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Amadou Bâ Pm : Les jours 100

Amadou Bâ Pm

Les jours 100

Le Premier ministre apparaitra finalement en public ces jours-ci et rencontrera entre autres la société civile. Acculé devant la vague d’indignation à la suite de la publication du rapport de la Cour des Comptes, le gouvernement qui envoie ses éléments au charbon en fait de même avec le Primus inter pares. Acte désordonné donc, ne pouvant être comptabilisé.

L’Assemblée et les affaires ont fait de l’ombre à Amadou Bâ durant ses 100 premiers jours : le Premier ministre est resté sans éclat, sauf avec la motion de censure qui a lui a permis de casser la grande alliance de l’opposition parlementaire et de lancer conséquemment la course pour la candidature de Macky Sall en 2024.

Éclipsé par une Assemblée nationale des plus précaires sur le plan équilibre, Amadou Bâ nommé il y a 100 jours a dû ronger son frein : le long marathon budgétaire n’a pas permis de le mettre immédiatement en vedette ; même sa déclaration de politique générale n’a pu lui donner plus de relief qu’à l’ordinaire, l’acte ressortissant plus du protocolaire que du spectaculaire. À se rouler les pouces, il eût pu entamer certaines visites culturelles et religieuses, comme de coutume pour une bénédiction urbi et, orbi ; curieux oubli.

Sauf que l’opposition va lui tenir la jambe jusqu’à hauteur du périnée avec sa motion de censure.

Certes, l’acte est banal, étant a priori la réaction de l’Assemblée à la déclaration ; il aurait même dû intervenir immédiatement après la Dpg, l’Assemblée nationale ayant implicitement accordé sa confiance au gouvernement en lui donnant les moyens de sa politique budgétaire.

Avec les résultats des Législatives, l’Alliance pour la République (Apr, formation majoritaire) qui a approuvé la nomination du Premier ministre du bout des lèvres (aucun grand ténor n’a réagi) comptait voir Amadou Bâ se fracasser sur les écueils des flots parlementaires : on ne donnait pas cher pour sa peau avec l’instabilité institutionnelle née après le 31 juillet ; le vote de la motion de censure aurait ainsi permis de vérifier une majorité minoritaire à l’Assemblée qui fait face à une minorité majoritaire. La dérobade fort opportune du Parti démocratique sénégalais (Pds) a permis de sauver les apparences.

Les législatives du 31 juillet ont faussé le calcul politique de Macky Sall de se cacher derrière un fusible qu’il chargerait de tous les maux d’ici 2024, avant de partir par la grande porte avec un bilan des travaux qyi se termineraient vers…2024 ; il est ainsi obligé de se mettre en première ligne, faisant office de Pm pour inaugurer les chrysanthèmes et annoncer des éléphants blancs. Jamais, en effet, Macky Sall n’a été au-devant du terrain politique que depuis la nomination du Premier ministre ; il démontrait sa position de 2019 de liquider la primature pour mieux regarder les Sénégalais dans le blanc des yeux. Le retour du poste à la veille de la fin de mandat continental est dès lors une billevesée qui devait lui permettre de souffler un peu, au service de l’Afrique ; même certaines opérations du ressort théorique d’un Premier ministre comme les poses de première pierre ont été effectuées sans Amadou Ba, privilégiant les potentats locaux.

An fond, dans son confinement en domicile surveillé au Petit palais, Amadou Bâ a tout fait pour rester petit : pas de sortie, ni grande ni petite, pas de visite de courtoisie aux grandes familles religieuses, pas d’acte de présence d’un Pm sur la scène sénégalaise.

À la limite lui demande-t-on un impossible bien modeste : la reconquête de Dakar qui reste sourde aux déclarations d’amour  d’un président et de sa cour de courtisans, même transhumant ; Amadou Bâ s’est y est essayé sans succès entre 2019 et 2022.

Le bon pianiste reconnu meilleur ministre des finances joue désormais sous une fausse note.

P. MBODJE