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Rentrée : Les parents en ont pour leurs frais

La rentrée scolaire 2022-2023 porte les séquelles de la vie chère

 

Les parents déboussolés

par les frais de scolarité

 

La rentrée scolaire pour l’année 2022-2023 était prévue ce jeudi 06 octobre 2022 sur toute l’étendue du territoire sénégalais. La tradition consistait pour les enseignants à faire le rappel des élèves. Ceux avec des habits tout neufs. Apparemment les données ont changé. Dans plusieurs écoles, les effectifs présents ne faisaient pas la totalité. La cherté de la vie n’a pas laissé en rade le secteur de l’éducation. Les parents sont véritablement impactés par des problèmes financiers.

 

Par Khadidiatou GUÈYE Fall,
Cheffe du Desk Société

Il est 07 heures passées. À l’arrêt de bus, des enfants sont aperçus de loin. Les uns avec une belle mise et un sac à dos, les autres pressent le pas avec quelques feuilles à la main. C’est le jour de la rentrée des classes. Mais l’atmosphère n’en donne pas une apparence totale. L’arrêt de bus qui refusait du monde particulièrement composé d’élèves à des moments pareils, ne renvoie pas à une ouverture de classe.
Au seuil de la porte de cet établissement privé situé à Guédiawaye, les élèves viennent au compte-gouttes. La présence de parents d’élèves est notée. Dans un espace qui fait office de salle d’attente, des femmes s’installent sur un long banc en bois. À la sortie d’une d’entre elles, le constat montre un parent qui est venu le jour de la rentrée pour inscrire ses enfants.

Interpellée, elle confie l’affirmative : « Je suis venue pour inscrire mes enfants. C’est le jour de la rentrée mais je n’ai pas le choix. Le personnel de l’école est compréhensif à l’idée qu’on ne pouvait pas les inscrire avant le 5. L’argent n’était pas disponible. Je ne l’ai reçu qu’hier nuit ».

-Pourquoi vos enfants ne sont-ils pas présents à l’école, le jour de la rentrée ?

Elle fait savoir que rien n’a encore été acheté. « C’est normal, je n’ai pas encore acheté d’habits neufs pour eux ni de sacs. Les connaissant, ils ne voudront jamais venir à l’école avec des vêtements de l’année passée. Mes enfants n’accepteraient pas de venir à l’école sans un nouveau sac, de nouvelles chaussures. Ce sont des charges de plus avec cette cherté de vie. Même s’ils étaient venus, il n’y a pas encore de cours, peut-être ce lundi 10 », soutient la maman en voile.
La maman ne cache pas son inquiétude sur les achats qui doivent s’en suivent. « À l’ouverture des classes, les enfants sont parfois contents de retrouver leurs amis. Mais, pour nous, c’est autre chose : c’est en effet un poids qui pèse sur nos têtes. Le payement des inscriptions, l’achat de nouveaux vêtements, de nouveaux sacs, des nouvelles chaussures nous dépasse. À cela, il faut ajouter les fournitures qui sont obligatoires pour que nos enfants puissent commencer les cours. Parfois, les fournitures sont trop chères », déclare-t-elle.

En effet, c’est avec beaucoup de difficultés que les parents parviennent à répondre aux besoins de leurs enfants.

Ndèye Seynabou est une enseignante et parent d’élèves. Ses trois enfants sont tous des élèves. Elle peine à leur payer à tous de nouveaux habits. Sa stratégie est de motiver les plus petits et de discuter avec la plus grande susceptible de comprendre sa situation. « J’ai trois enfants qui sont tous dans les écoles privées. Je ne me le fais pas dire mais nous savons tous que la vie est chère. On se débrouille avec nos miettes de salaires. Puisque je ne peux rejeter les besoins des enfants, j’ai décidé d’acheter quatre voire cinq habits pour le plus petit de 6 ans et pour celle qui a 13 ans. En attendant, je vais discuter avec la plus grande, elle a 16 ans. Elle va comprendre ma situation de vouloir tout faire pour eux mais de ne pas pouvoir le faire. Entre-temps, je vais changer sa garde-robe progressivement. Je suis sure qu’elle sera en état de me comprendre », s’organise Ndèye Seynabou.

Ce père de famille est dans tous ses états. Selon lui, l’école française n’est plus comme avant : tout est cher à ses yeux. « Rien n’est facile maintenant au Sénégal, tout est cher, même apprendre coûte cher ; mes enfants sont dans une école publique mais les inscriptions sont trop chères. La plus grande me parle d’inscription avec plus de 20.000 francs. Elle me parle d’uniforme inclus dans l’inscription. Elle a eu son Bfem l’année passée mais si cela continue et si je dois payer l’inscription de quatre élèves, je risque de leur faire abandonner l’école française pour l’école coranique qui ne met aucune pression aux parents. Il y a 10 ans, c’en n’était pas le cas : les inscriptions tournaient autour de 10.000 à 11.000 francs ».
Notre interlocuteur est actuellement déboussolé par le montant des inscriptions de ses enfants. Il ne pense pas renouveler les accessoires scolaires. « Mon souci pour le moment, c’est voir comment payer les inscriptions ; pour les fournitures, je vais les acheter petit à petit. Je ne pense même pas à acheter des habits neufs. Ce serait au-dessus de mes moyens ».

Comme chaque année, la rentrée des classes perturbe le programme financier des pères de familles. Cette année, la situation a empiré avec la cherté de la vie qui ne laisse aucun secteur indemne. Le budget scolaire hante le sommeil des parents d’élèves.