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Portage du bébé – entre traditionnel et à l’occidentale: Grand-mère rejette le kangourou favori des jeunes mamans Khadidiatou GUÈYE Fall

En Afrique, la civilisation est différente des autres. Dit-on qu’en Afrique, l’éducation de l’enfant est assurée par toute la communauté qui l’entoure. Aussi vraie et utile est cette tradition, le portage dans le dos n’en demeure pas moins. Cette méthode de porter son enfant dans le dos est très pratiquée en Afrique dans les grandes tribus. Avec la modernisation et la mondialisation, plusieurs méthodes de portage ont atterri en Afrique parmi laquelle le kangourou.

Cette méthode installe la discorde entre les jeunes et les grandes personnes. Ces dernières restent convaincues que porter son enfant dans le dos ne renferme que des avantages ; elles rejettent catégoriquement la méthode porte-bébé dite Kangourou qui donne une approche animalière.

Beaucoup divergences se notent entre les jeunes mamans et les personnes âgées. Depuis un certain temps, les jeunes mamans utilisent le kangourou pour porter leur bébé. Cette question de choix de portage des bébés sème des différends entre les deux parties. Quand les jeunes mamans cherchent le confort et la sécurité avec le kangourou, les grandes personnes tirent de leur côté pour défendre l’héritage culturel. Chacun tire de son côté.

Madame Cissé préfère porter son enfant sur son dos quand elle s’occupe des tâches ménagères : « Pour moi, porter mon enfant sur mon dos me permettrait de vaquer à mes occupations, surtout aux tâches ménagères. Avec cette méthode de portage, je suis presque libre de faire le ménage, de cuisiner ou de faire la lessive ». Madame Cissé utilise aussi le Kangourou, un outil conçu pour maintenir son enfant au niveau du ventre, mais dans certaines circonstances. « Le portage à kangourou est aussi utilisable ; pour moi, cette méthode de portage a plus de sécurité. La surveillance semble plus éminente, surtout quand on monte dans les transports en commun où les passagers débordent », soutient la coutrière.  Elle précise que dans sa famille, le kangourou n’a pas d’influence, contrairement au portage du dos qui constitue une tradition réelle dans l’étape de la vie de l’enfant.

En effet, d’après la plateforme hello-tribu, le portage à l’africaine offre à bébé une posture qui respecte son dos et son bassin, il est en position physiologique. Sa sécurité physique et affective est assurée et c’est un excellent moyen pour la maman de retrouver un peu de sa liberté de mouvement et de sa liberté d’esprit.

Cette liberté d’esprit est confirmée par Awa Ndiaye, une mère de deux enfants. Awa est plus rassurée par le portage dans le dos car, en cas de danger, le protecteur tire son protégé derrière lui pour le défendre : « Nos ancêtres n’ont pas choisi de porter leurs enfants dans le dos par hasard, une raison valable les a poussés à opter le portage dans le dos parmi tant d’autres. Par contre, le porte-bébé kangourou ne me fascine pas. Cela ne fait pas partie de notre culture. Que je mette une taille basse ou un pantalon, je porte toujours mon enfant dans le dos ».

Mariama ne tient pas compte des traditions. Elle cherche ce qui l’arrange le plus et qui octroie un certain confort à ses enfants. C’est pourquoi elle porte son choix sur le nouage à kangourou qui renferme d’après elle plus de sécurité : « Je porte mon enfant par devant avec le kangourou. Cet outil est plus pratique et plus confortable pour le bébé. Avec le Kangourou, rien ne m’empêche d’avoir les yeux sur mon bébé. En général, l’arrivée des enfants bloque et ralentit certains de nos mouvements et de nos activités. Alors qu’avec le Kangourou, on peut se promener avec bébé, le contempler et savoir s’il dort ou pas ». En plus d’être une sécurité pour bébé, Mariama évoque l’aspect moderne du portage. D’après elle, accrocher son bébé avec un pagne en wax ou autre type de tissu dans son dos est révolu.

C’est totalement le contraire que ce grand-père, sous couvert de l’anonymat, affirme. Dans son salon, la télécommande à la main droite, le sexagénaire rejette sans complaisance la pratique du portage par la méthode occidentale. Il présume que cela ne correspond pas à notre culture : « Les outils de porte-bébé occidentaux ne font pas partie de notre style de vie culturelle. L’Afrique a ses réalités que les peuples commencent à découvrir petit à petit. Porter son enfant dans le dos est plein de bienfaits aussi bien pour l’enfant que pour la mère. La position de l’enfant avec les genoux bien étirés, bien écartés et relevés constitue un moyen de prévenir la luxation des hanches en d’autres termes la dysplasie. Par ailleurs, cette position assise de bébé sur le dos de sa maman permet de lui tonifier sa colonne vertébrale et sa tête ». Notre interlocuteur conclut que le portage sur le dos dispose un effet orthopédique pour l’enfant et épargne à la mère du mal de dos.

Mais pour certaines femmes, porter l’enfant sur le dos et poursuivre ses corvées sont un vrai supplice pour elles. Oumy Lô, une maman vivant seule dans son appartement, confie qu’il lui arrive de perdre le souffle quand elle porte son bébé dans le dos et s’adonne aux travaux ménagers. « Je suis seule dans mon appartement, et mon bébé qui a commencé à ramper manifeste une certaine curiosité sur tout ce qu’il voit. Pour le protéger, je le porte sur mon dos afin d’avoir la conscience tranquille et me concentrer sur mes tâches. A vrai dire, je me résigne de détacher les pans malgré mon étouffement pour la sécurité de mon enfant ». Oumy n’a pas le choix, c’est pourquoi elle préfère porter son enfant plutôt que de le laisser exposé aux dangers domestiques.

Porter son bébé de n’importe quelle manière est une pratique ancienne transmise de génération en génération. Il existe plusieurs types de portage. Chaque peuple a une manière de porter le bébé. En Afrique, le portage par le biais d’une étoffe ou d’un tissu dans le creux du dos est une identité caractéristique des femmes-mères. Mais l’équivoque se situe sur le tiraillement entre les jeunes mamans qui veulent s’imposer une modernisation avec le porte-bébé dénommé kangourou et les grands-mères qui défendent avec hargne l’héritage culturel du portage de nos ancêtres fait avec un pagne.