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Locales 2022: Grandeurs et servitudes Par Habib KÂ, Bureau régional de Matam, Thilogne

“Il ne peut pas dicter à tout son monde son obsession de briguer un 3ème mandat, auquel lui-même reconnaissait publiquement ne pas avoir droit, pour ensuite revenir trancher pour les autres qui doit être candidat à la mairie et qui ne doit pas l’être “. Militant

Après moult reports, la date des élections communales et départementales est enfin fixée, même si c’est au forceps. Pouvoir et opposition sont en train de peaufiner leurs plans pour gagner ce premier round décisif pour les deux futurs. Il est à souhaiter d’ici là que la situation épidémiologique du pays se stabilise pour que les Sénégalais accomplissent convenablement leurs droits citoyens dans la quiétude et le bonheur d’avoir choisi l’homme qu’il faut à la tête de chaque collectivité.

Du côté du pouvoir, les choses semblent se compliquer plus que ne le prévoyait le président Macky Sall, lui qui s’était décidé de choisir plus de 557 candidats maires à la place des militantes et militants des collectivités. Dès lors que la démocratie comme mode d’expression et de décision des militants n’est pas pris en compte, les choix du président de l’APR et de BBY, seront des choix personnels qui peuvent frustrer tout prétendant zappé.

Macky Sall ne peut pas tout faire, seul et en même temps, encore que son fast track, dont on ne parle plus d’ailleurs, est en mode avion et l’absence d’un Premier ministre se fait chaque jour sentir sur chaque question d’importance majeure pour la marche du pays.

Il pouvait se passer de cet exercice qui n’est pas sans conséquence sur la cohésion du groupe autour de sa personne. Déjà des murmures commencent à soudre pour lui contester ce droit.

Logique pour logique, confie un membre de l’APR : “Il ne peut pas dicter à tout son monde son obsession de briguer un 3ème mandat, auquel lui-même reconnaissait publiquement ne pas avoir droit, pour ensuite revenir trancher pour les autres qui doit être candidat à la mairie et qui ne doit pas l’être”. Où est dans tout ça le respect de la dignité et du droit organisationnel du militant ?

Un président qui force les barrières pour sa candidature et qui refuse aux autres militants le droit et la légitimé de candidater pour les “présidence” de leurs communes.

Macky Sall, pour ses locales précisément, sa base de manœuvre est très réduite. Il sera contraint de composer avec les cadres locaux pour prier certains de se désister, rassurer d’autres d’une planque ailleurs, s’ils n’en ont pas déjà.

Pourra-t-il refuser à un maire sortant de se représenter, même si sa gestion est partout décriée catastrophique par ses concitoyens ? Ou les protégera-t-il tous, pour ne pas ouvrir un boulevard pour la mairie aux adversaires politiques ?

Cette option est la plus plausible d’autant plus que le président Macky Sall n’est pas connu comme quelqu’un qui sanctionne son entourage, même avec les rapports tangibles de l’Ofnac ou de l’IGE à l’appui.

A l’intérieur de la coalition Bennoo Bokk Yaakaar (BBY), pourra-t-il faire bouger les lignes en choisissant à la place d’un maire PS ou AFP, un membre de l’APR ? L’on se souvient de cette veillée d’armes entre le maire de Kaffrine Abdoulaye Wilane, toute hargne dehors, et l’actuel ministre de l’Urbanisme Abdoulaye Seydou Sow, déjà dans les costumes de maire du Ndoucoumane avec ses programmes et réalisations.

Macky Sall pourrait-il imposer son poulain aux Kaffrinois ? Les retours de bâton seraient sans appel. Il permettrait à des acteurs politiques qui s’étaient tus sur le 3ème mandat de se solidariser avec

Tout compte fait, Macky Sall risque de reconduire, malgré lui, malgré leurs bilans négatifs, à quelques petites exceptions près, tous les maires en place, pour parer à des tiraillements politiques.

Macky Sall qui est prêt à tout miser pour arriver à son 3ème mandat n’est pas prêt à soulever des hostilités.

Aussi, les maires sortants ne sont pas restés bras croisés attendant le verdict du chef du parti ; au contraire, ils ont pris quantité d’initiatives pour sécuriser leur siège.

Il en va des unions à la base d’un groupe de leaders qui désigné un des leurs comme candidat, aux déclarations de candidature à la candidature.

Des maires plus prévoyants et qui considèrent leur candidature comme naturelle, définitivement acquis ont pris les devants.

Ils sécurisent le fichier électoral en surveillant avec prudence les flux de transferts d’électeurs et les inscriptions des primo-votants, en dessaisissant les officiers d’état civil de la délivrance de certificats de résidence et en s’autoproclamant comme le seul habilité à les signer.

Enfin, la grande incertitude, reste la tenue du scrutin municipal à la date du 23 janvier 2022, dans cinq petits mois alors que la covid-19 n’a pas encore fini de livrer ses impondérables. L’opposition et le pouvoir seraient-ils prêts de tenir les élections à cette date, quelque serait la situation épidémiologique, comme la France vivement contaminée avait si bien pu le faire, pour être conforme avec les rigueurs républicaines du calendrier électoral ?

La révision des listes électorales touche à sa fin sans que les cas de Karim Wade et de Khalifa Ababacar Sall, Ousmane Sonko, leader de Pastef, toujours mis à la disposition de la justice, dans un silence plein de surprises des autorités judiciaires.

Pour l’Alliance Pour la République (APR) et sa coalition Bennoo Bokk Yaakar (BBY) ont tous les atouts entre leurs mains pour remporter ses élections. La mouvance présidentielle s’est beaucoup renforcée avec les partis et mouvements libéraux, de personnalités politiques de haute facture de la galaxie wadienne ; en plus de contrôler le fichier électoral dont seuls les hommes du pouvoir ont accès et il ne sera disponibles aux autres que quinze jours avant le scrutin.

Il reste à l’opposition de confirmer sa maturité politique en refusant l’éparpillement des forces, la mise en avant des égos pour créer la plus grande union possible pour remporter plus de collectivités territoriales qu’un jour du 21 juin 2014.