Marseille, de Pape Diouf au Dr Carvalho
Marseille, de Pape Diouf au Docteur Carvalho
Le Code noir
Le “Little Sénégal” du pourtour méditerranéen ne joue pas en faveur des candidats marseillais d’origine sénégalaise. De Pape Diouf au Dr Martin Carvalho, même si la participation a légèrement évolué, l’impact de l’électorat sénégalais à Marseille bénéficie très peu ressortissants, contrairement aux autres minorités plus représentées sur le plan politique de la Métropole. Parce que plus solidaires.
“Les perspectives pour 2026 ? Je ne peux m’y projeter car j’arrêterai mon unique mandat en 2026 lors des municipales”.
Le docteur Martin Carvalho ne sera donc pas de la partie pour les prochaines municipales. De dépit, comme il l’expliquait récemment, de ne pas voir les choses aller dans le sens qu’il souhaitait, côté santé, mais aussi parce que le vote noir n’évolue guère à Marseille, en tout cas pour les Français d’origine sénégalaise qui s’essaient à la sanction électorale, quel que soit le niveau postulé.
Certes, comparé au regretté Pape Diouf, le curseur bouge : “Exactement : moi, je fais presque 44% en tant qu’outsider dans un canton tenu par la Gauche depuis des décennies et en tant que société civile accompagnée par la Droite républicaine !”
En 2014, l’ancien président de l’Olympique de Marseille était présenté par DVG, Liste Europe Écologie Les Verts diss., Parti socialiste diss., Mouvement unitaire progressiste. Son score timide (Voix au 1er tour :14. 377, 5,63 %) ne lui a pas permis d’aller loin. Malgré les promesses, les engagements fermes, la forte mobilisation des uns et des autres, dans un mouvement arc-en-ciel qui augurait de lendemains de victoire comme savent le chanter les Français.
L’évolution du vote depuis n’est pas racial, bien au contraire, en tout cas pour les candidats français d’origine sénégalaise. Le Docteur Carvalho l’a vécu dans sa chair durant une rude campagne quand ses compatriotes le lui ont manifesté ; heureusement que les urnes ont été un baume au coeur. Porte d’entrée d’une France irisée et bien que profondément de Gauche, Marseille ne semble pas le terreau fertile des candidats d’origine sénégalaise
Parce que, dans la réalité locale, toute la Diaspora originelle aurait pu appuyer à Marseille même. Vous avez des racines culturelles horizontales et verticales importantes. Pour vous-même parce que pour le groupe centriste. Vous vous dites senghorien, non point tant pour les racines lusophones que vous considérez peu que par la culture et la civilisation de l’universel. Le dialogue euro-africain autour du pourtour méditerranéen va du Portugal au Péloponnèse par une mélanine qui se retrouve chez les Nègres palestiniens, l’Égypte et le Maghreb.
“Exactement ! Cependant, l’homosenegalensis est particulier. Un exemple : quand je me suis présenté aux Départementales en 2021, j’étais au 2ème tour contre toute attente, contre le maire de secteur de 2-3ème arrondissements de Gauche. Des concitoyens m’ont combattu ouvertement en votant pour le maire qui est devenu conseiller départemental alors que je suis Sénégalais comme eux et qu’ils auraient beaucoup à gagner si je l’étais (élu). Mais on est encore avec nos idées préférant porter les valises des autres plutôt que celles de son frère ! On peut ne pas avoir les mêmes idées mais combattre par jalousie un frère, cela est inexplicable ! Ceci explique aussi en partie pourquoi j’ai pris du recul. Le Sénégalais préfère la réussite de l’autre mais surtout pas celle de son frère. Va comprendre ! Après, peut-être que ma situation professionnelle et sociale peut être dérangeante : pourquoi toujours lui et pas moi ? C’est désolant ! Mais seul Dieu sait ce qu’il attribue à chacun sur terre ! Pathé, nos gars, laisse tomber, c’est compliqué ! Pape Diouf (paix à son âme !) en avait fait les frais lors des Municipales de 2014″.
“Carvalho étant portugais, pour ma part mes aïeux, c’est le Brésil ; mais on en trouve au Portugal, au Mozambique, en Guinée Bissau, au Cap-Vert, tous les comptoirs portugais. Par contre pas en Espagne ni en Algérie, d’après les recherches ; maintenant, le monde appartenant à tout un chacun et les migrations étant ce qu’elles sont, on peut voir émerger ici ou là des patronymes identiques” !
La problématique de notre Diaspora
“La première vague avait peu d’intellectuels ; donc on pouvait comprendre la jalousie ou le comportement sournois. Aujourd’hui, cette nouvelle vague grouille d’intellectuels mais comme ils n’investissent pas le champ politique et sont jaloux quand on fait appel à quelqu’un de la communauté, au lieu d’être derrière cette personne, ils sont prêts à la détruire. Ainsi, notre aîné Pape Diouf n’a jamais été élu. Marseille, en 2600 ans d’existence, n’a connu qu’un Sénégalais élu à la métropole de Marseille, moi ! Je ne m’en enorgueillis pas mais si vous faites une enquête, peu de gens le savent et ne s’y intéressent pas du tout. Mais moi, si j’étais patron de l’Olympique de Marseille, tout le monde y trouverait un intérêt certain ! Ici, c’est Marseille, bébé ! –Ndlr : ancienne opposition Nord-Sud– Alors que les Maghrébins, les Juifs, les Comoriens ont compris l’importance du vote communautaire qui fait grandir la communauté quelles que soient les divergences politiques ; c’est la raison pour laquelle ils sont mieux représentés politiquement et ont des leviers.
Par exemple, nos étudiants en Master ont des difficultés pour trouver des stages et je suis obligé d’intervenir et je le fais volontiers mais quand tu es seul dans le milieu, tu n’as pas de poids ! Alors imaginez que l’ancien consul de Marseille ne savait même pas, en prenant fonction, qu’il avait un Sénégalais élu dans cette ville. Étonnant non ? À creuser.
Propos recueillis par
Pathé MBODJE