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Tidiane Kounta, ancien dirigeant du mouvement étudiant: “Les partis de gauche avaient jeté leur dévolu sur la jeunesse pour leur implantation” Par Baye Saliou THIAM

On dit souvent que l’endoctrinement des adultes en faveur du Parti socialiste était tellement fort que l’opposition de l’époque n’avait d’autre choix que de miser sur la jeunesse, notamment celle estudiantine qui fut le fer de lance de son combat. Partagez votre cet avis ?

Effectivement, l’opposition, notamment les partis de Gauche, avaient jeté leur dévolu sur la jeunesse pour leur implantation. Les lycées et l’Université de Dakar étaient les terrains de chasse gardée de ces partis. Avec leur contrôle du mouvement syndical enseignant (SUDES puis UDEN), ces partis avaient les moyens désignés pour enrôler les élèves et étudiants.

Certains observateurs comparent les événements de 88 à mai 68, car depuis Mai 68 on n’avait pas assisté à un éveil des consciences aussi conquérant et exigeant. Partagez-vous cet avis ?

Je n’ai pas eu le privilège d’être acteur des événements de mai 68 car trop jeune pour y prendre une part active. De ce que j’en sais, ce mouvement était né à l’extérieur avant de gagner nos jeunes pays en construction qui en ont été fortement ébranlés. Au contraire, 1988 fut un mouvement endogène, conçu, élaboré et développé par les partis d’opposition qui se sont appuyés sur le mouvement estudiantin mais également sur les masses urbaines pour fortement ébranler le régime socialiste. Oui, ce fut un éveil politique et citoyen formidable, le deuxième après mai 68.

Pour certains observateurs, ce qui a été déterminant dans les événements de 88 c’est la précocité de la conscience politique des jeunes de l’époque : les effets pervers des ajustements structurels, la tyrannie des institutions financières, la nécessité d’une indépendance économique, les questions électorales etc. étaient devenues des sujets de réflexion et de débats féconds au niveau des jeunes, Contrairement à ce qui se passe aujourd’hui. Êtes-vous vous d’accord avec cette analyse ?

Oui, 1988 fut comme le bruit d’une cocotte-minute géante des populations dont les souffrances remontent au début des années 70, avec les nombreuses crises qui ont secoué le Sénégal (crise du dollar et du pétrole, sécheresse, détérioration des termes de l’échange, etc.) qui ont engendré les programmes étouffant d’ajustement structurel avec comme effet une paupérisation accrue des ménages. À cela, évidemment, il faut ajouter le musellement des élites qui a pris fin avec l’avènement de Diouf dont le régime fut marqué par le sabotage interne des barons, la crise gambienne, le conflit naissant en Casamance et le démantèlement inexpliqué des forces de police en avril 87.

 

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