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L’étrange vie des étudiants à l’étranger: Qu’est-ce qui les déroute de leurs objectifs ? Chérifa Sadany SOW, Desk central, Le Devoir

Souvent effrayés et pressés, des étudiants sénégalais en France ont des difficultés à étudier dans de bonnes conditions. Plusieurs ennuis les embrouillent tant qu’ils quittent la course pour emprunter l’autre côté de la route.

De quoi ont-ils besoin pour se rassurer ? 

C’est la grande question à décortiquer.

Le cas de Diary Sow a ressuscité les questions jamais encore réglées : les conditions de vie des étudiants en France. Elles sont pénibles à l’extrême, impossibles à surpasser. En 1999, l’UNESCO définissait un étudiant étranger comme étant une personne inscrite dans un établissement supérieur d’un pays ou d’un territoire où elle n’a pas sa résidence permanente.

Tout le problème démarre par cette résidence permanente. En quoi le mot « étranger » dérange-il les étrangers ? Dire que la téranga est strictement sénégalaise, jamais française ni américaine. Pourtant, les fils de ces pays cités et pas encore sont toujours bien traités au Sénégal. La preuve, dans les écoles, nombreux sont des étudiants étrangers qui s’étonnent du traitement de faveur que leur procure le Sénégal. Cette même situation est contraire à ce que vivent les Sénégalais en France.

J. Diop, étudiant depuis quatre ans (4) en France, se lance dans l’élucidation. « La réalité sociale de la France est très différente de la nôtre. L’habitude qu’on a au Sénégal disparaît une fois là-bas. Et si jamais on n’est pas fort mentalement, on risque de succomber. À la fac, la réintégration n’est pas aussi facile. On y retrouve souvent des gens extrêmement coincés qui t’offenseront, te marginaliseront. En plus au Sénégal, nous subissons à distance une autre pression sociale venant de la famille. Malheureusement, nous ne nous confions pas auprès d’elle, nos soucis et pressions : du coup c’est psychologiquement insupportable ».

Pour se débarrasser de ces pressions, S. J. Diop a procédé d’une manière intelligente en s’intégrant, en s’imposant en classe et,  le plus important selon lui, recenser des Sénégalais avec qui il pourra échanger en wolof pour ne pas être dépaysé. « Dommage ! Car ceux qui ne le font pas, dit-il, auront toujours des problèmes d’intégration en plus de subir le racisme que tout le monde sans exception a vécu en France, soit dans les moyens de transports ou les amphis : accumulés, ils finiront par se replier sur eux-mêmes ».

Pressions sociales

L’opulence des avantages d’obtenir le diplôme universitaire en France est telle que beaucoup prennent le risque de subir ces pressions sociales. Mais quand est-il du sort de ceux qui n’ont pas été psychologiquement préparés avant un départ ?  Dans quel mental doivent-ils être ?

« D’habitude, ils s’installent en France entre 18 et 23 ans. À cet âge naturellement, il est fondamental que l’étudiant soit mentalement préparé. C’est très important. Déjà surtout sur trois niveaux : individuel (pour qu’il puisse savoir à quoi s’attendre), familial (que les membres de la famille partagent avec eux les expériences vécues pour contribuer à leur formation) et enfin au niveau des centres d’orientation.

Prenons l’exemple de campus France : «  Là-bas, un ensemble d’entretiens se fait pour orienter l’étudiant quant à ce qui l’attend une fois de l’autre côté », livre Docteur Aly Hann, sociologue-enseignant-chercheur dans le Supérieur ; pour lui, chaque étudiant doit partir avec un projet de voyage lequel lui permettra de terminer son voyage par un retour afin d’investir dans son pays. « Aussi, il est important pour l’étudiant de comprendre les enjeux qu’il y’a à l’étranger. La situation économique, la solitude, le manque d’amis, tous ces éléments perturbants doivent lui être familiers afin qu’il puisse les contourner avec un mental cimenté. »

Loupe sur la disparition de Diary Sow…

Difficile de rester sans nouvelle de ce jeune prodige au regard noir, captivant et gorgé de visions. Quinze jours déjà qu’elle a disparu et toujours pas de concrètes révélations sur sa situation. Préoccupés, certains Sénégalais qui n’excluent pas l’aspect mystique s’interrogent : Est-ce qu’elle n’a pas été ensorcelée ? Cette pratique appelée “xãptal” en wolof traduit en français comme étant le fait de faire quitter quelqu’un de sa zone de confort, existe bel et bien selon Sidaty Sow marabout guérisseur « C’est une pratique mystique exercée sur une personne, l’obligeant à quitter son habitation, sa famille, son établissement, ou son travail. Inconsciente, la personne sera amenée à faire textuellement ce qu’on désir qu’elle fasse. Il ne faut pas aussi confondre “xaptal” et “nawtal”. Ce sont deux pratiques différentes. Nawtal est souvent utilisé par les agresseurs pour se permettre d’hypnotiser et d’effrayer leurs victimes. Toutefois, ces pratiques ensorceleuses sont possibles à enlever. Et une fois réussies, les choses redeviendront comme avant » avoua-t-il.

L’Afrique a bien ses réalités mythiques, mais ceci n’est pas forcément le cas de Diary Sow. Docteur Aly Hann revient sur un point de vue. « Elle est inquiétante sa disparition parce qu’il y a plusieurs niveaux de responsabilité. Elle est partie dans le cadre institutionnel, normalement il doit y avoir des mécanismes de suivi qui doivent s’opérer. Mais naturellement, si cette personne étant à un niveau supérieur, il y’a beaucoup de manques de responsabilité qui lui reviennent. Disons quand-même que c’est un événement triste et regrettable. Pourquoi elle ? L’on se demande, vu son niveau, ses qualités, sa personnalité et l’image qu’elle représente. C’est vraiment une disparition à plusieurs énigmes, et nous souhaitons qu’elle soit retrouvée en bon état »

Aborder la question de retour dans leurs pays d’origine doit être accompagné par de concrètes assurances. Lesquelles permettrons aux jeunes de rester dans le gène africain. Il leur faut ainsi, une bonne politique d’accueil et d’insertion professionnelle au Sénégal, pour qu’ils empruntent le même chemin que Aimé Césaire, l’un des grandes références africaines. En S’inspirant aussi de l’opus de Daara dj family “jöm moy dém wayë foulä moÿ gnïbici”, tout jeune doit s’accrocher sur les bretelles du courage, de l’engagement et de la rigueur afin de marquer les empruntes sur le cahier de retour au pays natal, au profit du Sénégal.

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