GMT Pile à l'heure

La Ligne du Devoir

La culture de la haine, l’amour de la politique  De notre correspondant en France, Tidiane SÈNE

La réalité malheureusement nous rattrape toujours. La réalité, c’est l’annonce, ces temps derniers, de discours loufoques, de manifestations incongrues et de complaintes à tout va. 

Au moins beaucoup d’invectives et de retroussements de manches pour faire peur ou pour se donner bonne conscience.

La réalité, c’est que, malgré le très manifeste recul de l’école du parti aussi bien au niveau du parti au pouvoir que de l’opposition, il devient impérativement nécessaire que les Sénégalais comprennent le vrai langage politique et qu’ils puissent surtout savoir le déchiffrer.

Mais voilà : les partis n’en font qu’à leur tête et le peuple dupé très souvent reste dans l’expectative en attendant de savoir qui sont vraiment ces mercenaires ventripotents qui jouent cette si mauvaise gamme à l’opéra du théâtre de la politique.

Le refus du rassemblement des partis politiques avec les Libéraux d’un côté, les Socialistes de l’autre et ailleurs ceux qui nourrissent les mêmes idéologies ensemble pour gagner les élections locales et législatives, est substantiellement lié à leur incurie et égoïsme à vouloir mettre le parti toujours avant le patrie. La pléthore de coalitions et l’essence accordée aux différentes listes présentées en disent long sur le degré de haine larvée entre les camarades et autres frères dans les partis.

Personne ne semble donner crédit au pouvoir de Macky Sall mais en même temps, personne n’aime non plus son vis-à-vis à l’intérieur de l’opposition. Chacun se méfie de l’autre comme dans une guerre de tranchées.  C’est pourquoi on se trouve dans un jeu de dupes dans lequel la classe politique trépigne sans idéologies concrètes. Dès lors, beaucoup pêchent par fanfaronnade, par suffisance et par manque de finesse politique. C’est comme s’ils sont tous poussés par la haine en oubliant les pratiques politiques saines et vertueuses.

L’inexplicable incompréhension dans les partis d’oppositions eux-mêmes contre les bafouilles répétées du parti au pouvoir dans une actualité chargée sur le plan national ainsi que toute cette guéguerre entre eux, ternissent dangereusement leurs démarches. Toutes les maladresses se dépeindront sur les résultats des prochaines locales, si les coalitions n’y prennent garde.

Quand des thuriféraires, des girouettes politiques et autres transfuges peuplent ladite majorité et que d’autre part les partis dits de l’opposition se crêpent le chignon ou se regardent en chiens de faïence, il y a fort à parier que la démocratie sénégalaise perd de plus en plus le statut d’une démocratie majeure qu’on veut lui prêter.

Nous sommes tous devant un conglomérat de partis, de regroupements plus ou moins épars avec une société civile amorphe et des marabouts affairistes qui paradent et palabrent à longueur de journée, sans en découdre vraiment avec ceux qui constituent la tare de la société sénégalaise.

 À certains à qui j’ai demandé : « Que  pensez-vous de la situation politique au Sénégal ? », beaucoup d’entre eux m’ont répondu :

-Les Sénégalais ne savent plus où donner de la tête entre le pouvoir dont le 3ème mandat n’est plus de mise et l’opposition qui n’a pour soucis que de faire la politique du « Ôte-toi que je m’y mette » !

L’auteur de cette belle réplique était un homme dans la soixantaine qui portait sur son visage le sourire discret de celui qui veut encore y croire, croire à la douceur, à l’espoir et au rayonnement du pays.

Je l’ai félicité, et puis mon portable a sonné, et j’ai lu : « Les quotidiens sénégalais parvenus ce jour tirent principalement sur la réhabilitation des listes de l’opposition par les Cours d’appel après avoir été recalés par certains préfets et sous-préfets ». La réalité !

Tidiane SÈNE,

Toulouse