageusement la tête sous l’eau, de peur de se la faire couper pour un prétendu délit d’ambition présidentialiste. La primature est alors pire que le supplice de Tantale pour cet homme talentueux électoralement puni pour sa proximité avec le pouvoir.

L’indignation d’un grand animateur télé le 04 avril dernier était affligeante : le Premier ministre Amadou Bâ y est caricaturé de la pire manière, dans une attitude du zombie errant ayant peur de tout, même de son ombre.

Certes, la vague d’épuration politique entamée en avril 2017 par le président Macky Sall en marche vers la Présidentielle de 2024 et poursuivie en  novembre 2020 devrait indigner et inquiéter ceux qui n’avaient d’autre prétention que d’être utiles, mettant leurs compétences et leur technicité au service d’une Nation, au sens culturel du terme…et qui répondent toujours à l’appel, quels qu’en soient les pièges réels ou imaginés. La prudence extrême de Amadou Bâ Premier ministre frise la paranoïa, tant l‘individu est emprunté, désarticulé, presque terrifié moins par la charge que par ce que ne semble pas révéler le choix du président de la République. Et parce qu’il n’est pas dans son naturel humain, on le soupçonne de cacher son jeu et un agenda…et derrière toute manifestation d’hostilité envers Macky Sall et son régime Ceci n’est pas nouveau dans l’analyse interne au parti du président de la République dans l’ingénierie humaine.

Il faut alors sauver le soldat Amadou Bâ, moins pour lui que pour la stabilité du pays : la guéguerre à l’interne ne doit pas permettre aux politiques de tenir en otage un pays déjà passablement secoué par les affaires et la dépendance exagérée vers l’extérieur révélée par la crise ukrainienne. Depuis le 27 septembre dernier, Amadou Bâ n’est plus que l’ombre de lui-même. La sobriété exagérée dans le port et le comportement inquiète : l’habillement laisse à désirer et semble être du réchauffé mal repassé comme lors de la retraite religieuse de Kolda, l’intervention de Macky Sall sur la rencontre sur la démocratie et encore ce jeudi 13, lors de la remise d’un lot de matériel aux universités quand son blanc  laissait à désirer tant il semblait mal ajusté.

À presque le temps d’une gestation, il essaie de revenir : le téléphone avait été filtré, les réseaux sociaux liquidés en une période où ils sont devenus la courroie de transmission inévitable ;  le port, autre forme de communication, doit suivre tant il est des plus médiocres alors que la posture empruntée inquiète sur un agenda impossible.

Depuis les suspicions d’ambiguïté qui avaient prévalu en 2019 et son départ du ministère de l’Économie et des Finances en 2017 pour celui des Affaires étrangères, Amadou Bâ rase les murs, appliquant l’adage selon lequel pour vivre heureux, il faut vivre caché. Le président Macky Sall semble cependant donner raison à ceux qui le soupçonnaient de se donner de l’air en mettant sur la touche les alternatives que seraient Aly Ngouille Ndiaye et Amadou Bâ ; le retour concomitant des deux protagonistes en septembre 2022 ne parait cependant pas rassurer le Premier ministre dans son attitude maladive faite de réserve sur les plans de l’habillement et du comportement. Cette prudence extrême ne justifierait-elle pas la position de ceux qui le soupçonnent de bien cacher un jeu dont il serait le maître à défait d’en être un partenaire majoritaire ?

Certes, le discours démontre qu’il a la tête de l’emploi ; il est cultivé, techniquement documenté, plein d’à-propos : il suffit d’entendre les piques et répliques du Premier ministre envers les députés de l’opposition lors de sa réponse à la motion de censure et avec un Idrissa Seck par exemple, le 15 avril dernier dans sa mobilisation pour la reconquête, même si les résultats n’ont pas suivi, combattu qu’il a été de l’intérieur.

Le drame de Amadou Bâ se trouve en effet dans sa proximité avec un pouvoir qui s’en méfie comme de la peste et qui préfère l’avoir avec lui que sans, et d’une meute de militants généraux mexicains guerroyant contre tous ceux qui ont une parcelle de pouvoir marron-beige et associés. Le Pm partage ainsi une mauvaise fortune avec tous les élus de Dakar par exemple dont la proximité avec Macky Sall est avérée ou tardive, comme à la Médina avec Bamba Fall : ils perdent régulièrement, moins en valeur intrinsèque que pour délit de proximité avec un pouvoir à bout de souffle qui ne fait plus rêver.

P. MBODJE