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Confluence linguistique : Le Lébou vieillot et l’Anglais

À l’époque où la pièce de monnaie fifteen (tiens d’où nous vient cet anglicisme ?) avait de la valeur !
Je devrais peut-être me consacrer à une fouille… archéologique lexicale dans les 2 champs, notamment lebou et anglais.
Y’a beaucoup de vocables vieillots chez les lebu qu’ils ont dû emprunter aux soldats Yankees à l’époque basés dans le nord des confins broussards de Bargny. C’était en 1943 en pleine 2ème Guerre mondiale ! (Le terme même…“drianke” viendrait de…drive Yankee, en référence aux diongomas sénégalaises qui servaient de guides (guider : to drive) aux Yankees around town…!

CONFLUENCE LINGUISTIQUE DE L’ANGLAIS AVEC LE LEBOU ANCIEN DE PARLANCE BARGNOISE, NOTAMMENT

Le Lébou vieillot et la médaille
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Cette cohabitation langagière n’aurait pas manqué d’occasionner une infiltration de mot anglais dans les sols perméables lébou bargnois : par exemple, le mot “clip” s’employait déjà fin années 1950 par la troupe théâtrale de M’Both, un village plutôt qu’un quartier “guinaw-rails“, ainsi dénommé par son emplacement…séparé du reste des quartiers traditionnels de Bargny par la ligne ferroviaire Dakar -Niger !
Les baraquements militaires servant de base américaine étaient implantés au nord-ouest de Bargny, en 1943, en pleine deuxième guerre mondiale. Ce voisinage immédiat avec l’ancien M’Both, avant son déménagement en 1962 sur son site d’accueil actuel lui conférant le statut de deux quartiers (M’Both-y-Kaw et M’Both-y-Wagg/M’Both-Nord & M’Both-Sud) était source féconde d’emprunt lexical anglais-américain ! D’autant plus que beaucoup parmi les Bargnois de cette génération s’initiaient à divers corps de métier sous la supervision des Yankees, s’ils n’étaient pas versés dans des travaux de maintenance, de cuisiniers...Ils prenaient également part active aux séances ludiques de …clips récréatifs qu’ils ont adaptés à leurs veillées culturelles au clair de lune à la Place de Bayé séparant les deux M’Both.

Les Américains, en retour, prenaient goût aux techniques de lutte traditionnelle lébou qu’ils maitrisèrent vite aux dépens de leurs initiateurs locaux ! À telle enseigne qu’une célèbre chanson, reprise en chœur par les femmes de ces derniers, était éloquemment illustrative de la domination sans partage de l’écurie américaine terrassant un à un leurs valeureux adversaires lebous capitulant en ces termes : “Américain-bé toogala yaw du ma beuré !“, las de pouvoir leur opposer une stratégie victorieuse .
Cette base, Rufisque Airfield, avait d’ailleurs accueilli en 1943 le président américain Franklin Dwight Roosevelt de retour de Tunis via Dakar pour regagner les USA !
Un contexte historique qu’il fallait donc rappeler pour davantage édifier sur l’importance de ce vaste champ archéologique lexical que des fouilles au peigne fin permettraient, à n’en point douter, d’en exhumer de riches filons d’histoire philologique ayant enrichi la parlance  du lébou bargnois ancien de mots d’emprunt d’origine américaine : des vocables comme nébédaye (never die), diir jimbaan, en référence au nouveau-né non encore baptisé affectueusement appelé…dear (?) jimbaanmeek, moot (pour silence), totchie nguilaw (pour break wind au sens de to fart : péter),  go over the fence (pour dem guinaw keur), poop (pour excréments ; le mot est d’usage très courant aux USA!), meugueul (pour tiens, prends, sachant que mug en anglais désigne l’anse qui est la partie par laquelle on tient la tasse), drianké (pour drive Yankee, ces diongoma belles dames qui guidaient (to drive) les marins américains dans Dakar), meudeu (to drown : “se” noyer dans la boue qui est mud en anglais), kittle (pour kettle : bouilloire), boyal (to boil : faire bouillir, sauf que boyal s’applique au feu à raviver la flamme), tooy (fatigue musculaire, comparé au verbe anglais toil, travailler dur physiquement), glum (quand on est confus, comparé à gloomy : maussade), coltar (pour coal tar, goudron), gueudawout (pour get out), eubeuder (pour over there)….
Et la mine est beaucoup plus profonde qu’on ne le pense !!!

    Gorguez DIOP