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Les Pré-jugés De 2024

Présidentielle 2024

Une communication pré-jugée

Le présupposé, le virtuel vont dominer la scène politique sénégalaise d’ici à la présidentielle de 2024 et domineront une campagne électorale sans thématique parce que sans programme : ceux qui sont au pouvoir peinent à convaincre de leurs capacités à aider à vaincre la demande sociale et ceux qui n’y sont pas encore peinent désormais à faire rêver quand ils ont reçu un peu de pouvoir.

L’absence, l’information qui aurait du faire rêver, fait le lit du présupposé et du virtuel qui finissent cependant dans la névrose si aucun fait concret ne vient confirmer ou infirmer les accusations de Ousmane Sonko et de Aminata Touré Mimi selon lesquelles Macky Sall serait à l’origine de ses démêlés avec la masseuse Adji Sarr qui le fait poursuivre pour viols répétés et que le même Macky Sall aurait l’ambition d’être candidat en 2024 alors que la Constitution ne le lui permet pas.
Les assertions de l’un et de l’autre devraient se vérifier en Cour, ce qui pourrait définitivement être le cas pour le dossier Sonko que le principal intéressé veut éviter au péril de sa vie, alors qu’aucun fait concret ne vient pour le moment au secours de Mimi : l’évidence est une donnée à construire pour éviter les conclusions hâtives, jeu dans lequel veut exceller Macky Sall qui semble vouloir par cette communication non institutionnelle prendre ses adversaires en défaut.

Quel programme électoral alors à la veille de la nouvelle ère du pétrole et du gaz et des infrastructures qui vont s’insérer dans un réseau pan-africain ? Quelle stratégie sécuritaire alors que tous prédisent la malédiction du pétrole et du gaz avec des bras armés intérieurs au service de puissances adverses ? Au-delà de la thématique, quel discours, quel symbolisme, quel lyrisme pour une population en retrait de la politique depuis les années 90 et qui essaient de sortir du cycle en misant sur plus jeunes donc plus neuf ?
« La situation est sérieuse », commente un ancien élément des Forces de défense et de sécurité (Fds) le 21 septembre dernier, à la parution du Devoir daté du 22.
Relancée avec insistance, notre source s’est emmurée dans un silence d’autant plus curieux que sa réaction avait été spontanée ; d’où cette question : « Qui sème le doute dans l’esprit des Sénégalais ? Qui manipule l’opinion et pourquoi ? ». Certes, la percée de Ousmane Sonko fait encore réfléchir les chancelleries occidentales frappées par le manque de diplomatie du leader de Pastef dans ses prises de position publiques. Le voit-on déjà au Palais de la République au point de jouer sur la peur par une communication exagérée ?

La communication autour du 3ème mandat (Mimi) ou du complot (Sonko) va en effet polluer l’atmosphère en direction de 2024. De l’autre coté, le harcèlement en dessous de la ceinture l’emporte sur un bilan somme toute acceptable d’un Macky Sall qui aimerait s’immiscer au bon souvenir des Sénégalais en partant. Elle dénote de la pauvreté du niveau politique au Sénégal depuis la défaite des Socialistes en 2000 comme une fausse monnaie qui relègue la bonne au fond de la chaussette.

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Fara Diaw

« La nouvelle classe politique nous fait regretter les Djibo, Agne, Wade, Diouf, Senghor Cheikh Anta, etc… Même au temps de Senghor, du sang a coulé, etc. Il y avait un semblant d’élégance chez nos hommes politiques. On pourrait même parler de race de politiciens. Aujourd’hui, nous avons beaucoup de tacticiens et de manipulateurs ! Ce qui change aussi fondamentalement, c’est la jeunesse du corps électoral qui s’est élargie, des Infos qui sortent de partout avec en sourdine un délitement culturel et social ! Et les référents qui servaient de soupape de sécurité, ces médiateurs sociaux, se font de plus en plus rares ! Dans ce Sénégal 🇸🇳 qui doit se réinventer, il y a beaucoup d’inconnues qui rendent la résolution de notre équation : quel pays construire ? Très difficile.
Mais ne désespérons pas ! Césaire nous appelait à ne jamais désespérer : « Je refuse de désespérer parce que désespérer, c’est refuser la vie. Il faut garder la foi »

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Macky Sall communique depuis janvier par le concret ou son absence, le virtuel : le Premier ministre promis pour les Locales du 24 janvier est resté juridiquement présent et virtuellement absent avant d’apparaître en septembre ; il est accompagné par le projet d’amnistie du 28 septembre. Le discours devient d’autant plus incongru que celui post-12 septembre a nécessité le lifting d’une communication présidentielle sans objet pour les populations, en tout cas au Sénégal.
À l’inverse, Sonko et, désormais, Aminata Touré Mimi s’enferment dans la thèse d’un complot d’autant plus ridicule que l’accusateur affirme avoir eu ses entrées et sorties dans les locaux du salon de massage et que, par ailleurs, aucune enfreinte n’est notée dans les dispositions de la Constitution sur le nombre de mandats exercés à date par Macky Sall.
Popularisé par sa radiation pour manque de réserve survenue le 29 août 2016 en pleine affaire Sadibou Ndiaye qu’il conduisait, Ousmane Sonko bénéficie du solidarisme d’une société méfiante d’un pouvoir qu’elle invite depuis les années 90 à plus de solidarité, plus de tolérance, plus d’ouverture vers l’autre, tous les autres. Sonko qui ne manquait d’esprit de synthèse a pu ainsi articuler sa communication autour de sa théorie du complot, de l’injustice d’un pouvoir castrateur qui cherche à réduire à néant toute forme de résistance interne, d’où la base fondatrice de sa carrière politique : le syndicaliste exploite les documents à sa disposition et se mue en lanceur d’alerte récompensé par une tribune au Parlement grâce au plus fort reste. Au mépris des faits exploités autrement, après avoir pourtant reconnu être sorti en plein confinement pour s’enfermer quelque part. Le reste s’articule autour du complot.
Cette communication sur le présupposé n’est pas un programme de campagne pour une population qui essaie depuis l’An 2000 de vivre et qui a changé par deux fois d’administration pour retourner dans la sinistrose.
Quel discours mobilisateur pour une société entreprenante ?

P. MBODJE

Discours public et éthique

La science juridique, sans vouloir prétendre à la rigueur des mathématiques, doit être cohérente.
La rationalité humaine s’accommode mal avec la contradiction.
Ceux qui tiennent des discours publics dans quelque domaine que ce soit doivent s’en souvenir l’enjeu étant leurs réputation et considération.
Toutes les valeurs d’un individu ne doivent pas aller vers le mercantilisme notamment celles morales.
Plus hautes sont ses responsabilités plus l’individu doit avoir une éthique élevée.
Mais lorsque les biens publiques sont disputés à la manière des fauves qui s’acharnent sur la carcasse de leur proie ou des chiens de chasse à courre lors de la curée, il faut sans naïveté se rendre compte le développement restera un mirage.

Ababacar Sadikhe DIAGNE
Ingénieur de l’aéronautique civile de classe exceptionnelle