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El Hadji Omar, Religieux, politique, panafricain

Il faut peut-être retourner au Congrès du Réseau euro-africain de recherches sur les épopées : « El Hadj Omar Tall, un modèle pour la jeunesse africaine » pour saisir la dimension panafricaine de celui que l’on s’efforce de présenter comme un chef religieux : l’homme d’Alwar est aussi un politique avec une vision perçue plus en Afrique qu’au Sénégal même.
Ainsi s’explique  l’importance de la rencontre d’Abidjan des 23 et 24 septembre prochain organisée par l’association « Tenndo Cheikh Oumar Foutiyou Tall » ; la conférence sur la « Dimension de Cheikh Oumar Foutiyou Tall le panafricaniste »le samedi 24 septembre à Abidjan sera précédée du Khadra jummah du vendredi 23 septembre, nous annonce notre correspondant particulier en Cote d’Ivoire.
Mieux : un projet d’un montant de 229 milliards de francs CFA pour la construction à Alwar d’une résidence Cheikh Oumar Foutiyou Tall, d’une bibliothèque, d’une mosquée, un hôpital et 55 villas conclura le centre international d’études sur le Saint homme.

Il y a près d’un siècle trois-quarts, 

El Hadj Oumar Tall fait le siège

du fort français de Médine au Mali
Rédaction centrale, Le Devoir,

11 mars 2021

C’est une histoire rangée aux oubliettes et très peu connue de beaucoup de Sénégalais. Lors d’une conversation quelque peu informelle, un ami dont je ne citerai pas le nom ici mais qui se reconnaîtra m’a posé une question : « Comment un stratège comme Cheikh Oumar Tall qui avait parfaitement maîtrisé l’art de la guerre avait-il pu perdre cette bataille en se laissant surprendre par les renforts dirigés par le général Faidherbe alors gouverneur de l’Afrique occidentale française ? ». Vaste question dont nous n’avons pas la réponse pour l’instant. Mais Le Devoir rappelle ici cet épisode qui contraindra le conquérant Toucouleur à opérer plusieurs replis jusqu’à sa disparition mystérieuse à Bandiagara dans les falaises.

Les événements se déroulent du 20 avril 1857 au 18 juillet de la même année, soit pendant plus de trois mois. Cheikh Oumar Al Foutiyou qui avait compris que le fort de Médine, qui avait été construit par les Français deux ans auparavant, devait être une des têtes de pont de l’armée coloniale à laquelle il s’opposait farouchement. Ce fort avait été construit sur le fleuve Sénégal en aval de la ville de Bakel et en plein territoire malien.

Pour empêcher les Français de conquérir cette partie du Mali qui était sous son emprise et dont il avait islamisé la population, El Hadj Omar fit le siège du Fort, une occupation qui dura au moins de 97 jours.

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Supériorité numérique

À propos de guerre et je crois te l’avoir déjà écrit, je n’ai toujours pas compris la défaite de El Hadj Omar à Médine
Il était en supériorité numérique et rien ne l’empêchait de donner l’assaut du Fort de Médine
Ses services de renseignement ont très mal fonctionné par ailleurs puisque Faidherbe est arrivé par le fleuve avec quelques hommes mais une puissante de feu redoutable.
Une École de guerre va être créée au Mali.
La décision a été annoncée.
Je rêve de pouvoir assister au cours magistral qui sera donné par rapport à la défaite de El Hadj Omar à Médine.
J’ai échangé avec un général de l’armée sénégalaise sur cette question et je lui ai fait part de ma déception…

Les Écoles de guerre dispensent entre autres des leçons de stratégie.
Un des grands maîtres de la stratégie militaire (il était civil) restera incontestablement le fondateur de l’Armée rouge, Lev Davitovitch Bronsteïn, alias Léon Trotsky.
Les écrits militaires de Léon Trotsky ont été publiés.
Je devais les acquérir lorsque je vivais à Paris mais la durée de la commande en librairie était trop longue…
J’ai renoncé mais je sais où les trouver à Paris
J’espère que l’Ecole de guerre de Bamako en fera l’acquisition
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Les militaires français retranchés dans cette garnison fortifiée étaient en nombre très inférieur (environ 200 à 300 hommes) par rapport à l’armée de Cheikh Oumar Tall qui comptait entre 20.000 et 25.000 combattants aguerris et tous armés de fusils modernes.

En ripostant de l’intérieur du fort assiégé, les militaires coloniaux ont fait perdre beaucoup de combattants à El Hadj Oumar mais eux aussi ont eu des pertes considérables. Si bien qu’en fin de compte, ils en étaient réduits à manger des restes et des aliments pourris car ils ne pouvaient plus s’approvisionner dans les villages environnants qui, eux aussi, étaient soumis à la force militaire du marabout résistant.

Affamés, ils font appel à leur chef le général Faidherbe pour obtenir des renforts. C’est Faidherbe en personne qui dirigera l’expédition par bateau avec à son bord 500 combattants dont 400 tirailleurs et 100 soldats blancs.

Le bateau de Faidherbe et ses soldats aura quelques difficultés à remonter le fleuve de Bakel au Sénégal à Médine au Mali. Mais pour secourir ses hommes coincés, ils forcèrent les vapeurs et le bateau parviendra à destination le 18 juillet 1857.

S’engage alors une bataille meurtrière car Faidherbe avait armé le bateau de canons puissants et ses hommes étaient des militaires aguerris. Quant à El Hadj Oumar Tall, il avait perdu il est vrai beaucoup d’hommes mais il résista vivement avant de battre en retraite face à la puissance de feu que lui avait opposé le général français.

Fort français de Médine au Mali

Faidherbe
C’est là que la question de notre ami prend tout son sens : comment un stratège de guerre comme Cheikh Oumar avait-il pu se laisser surprendre ? Pourquoi n’avait-il pas placé des éclaireurs en amont du fleuve pour être prévenu si des renforts devaient arriver pour sauver les militaires assiégés dans le Fort ? Une telle erreur stratégique est-elle explicable pour un chef de guerre rompu à toutes les opérations de combat et qui savait protéger ses arrières en temps normal ?

Il tenait pourtant le bon bout et était à deux doigts de prendre le fort qui était alors dirigé par un certain Commandant Desplats. Ce dernier était prêt à se rendre parce qu’il était à court de vivres et ses hommes démoralisés. Qu’El Hadj Omar puisse se laisser surprendre par les renforts de Faidherbe reste encore un mystère. Trahison ? Négligence ? Débandade des éclaireurs très tôt repérés par les soldats français ? Les historiens se chargeront de nous expliquer. Mais ont-ils seulement des éléments de réponse ? Notre langue au chat en attendant d’y voir plus clair.

Le Devoir