Portrait – Kébé, un homme envahi d’ambitions sur sa chaise roulante: Une agression lui a arraché la mobilité de ses jambes Par Khadidiatou GUÈYE Fall
La vie est pleine de surprises. C’est que révèle l’histoire de Mamadou Kébé, un homme qui a traversé des moments tragiques. Son handicap vient d’une agression. Malgré son incapacité d’utiliser ses membres inférieurs, il demeure déterminé et plein d’ambition. Sa mobilité réduite est pour lui une bénédiction.
Dans la vie, une situation peut changer voire bouleverser l’existence de la personne. Mais certains arrivent à y faire face ; ils trouvent dans la situation un atout au lieu de voir un l’aspect négatif. Le handicap est l’une des situations qui surprennent le plus quand cela n’est pas inné. Beaucoup de personnes ont vu un jour leur mobilité réduite par accident ou par dame nature. Quand cela est inné, les conséquences sont moins dévastatrices. Par contre, les personnes victimes d’un quelconque imprévu causant une mobilité réduite au courant de leur vie peinent énormément à se relever de la situation imprévisible. La mobilité réduite est contextuelle ou situationnelle pour un certain Mamadou Kébé.
Agé de 33 ans, cet homme sur la chaise dégage un charisme inouï. De son vrai nom Mamadou Kébé, il répond le plus souvent par son nom de famille. Kébé est un jeune à qui le handicap a été une fatalité. Un accident hasardeux lui a arraché la sensibilité des membres inférieurs. En effet, en 2005, un samedi soir alors qu’il faisait 00h, Kébé se baladait dans les rues des Parcelles Assainies avec un groupe d’amis et soudainement une association de bandits les a attaqués. Dans l’affrontement, il se retrouva poignardé dans le dos avec un tournevis. Cet instrument qui lui a été infligé avait de suite touché le nerf sciatique et automatique. C’est ainsi qu’il a perdu la sensibilité de mes membres inférieurs.
Brilliant cursus
Pourtant Kébé a suivi un cursus brillant et normal jusqu’en 2005 quand il obtint son Bfem avant de perdre l’usage de ses jambes. Cet accident lui a coûté 7 ans de convalescence, sans accès aux études. En 2013, il se fait un challenge d’obtenir le baccalauréat en déposant sa candidature libre. Il réussit le haut la main mais fit partie des premiers étudiants orientés à l’université virtuelle du Sénégal en sociologie. Parallèlement, il s’inscrit dans une université privée pour suivre une formation professionnelle en administration des affaires.
De nature ambitieux, Kébé arrive à mettre en place l’association des personnes vivant avec un handicap en 2014. Le but de cette organisation était de défendre les droits et le bien -être des personnes en situation de handicap. Tout en concentrant sur ses deux formations, Kébé devint membre de Handicap international sur des projets d’insertion socioprofessionnelle et sur l’éducation inclusive. Sa soif d’intégrer le milieu professionnel pousse Mamadou Kébé à devenir technicien en vidéo surveillance à partir de 2019 puis responsable des opérateurs vidéo jusqu’en 2021.
Aujourd’hui, Mamadou Kébé occupe le poste d’assistant administratif dans un hôtel de la place. Pour renforcer ses chances d’avoir la vie professionnelle longtemps convoitée, il amasse un master en management et gestion de projets dans une autre école de formation privée en 2020. Dans ses propos, Kébé campe sur son objectif qui est de faire du Sénégal une société inclusive : « Changer la perception que la société a sur les personnes à mobilité réduite afin que ces dernières puissent bénéficier de leur droit à tout point de vue ». Loin de déceler une quelconque déception dans sa vie, il cible plutôt dans ambitions et des objectifs. Pour Kébé, il est assez jeune pour énumérer ses temps de regrets car rien n’est encore acquis pour être perdu. Avec sa détermination, il ne voit aucun obstacle à réaliser ses rêves de fonder une famille, d’amener ses parents à La Mecque et de servir sa communauté.
C’est avec philosophie que le sociologue vie son handicap. Il se dit qu’en tant que croyant, on ne peut qu’accepter le destin., raison pour laquelle il prend son handicap comme une bénédiction car dans une certaine manière il lui a permis de développer d’autres ressources intérieures. Son regret est le regard négatif que la société porte sur la personne handicapée.
Débordant d’ambitions et de projets, Kébé s’est engagé dans un cabinet conçu pour l’insertion des personnes.
Après plusieurs années de plaidoyer avec les membres de son organisation, la direction générale de l’action sociale leur a affecté un Cprs dont la mission principale était de faciliter la réinsertion sociale des groupes vulnérables. Kébé porte le poids du président de l’association des personnes avec un handicap dans la commune des Parcelles Assainies en étant également coordonnateur de team handicap for development.
Sensible, le futur sociologue accorde facilement confiance chose que ses proches lui reprochent. Quant sa modestie, sa sociabilité et son optimisme, ses proches n’en disconviennent pas.