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Un Son Ko : L’habit ne fait pas le moine

Il semble que les rôles s’inversent au sommet de l’État : Diomaye Faye s’adapte alors que Sonko s’empêtre dans un habit apparemment trop grand face à de nouvelles curiosités compétentes sur le papier. Le Premier ministre a le mauvais rôle : emboucher une rengaine que l’électeur a solutionnée en changeant la cartographie des intervenants ; la chasse aux sorcières et les promesses d’un avenir difficile ne sont pas un projet de gouvernance.

Dualité au sommet de l’État

Diomaye Ok
Ousmane Ko

À les regarder en gros plan sur la photo officielle du 9 avril, avec leurs pantalons qui tirebouchonnent, on ne peut s’empêcher de penser à la pandémie de la Covid-19 et de son lourd passif de ces quatre dernières années : le passif de ces quatre dernières années submerge ce gouvernement de l’An I avec ce rouge symbolique au pied des membres de l’attelage ; le Projet se réalise enfin, au terme d’un combat épique qu’aucune amnistie ne saurait absoudre.
Le président élu semble moins en souffrir, même si sa voix s’est brisée à l’évocation de ce passé récent dans son discours d’investiture ; à regarder Ousmane Sonko, il semble ne pas supporter le poids du regard que le Sénégal et la communauté internationale porteront sur celui qui est désormais le Premier ministre, après avoir combattu pour un changement d’un système que tout le monde intègre aujourd’hui, nolens volens.

Nous semblons ainsi vivre une situation comportementale inverse de celle du début : le président de la République se coule bien dans son moule, aidé par le protocole d’État et les textes, même s’il semble mal les interpréter, comme avec cette invite pour renforcer le pouvoir de son Premier ministre alors qu’il suffirait… Par contre Sonko semble plus hésitant, moins sûr, désorienté par la fonction.
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“Ah oui oui : le président de la République est en train de surprendre positivement tout le monde ; c’est mon avis. Dieu fait bien les choses”.
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Il est sûr qu’avec le ticket à la tête de l’État, Ousmane Sonko vit toujours son combat pour son projet de conquête du pouvoir, cette fois-ci à partir de la station primatoriale même : ses tentatives de se conformer au protocole administratif sont gauches et sonnent faux : le regard inquisiteur qu’il pose sur ses vis-à-vis et circulaire traduit une certaine gêne, tout aussi méfiant que celui de biais que le président posait sur ses interlocuteurs et que l’on traduisait par une certaine timidité ; la verticalité de haut en bas (du président au Premier ministre) et la collatéralité noient désormais l’inspecteur des Impôts dans une marre de compétences révélées quand chaque ministre suscite l’envi par ses compétences académiques à traduire sur le terrain de la demande sociale plus pragmatique devant les besoins essentiels de populations révoltées.

Les grandes gueules soudain devenues liquides tirent l’attelage à hue et à dia et le Son Ko risque de se diluer dans un brouhaha gouvernemental visible avec ces ministres soudain devenus diserts, allant au-delà de leur sujet immédiat plus prévisionnel que pragmatique, faisant plus appel au cœur qu’à la raison.
Si l’habit n’est pas trop grand malgré les hésitations d’un Premier ministre fixant la date du Conseil des ministres avant la mise en place de l’attelage, il ne fait pas le moine : comment et avec quels yeux de Chimène regarder Ousmane Sonko dans la nouvelle configuration politique et sociale du Sénégal ?

Son populisme se dilue dans un appel à la reddition qui finit par se comprendre comme la justice sélective des vainqueurs ; la chasse aux sorcières et les promesses d’un avenir difficile ne sont pas un projet de gouvernance. Sonko a le mauvais rôle : emboucher une rengaine que l’électeur a solutionnée en changeant la cartographie des intervenants.

Pathé MBODJE