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Culture : L’Enfance De L’Art

Mamby Mawine, une artiste accomplie

Djarama !

Organisé par l’association Djarama et coproduit par le Tof Théâtre, le symposium international sur la structure du spectacle jeune public marque un tournant dans l’histoire de l’art en réunissant de nombreux participants nationaux et internationaux qui ont discuté du thème “Quelle politique de promotion du spectacle jeune public au Sénégal ?”. Cette manifestation riche en panels, ateliers, réseautage et spectacles avait pour but de faire connaître le sous-secteur du jeune public aux acteurs culturels et éducatifs nationaux. Le ministre secrétaire d’Etat de la culture M.Bacary Sarr, Samba Mbalo, coordinateur et l’initiatrice Mamby Mawine se sont réjouis de la réalisation de ce symposium. Ils ont répondu au Devoir dans cet entretien triangulaire.

Entretien dirigé par
Chérifa Sadany Ibou-Daba SOW,

Cheffe du Desk Culture

Votre première sortie en tant que ministre secrétaire d’État de la culture marque le début de cette manifestation. Quelle est votre première impression ?

Bacary Sarr : La culture est le socle et le fondement de tout.

Le symposium est un élément de manifestation culturelle dans le sens où l’élément central c’est l’enfance, la jeunesse, l’éducation. Le ministère chargé de la Culture est en train de mettre en place un programme qui est juste une continuité et un nouveau programme suite au changement de régime : nous avons pensé en rédigeant ce programme que la culture est le socle et le fondement de tout. Une société ne se construit pas sans une identité remarquable constante et construite. Voilà pourquoi nous sommes là pour soutenir ce programme et mettre à disposition toutes les possibilités dont dispose le ministère en termes d’espace, de logistique, de ressources humaines pour que cette manifestation soit une réussite. Le ministère a toujours accompagné d’une certaine manière ces manifestations mais nous présentons un cachet particulier pour le travail que nous démarrons à la culture, que ça soit matériel et immatériel.

Un changement est imminent. Quelle serait votre implication pour la suite du travail axé sur la culture ?

Bacary Sarr : Le ministère va s’engager parce que le président Bassirou Diomaye Faye et son Premier ministre Ousmane Sonko ont construit un projet pour que le Sénégal puisse s’appuyer sur un levier puissant afin de construire une souveraineté culturelle et donc, à partir de ce moment-là, le projet va se dérouler suivant ce levier. Nous sommes là parce que c’est la jeunesse et nous comptons faire en sorte qu’elle puisse retrouver son espace de déploiement pour construire ce pays.

Comédienne, metteur en scène et auteure, Mamby Mawine, vous êtes aussi la fondatrice de l’association Djarama créée en 2005. Que ressentez-vous après la réussite de ce symposium ?

Mamby Mawine : Aujourd’hui, le monde est interrelié et la place de nos enfants fait partie de ce monde-là.

Je suis très touchée et très émue car ça fait plus de 20 ans que j’ai rêvé ce jour. Je fais du théâtre pour enfant depuis 1994 et j’ai sillonné le monde (l’Amérique, l’Afrique, l’Europe), dans plus de 30 pays, pour représenter le Sénégal avec nos spectacles jeune public. Et quand je vois ce qui se passe ailleurs de beau, j’ai toujours envie que ça arrive aussi chez nous. Car quand un enfant nourrit son cerveau avec des créations de la danse, du théâtre, de la peinture, de l’art, quand il sera grand, il sera plus ouvert. Et donc, je me suis dit qu’il faudrait qu’ici, au Sénégal, qu’on puisse structurer le jeune public.

Aujourd’hui, plusieurs personnes sont venues du monde entier. Ce sont des acteurs culturels, des directeurs de festivals, des comédiens, des metteurs en scène, des partenaires comme le Tof théâtre. Tous venus pour accompagner ce symposium qui va nous permettre au sortir de ces deux jours d’avoir un cahier de charge qu’on va proposer au ministère de la Culture pour accompagner ce projet de développement du jeune public au Sénégal.

Quelle politique de promotion du spectacle jeune public au Sénégal ? ” Quelles ont été vos attentes par rapport au thème ?

Mamby Mawine : Nous attendions que le sous-secteur jeune public soit reconnu par nos instances et qu’elles développent un mécanisme politique pour accompagner cette dynamique. Une formation de qualité permet aux jeunes d’avoir du spectacle qu’ils peuvent jouer au Sénégal mais aussi à l’international. Aujourd’hui, le monde est interrelié et la place de nos enfants fait partie de ce monde-là. Si nous ne les préparons pas à être dans le monde, ils vont se tourner vers d’autres pays. Ils vont avoir envie, comme on le voit aujourd’hui, d’aller ailleurs. Il faut leur donner envie de rester au Sénégal, de travailler, de se produire et de brouiller le monde tout en rêvant du Sénégal. Chacun dans son domaine doit faire sa part. Pour nous, c’est le jeune public qui nous intéresse  et c’est ce qu’on a envie de structurer. Voir que le jeune public s’envole, que nos centres culturels régionaux puissent accueillir des spectacles, inviter les élèves des écoles à venir dans les centres culturels, que des artistes puissent aller dans des écoles donner des ateliers, jouer leur spectacle et former des enfants.

Quand on s’adresse à un enfant, on doit savoir ce qu’on lui propose. On peut aborder toute sorte de thématique avec l’enfant, mais il faut savoir sur quel angle. Il y a des psychologues, des écrivains, des metteurs en scène du jeune public qui sont prêts à venir au Sénégal pour participer à la formation, à la création pour le jeune public.
Il faut que le ministère nous accompagne. Comme il l’a dit, ils ont un programme culturel, surtout pour la jeunesse. Ils ont un projet pour le Sénégal et nous, nous sommes à l’écoute. Le symposium va servir de leur présenter ce qui se fait dans le milieu du jeune public à travers le monde pour qu’à leur tour, ils se disent quel modèle nous allons développer ici au Sénégal.

Après ces deux journées riches en échanges sur la culture, quel est votre bilan en tant que coordinateur de ce symposium initié par Mamby ?

Samba Mbalo : Le spectacle jeune public, une notion peu développée dans le paysage artistique sénégalais.

L’association Djarama a choisi le musée des Civilisations noires pour y réunir une centaine de l’auditorium professionnels de la culture pour les inviter à réfléchir sur le devenir de la création à destination des enfants. Le spectacle jeune public, une notion peu développée dans le paysage artistique sénégalais. Écrire, mettre en scène et diffuser des produits artistiques à destination des enfants n’est pas une chose simple car nécessitant un vrai parcours et une pédagogie spécifique. Les travaux du symposium ont permis de mettre en lumière le potentiel énorme des acteurs sénégalais dans leur capacité à s’adapter et à proposer des produits malgré l’inexistence d’un écosystème adéquat et apte à supporter ces initiatives. Dès lors, il a été détecté un manque crucial d’éléments indispensables de la chaîne de valeur pour orienter les jeunes créateurs vers ce sous-secteur à fort potentiel. A l’ère du numérique, tous les acteurs présents sont d’accord sur le fait que seule une mutualisation des différentes parties prenantes et une organisation solide pourront permettre d’asseoir une dynamique nationale pour le jeune public.

Je termine par dire qu’en confrontant pour la première fois chercheurs, auteurs, dramaturges, metteur en scène, étudiants, producteurs et autres professionnels, le Sénégal vient de se positionner sur un axe de souveraineté artistique et culturelle avec des orientations qui permettront de mettre en avant les initiatives endogènes pour construire le Sénégalais de demain.

Est-ce que cela a été compliqué d’organiser une activité de réflexion en deux mois ?

Samba Mbalo : Ce fut déjà un honneur pour moi de co-coordonner une telle activité de réflexion avec des représentants d’une dizaine de pays venus pour la circonstance. Disons que c’était possible et nous l’avons fait. Effectivement, en deux mois, nous avons su, avec le comité scientifique et la direction des arts, proposer des thèmes qui ont permis de dégager des pistes solides dans la perspective de consolider le travail entamé par Mamby Mawine il y’a 30 ans. A noter que ces deux jours ont été riches et la présence du ministre secrétaire d’Etat a montré toute la disponibilité de la tutelle à accompagner les initiatives des acteurs culturels. Maintenant que l’objectif du symposium est largement atteint avec la constitution d’un réseau national et international autour d’acteurs clés, il va falloir mettre en place tout le dispositif de suivi qui permettra de matérialiser toutes les recommandations et surtout, en rapport avec la direction des Arts, définir une ligne directrice sur les 3 ans à venir.