Duos dos à dos
CHRONIQUE
Echec des duos ou
déliquescence des binômes
De notre correspondant en France
Le Pape François disait que “L’homme pardonne parfois, Dieu toujours mais la nature, jamais”. Or, nulle part en politique, on n’a vu un duo ou un binôme aux commandes réussir la cohésion en travaillant harmonieusement pendant assez longtemps. La jalousie, les rivalités quotidiennes et les problèmes de prééminence sont des freins qui bloquent très souvent l’entente dans un couple de quelque nature que ce soit.
La jalousie est une émotion innée et adaptative, mais des approches socio-cognitives et la théorie du développement l’expliquaient dans la théorie de l’évolution.
Que Dieu nous préserve de Lervv, démon de l’envie, de la jalousie et du refus de se réjouir du bonheur des autres. Un comportement qui apparaît toujours quand deux pilotes sont aux commandes d’un système pour le gouverner ensemble en établissant les limites de la chefferie.
En effet, des divergences émergent dans un duo à chaque fois qu’il s’agit de gouvernance.
Ce fut la cas du couple même présidentiel pendant le règne de Macky Sall secondé par son épouse durant son magistère où on se demandait qui gouverne réellement. Combien de fois n’a t-on pas dit que c’était Marième Faye Sall qui tenait les reines du pouvoir ?
Bien avant et juste après les années 60, le duo Senghor-Dia en a fait les frais, à cause d’une discorde malencontreuse qui a conduit à leur séparation et à l’emprisonnement de l’un d’eux.
Le compagnonnage entre Abdoulaye Wade et Idrissa Seck ayant fait long feu pour avoir brisé l’entente du binôme jusqu’à ce que geôle s’en suive. Il est donc à parier que le duo Sonko/Diomaye, si le Pastef n’y prend garde, subira le même sort. Pour l’instant les divergences restent minimes alors que “l’appétit vient en mangeant, la soif s’en va en buvant“, rappelait François Rabelais.
Aujourd’hui, ce dilemme touche inéluctablement l’organigramme du PDS, surtout entre Wade et Karim sur la sauvegarde du parti démocratique sénégalais : la disparité créée par la non-maîtrise de la gouvernance des structures du parti par l’un en face du silence assourdissant de l’autre n’a pas encore fini d’exaspérer.
Ceci se reflète sur la marche du parti et l’entraîne vers la desquamation de cette organisation politique libérale qui, du reste, est la plus ancienne du Sénégal. Qui plus est, l’incompatibilité entre la rigueur qui fonde le soubassement d’un parti en opposition avec un système iconoclaste que constitue un autre camp antagoniste aura à long terme des conséquences fâcheuses..
Aussi, c’est comme si une véritable armée mexicaine essaie de serrer les rangs pour peser sur l’échiquier politique national..
L’ingouvernabilité du PDS est mise à rude épreuve à cause de l’incompatibilité des approches entre Wade et Karim. Les militants, eux, ne savent plus à quel saint se vouer.
En général, le gouvernail d’un bateau ne peut être tenu que par un matelot et non deux, comme le volant d’une voiture tenu par son seul chauffeur et le guidon de vélo tenu, de même, par un seul cycliste.
De ce fait, diriger le PDS par un candidat qui travaille en solo, usant d’un cabinet restreint, en opposition constante aux normes édictées par le Secrétariat national légitime du parti, est en porte-à-faux avec la démarche et le bon fonctionnement de toute organisation politique normale, qui compte prospérer.
Karim Wade use et égare le parti, au vu et au su de tous les responsables et militants. Seulement, l’amour que ces derniers portent au Pape du Sopi est resté intact. Car saper l’autorité d’un père naturellement hors de portée à l’intérieur d’un système méconnu la défaite de 2012 mérite de véritables assises.
Tant que le parti de Wade ne respectera pas les fondamentaux adossés à la validation de ses structures qui reposent sur les statuts et règlement, les défaites, les querelles et les démissions feront un effet néfaste sur cinquante ans de combat politique.
Cette cacophonie voulue et entretenue freinera, si on y prend garde, la réorganisation voire l’ascension du PDS pour la reconquête du pouvoir.
Tidiane SENE,
Toulouse