GMT Pile à l'heure

La Ligne du Devoir

Parrainage, mode d’emploi

Le parrainage

Auteur : Séga Fall MBODJI

Profession : Business analyste / Mathématicien

Pays de résidence : France (Paris)

Contacts : +33 6 50 54 72 75

segafall.mbodji@gmail.com

 

Vent du désert

à multiples

rebondissements

L’élection présidentielle approche à grand pas et les citoyens seront encore appelés aux urnes en février 2024. A l’aube des élections, l’arène politique sénégalaise est traversée par un vent du désert avec de multiples rebondissements : alliances aléatoires, trahisons, transhumances, vote de loi à la hâte… De plus, les candidats qui concourent à déloger le locataire du palais de la République poussent comme des champignons. Par conséquent, leur effectif trop élevé impacte le processus électoral en termes de :

  • Budget à allouer qui est une fonction croissante du nombre de candidats à la candidature ;
  • Journal télévisé de la campagne très chronophage ;
  • Temps de passage excessif dans les bureaux de vote pour chaque électeur ;
  • Ecologie : soit n le nombre de candidats retenus. L’électeur choisit un seul bulletin à mettre dans l’urne. Sur l’ensemble des M bureaux de votes comptant chacun 𝒎𝒌 votants, on a au moins {(𝑛 − 1) ∑ 𝑚𝑘 𝑀 𝑘=1 } bulletins de votes qui se retrouvent à la poubelle. Le nombre de bulletins de vote à imprimer pourrait être optimisé avec un format papier A7 détachable et donc 8 candidats seront regroupés sur une feuille A4.

  • Délai de délibération des résultats provisoires et effectifs qui est rallongé ;
  • Sabotage incontrôlé de l’élection par les « petits » candidats : il suffit d’un portefeuille bien garni pour garantir la caution de n’importe quel « petit » candidat. Pour un scrutin optimisé, une étape primordiale est de limiter le nombre de candidats. Le système de parrainage constitue une solution adéquate.

Depuis son apparition lors de l’élection présidentielle de 2019, le parrainage continue de susciter des polémiques dans l’opinion publique et des tensions entre le régime et l’opposition. En effet, les avis divergent : le parti au pouvoir justifie le parrainage comme un système de tamisage pour limiter le nombre de candidats, tandis que pour l’opposition, c’est une violation du droit libre de participation aux élections d’une part, une stratégie astucieuse du régime afin d’éliminer les potentiels candidats bien ciblés d’autre part.

Macron

En outre, le parrainage est un concept à saluer. Le processus doit être juste au point qu’aucun candidat ne soit lésé. L’actuel système électoral qu’est le scrutin uninominal présente un inconvénient majeur : les  «petits » candidats qui n’iront certainement pas jusqu’au bout éliminent de justesse les candidats potentiels vainqueurs. Par exemple, on considère 3 candidats A, B et C ayant obtenu les suffrages 24,01%, 21,30% et 20,01% respectivement. Même si le candidat C a plus de chance de remporter l’élection au second tour, on voit bien que le candidat B l’élimine à l’issue du premier tour. C’est le scénario observé en France lors de la présidentielle de 2017 entre Macron, Le Pen et Fillon. On en déduit qu’une phase préliminaire de tri sélectif est nécessaire pour une élection.

Les acteurs seront impliqués dans l’étude technico-fonctionnelle de la faisabilité car un consensus est indispensable à la normalisation du processus. Le parrainage pour l’élection présidentielle de 2024 c’est maintenant. Il faut d’ores et déjà décider s’il sera maintenu comme une phase préliminaire du scrutin. Pour un processus transparent et juste, tous les acteurs politiques sont invités à dialoguer afin d’objectiver les modalités inhérentes au bon déroulement du parrainage. Les points clés à élucider lors du dialogue :

▪ Seuil de parrains

Les candidats doivent trouver un commun accord sur le nombre N de parrains qui permet de valider le parrainage, inconditionnellement à un découpage régional ou départemental. Définir rigoureusement un seuil ne signifie pas mettre la barre très haute de façon à vouloir pénaliser un quelconque candidat. C’est suffisant d’exiger 𝑵 = 𝟐𝟎.𝟎𝟎𝟎 parrains pour ne pas entraver la liberté de participation à une élection.

▪ Dates de début et fin de la collecte

Par rapport à la tenue de l’élection présidentielle en février 2024, les dates de début et fin de la collecte de parrains donnent une visibilité sur la possibilité de collecter sur ladite période le nombre de parrains exigés.

▪ Heure limite de dépôt des fiches de parrainage

La date de fin de la collecte coïncide avec la date de dépôt des fiches de parrainage au Conseil Constitutionnel. Un créneau limite est fixé pour les dépôts. Passé ce délai, toute fiche sera irrecevable et le candidat concerné sera déclaré forfait.

▪ Délai de traitement des fiches de parrainage

Le Conseil Constitutionnel propose, en fonction des ressources disponibles, n jours (à valider par les acteurs) pour traiter l’ensemble des fiches de parrainage. Un PV sera délivré à chaque candidat en date « date_fin_collecte + n ».

▪ L’ordre de traitement des fiches

En 2019, le traitement s’était effectué en FIFO, (First In, First Out), c’est-à-dire « premier arrivé, premier servi ». Cette méthode est discriminatoire car elle ne tient pas compte de l’impact des doublons. Il ne faut pas perdre de vue que le nombre de chances d’échapper aux doublons est une fonction décroissante de l’ordre de passage pour le dépôt des fiches. De plus, lors des élections législatives de juillet 2022, un tirage au sort a été opéré pour déduire l’ordre des dépôts. Bien qu’accepté par les acteurs politiques, le tirage ne permet quand même pas de pallier cet effet doublon. Il est important de rappeler que les doublons sont de 2 types : interne et externe.

En effet, si l’électeur E est présent dans plusieurs listes d’un candidat C, alors il est qualifié de doublon interne. Ce parrain E est donc comptabilisé une seule fois. Si l’électeur E  octroie son parrainage aux candidats C1 et C2, alors il devient doublon externe pour C1 et C2. La règle de gestion est soit d’octroyer ce parrain E au premier candidat traité entre C1 et C2, soit l’élaguer pour les 2 candidats. Cette règle est discutable. Une technique plus judicieuse serait d’effectuer un traitement rotatif qui consiste à traiter suivant une loi uniforme un échantillon de parrains pour chaque candidat et répéter le traitement jusqu’à couvrir la totalité des parrains. Cela permet d’uniformiser les doublons sur l’ensemble des candidats, indépendamment de l’ordre des dépôts. En date ‘date_fin_collecte + n + 1’ où le Conseil Constitutionnel est sensé publier les résultats et remettre à chaque participant son PV, il faudrait accorder un court délai δ aux candidats pénalisés par les doublons pour les compenser. Le Conseil Constitutionnel aura 1 ou 2 jours pour valider ou rejeter cette compensation.

• Pertinence des informations sur le parrain

L’outil de traitement se base sur les informations fournies par le parrain. Les acteurs doivent s’interroger sur la significativité des variables à exploiter afin d’en retenir les plus pertinentes. Prenons par exemple le cas du leader du mouvement « Geum Sa Bopp » ci-contre. En effet, des anomalies détectées sur le facteur « taille du parrain » furent bloquantes pour lui lors du parrainage pour les élections législatives de juillet 2022. La taille inscrite sur la carte nationale d’identité, en nombre entier (exemple : 170 cm), ne constitue en aucun cas une variable importante dans le traitement ; d’où la nécessité de procéder à une sélection de variables. Cinq facteurs qualitatifs du parrain suffisent à valider son parrainage : Nom, Prénom, Date de naissance, Numéro d’identification Nationale (NIN) et Numéro d’Identification Electeur (NIE). La concaténation des NIN et NIE est une clé primaire qui identifie de façon unique un quelconque parrain. 

▪ Format d’une fiche de parrainage

Une fiche de parrainage comporte des champs inscrivant l’identité du parrain (cf. ci-dessous un exemple de fiche) :

 La saisie des informations du parrain va jouer un rôle capital sur l’acceptation ou le rejet de celui-ci. Les acteurs politiques doivent donc disposer de l’information sur le formatage de ces champs car le logiciel utilisé présente une éventuelle sensibilité à la casse. Par exemple, le logiciel considère-t-il « SENEGAL – Sénégal – senegal – Sénégal » comme un seul même mot ou 4 expressions différentes ? D’où l’intérêt de bien connaître le format de chaque champ.

Démonstration logicielle

A l’approche de la période de parrainage, il sera impératif d’avoir une séance de démonstration, en présence des acteurs politiques, du logiciel à utiliser pour traiter les fiches de parrainage. Cela garantirait plus la fiabilité de l’outil et la transparence du processus. Partir sur de bonnes bases ferait l’unanimité sur l’acception du parrainage. Lors de l’élection présidentielle de 2019, j’avais proposé au Conseil Constitutionnel un logiciel de gestion du parrainage qui est toujours disponible. En termes de complexité par rapport au temps de traitement, une liste de 10.000 parrains est traitée (PV inclus) en moins de 2 minutes. Je reste à votre disposition pour toute information complémentaire et une collaboration pour un processus de parrainage transparent et mathématiquement juste.