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Décrispation : Emballo, Sénégalais Mballo ?

Décrispation

 

Emballo, une mauvaise

déformation

du Sénégalais Mballo ?

Il ne faudra peut-être n’y voir aucune relation directe mais l’audience accordée à Ousmane Sonko, début juillet, suivie de la signature, le 4 août suivant, de l’accord de paix et de dépôt des armes à Bissau entre le Sénégal et le Comité provisoire des Ailes politiques et combattantes du MFDC, sous l’égide du président en exercice de la Cedeao, tout ceci donc mis bout à bout fait du Bissau-guinéen le héros de la Casamance : elle symbolise à l’analyse une autre forme de dépôt des armes quand le bouillant opposant s’engage à respecter avant terme le verdict des urnes pour les Législatives du 31 juillet.
Le « scepticisme » d’un ancien des renseignements « préoccupé par les incertitudes » qui planent sur le Sénégal repose peut-être sur la versatilité d’une des parties ayant juré ; mais l’accalmie après la publication des résultats partiels des Législatives, après la phraséologie habituelle, semble prouver que le répit entrevu depuis le 29 juin marche encore.

L’antériorité de la rencontre rend-elle alors pour autant l’accord plus solide ?
Dans ses délires ethnicistes, Ousmane Sonko laissait entendre sa préférence locale et ses fréquents appels à l’insurrection invitaient expressément les Casamançais ; il est d’ailleurs à noter que certaines forces arrêtées à Dakar lors des manifestations interdites du 17 juin renvoient dans leur majorité à la Casamance, par les liens du sang ou du droit du sol, si ce n’est pas des relations basées sur des vacances communes en sol casaçais.
Pouvait-on voir venir l’audience et l’accord avec le Mouvement des Forces démocratiques de Casamance après le tournant du 29 juin quand Yewwi Askan Wi décide de surseoir à une manifestation prévue mais encore non autorisée ?
Certes, l’Armée sénégalaise avait déjà fait la part du feu en mettant une bonne partie de troupes rebelles en déroute et en coupant leurs bases de repli traditionnelles. Mais le calme intérieur qui a suivi la proclamation des résultats partiels des Législatives du 31 juillet, encore une fois, renforce ceux qui avaient pris date quant à la victoire du système sur certaines velléités.

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« Comme vous savez, je suis président en exercice de la présidence tournante de la Cedeao. C’est dans ce cadre que j’ai reçu le leader de l’opposition. Mais le président Macky Sall était informé. C’est la même chose quand un leader de l’opposition de mon pays vient au Sénégal et souhaite rencontrer le président Macky Sall ou va voir un autre chef d’Etat de la sous-région,  il aura au préalable mon accord. C’est ainsi que ça fonctionne dans les relations internationales. Même en Europe. J’espère que vous avez suivi ce qui s’est passé au Brésil entre le président Bolsenero et son homologue portugais Robelo Marcelo Sousa.
Pour ce cas le Président Macky Sall était informé et m’a assuré qu’il n’y a aucune objection.
Je l’ai donc reçu. C’est normal, comme opposant, de s’intéresser à ce qui se passe en Guinée-Bissau. Il m’a félicité pour mon élection à la présidence tournante de la Cedeao. Il est quelqu’un de très lucide, et républicain. Il a promis que s’il perd les élections, il acceptera les résultats. En bon républicain., il faut aussi savoir accepter sa défaite au lieu de créer des troubles parce qu’on a perdu. Le Sénégal a un autre niveau de démocratie. »
Oumarou Emballo
11 juillet 2022


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L’accord du 04 août renforce la stature du président d’un État jusque-là pas trop pris sérieux mais que le Sénégal aide à assurer une autorité comme il fait traditionnellement avec sa diplomatie de voisinage. Au demeurant, les fréquentes interventions militaires en Guinée-Bissau et à Banjul doivent renseigner sur le souci de Dakar d’assurer la continuité et l’intégrité territoriales du Sénégal dont les voisins ne sont pas un lieu de déstabilisation et de repli. Le récent succès avec Banjul sur les problèmes de l’environnement en est une preuve, même si ce qui se passe en Gambie n’est pas rassurant avec les dernières Législatives quand Barro se retrouve avec 18 députés et « fait du racolage pour avoir une majorité », selon un diplomate local.
« Nous n’avons aucun appui de nos voisins, et ceci depuis Jawara. Le voisinage doit alors se construire de l’intérieur, par une consolidation de la cohésion et de l’unité nationales. Seul Macky peut apaiser et réconcilier, sans une confrontation qui inquiète les services de sécurité intérieurs et internationaux ainsi que les chancelleries qui sont au fond dans l’espionnage ».

P. MBODJE