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Élections : Limites du copier-coller

Les élections à venir inquiètent

 

Cependant, il n’y aucune fatalité qui soit au-dessus

de la lucidité et de la bonne volonté des Sénégalais

 

Les Élections, c’est une culture, une religion et une histoire

Dans un pays comme le Sénégal, la problématique des élections ne peut être réduite à sa seule dimension juridique. La contextualisation montre que la culture, la religion et l’histoire pèsent d’un poids déterminant dans tout le processus électoral.

Pendant un certain temps, les acteurs politiques étaient des hommes ou des femmes, ayant la capacité d’appréhender la notion d’État et les rôles respectifs de ses différents démembrements et composantes.
Durant cette période, les débats portaient sur les idées et les acteurs, bien qu’ayant des points de vue éloignés sur nombre de sujets majeurs, notamment quant au devenir de leur pays, savaient respecter leurs adversaires et ne les considéraient pas comme des ennemis.
Ce point de vue pourrait être nuancé, compte tenu de certains combats politiques, qui ont glissé du champ des idées pour rejoindre celui des personnes dans leur vécu. À ce propos, vient immédiatement à l’esprit cette notion d’opposition crypto-personnelle, ou d’autres cas où des échanges de coups ont conclu des débats politiques particulièrement houleux. Toutefois, il faut reconnaître que les événements de cette nature étaient exceptionnels.
Il était compris, de chaque acteur politique, que des divergences pouvaient exister sur les voies et moyens pour le développement du pays. Cependant, il n’était jamais perdu de vue que l’objectif essentiel, pour eux tous, était le progrès et le mieux-être des Sénégalais.
À ce sujet, ils savaient que la paix et la stabilité étaient des préalables incontournables pour la construction de leur pays et, lorsque leur préservation le nécessitait, ils allaient vers des compromis en se rappelant sans doute la célèbre déclaration de Henri IV : « Paris vaut bien une messe ».
Après cette période que je qualifierais de classique, est venue une autre, a priori déroutante, avec l’arrivée sur la scène politique d’acteurs aux profils atypiques.
De nos jours, il y’a des prétendants à des fonctions électives qui n’ont, dans leurs besaces, ni érudition, ni culture classique, ni valeurs morales ou religieuses significatives. Par contre, ils sont riches d’un vocabulaire qui choquerait, au plus haut point, ceux qui voudraient que la courtoisie et le respect fussent des valeurs cardinales dans les débats politiques.
Après ces considérations sur les contextes des élections, des observations ou avis peuvent être émis sur certaines options retenues dans le processus électoral sénégalais.
Le Code électoral est un « enfant » de la Constitution, laquelle est largement inspirée de celle de la cinquième République française.
Bien que controversée, cette loi fondamentale de l’État français a permis au peuple de ne plus vivre une paralysie ou une instabilité gouvernementale, comme antérieurement, ou comme en Italie d’après-guerre.
S’inspirant de certaines évolutions et idées anciennes mais mises en oeuvre récemment, notamment en France, le Sénégal a modifié sa loi électorale pour y insérer de nouvelles dispositions relativement au parrainage, à la parité, à l’augmentation des cautions, à l’introduction d’une dose de proportionnelle dans les élections législatives.
Peut-être que d’autres éléments m’échappent à ce sujet.
Néanmoins, nous pensons que la Constitution de la cinquième République et le système électoral qui lui était associé constituaient un Tout cohérent et qui avait passé l’épreuve du temps, surmonté des changements de majorité, plusieurs cohabitations et tout cela sans paralysie de l’Exécutif.
Les réformes introduites ont ouvert les portes de l’Assemblée nationale à l’extrême-droite et a contribué à sa dédiabolisation, la rapprochant ainsi de l’exercice de pouvoir exécutif.
Nous voyons qu’aujourd’hui les modifications de la loi ont fait perdre à l’exécutif un de ses atouts essentiels qui était l’obtention de majorité nette, à l’Assemblée nationale, lui permettant de mettre en oeuvre sa politique, notamment économique et sociale.
L’introduction de la proportionnelle, dans les élections législatives, a déréglé cette belle mécanique et le gouvernement français actuel est ainsi amené à faire un usage immodéré de l‘article 49.3 pour faire passer les dispositions essentielles de la loi de finances en discussion.
Les réserves qu’appellent les modifications de la loi électorale inspirée de certaines tendances, observées
notamment dans les pays de l’Europe du Nord,  sont qu‘elles ne sont pas adaptées à nos réalités politiques, culturelles et religieuses et même morales.
Si, par extraordinaire, une majorité de femmes compétentes et exerçant leurs prérogatives pour les votes et propositions de lois, tout en contrôlant l’action gouvernementale, venait à investir l’Assemblée nationale, on ne devrait que s’en féliciter.
Dans un tel contexte, la parité serait une entrave à une évolution voulue et souhaitée par les nombreux progressistes, lesquels attendent des élu(e)s un travail de qualité, indépendamment des considérations de genres.
Nous attendons des dirigeants des partis politiques ou entités similaires l’élaboration de cadres et règles qui feront de leurs partisans des citoyens exemplaires, en toutes circonstances. À ceux-ci seraient inculqués le respect de leurs adversaires politiques qui ont aussi le droit d’apporter leurs contribution à l’effort de réflexions et de propositions pour la défense des intérêts de leur pays.
Pour paraphraser une célèbre phrase du président Valéry Giscard d’Estaing : « Nul militant, quel que soit son obédience politique, ne devrait penser avoir le monopole du patriotisme ».
Les perperspectives électorales sont vues actuellement avec une certaine appréhension, tellement certaines « affaires » sont venues polluer l’atmosphère des débats. C’est un truisme que de dire qu’elles sont dangereuses pour la stabilité du pays. Le plus tôt elles seront éteintes et mieux se porteront le Sénégal et les Sénégalais avec.
Les rancoeurs, les rancunes et les haines ne doivent pas avoir de place dans champ politique sénégalais.
Que chacun y mette sa bonne volonté et des miracles se produiront. Et alors les prières des croyants ne seront pas vaines.
Incha’Allah.
Bonne année et bonne réussite à tous.

Ababacar Sadikhe DIAGNE

Ancien élève des classes préparatoires aux grandes écoles,

Ingénieur diplômé de l’École nationale de l’Aviation civile (ENAC) Toulouse, France,

et du Massachusetts Institute of Technology (MIT) Cambridge, USA.