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Ousmane Sonko, Pastef, les syndromes d’une crise Par Habib KÂ, Bureau régional de Matam, Thilogne

Sonko a glissé une première fois sur des peaux de banane que le Pape de la politique sénégalaise avait tendues sous ses pieds : il se précipita chez lui, espérant décrocher quelque chose…il rentre bredouille.

Puis c’est le quatuor des malheureux perdants qui se rend chez le Khalif général des Mourides, qui leur conseilla de tout laisser tomber ; c’est ce qu’ils firent et y ajoutèrent la renonciation de recours au Conseil constitutionnel

De ces évènements, Ousmane Sonko devra comprendre qu’il y’a une realpolitik avec lequel il faut compter pour ne pas se laisser isoler des autres

Ousmane Sonko doit aujourd’hui plus que jamais s’inquiéter sur son avenir politique.

Cette histoire de viol avéré ou pas est venue mettre un coup de canif tranchant qui n’a pas encore fini d’envoyer le Pastef au fond de l’abîme si des mesures intelligentes et courageuses ne sont pas rapidement prises ; il s’agit de couper l’abcès pour sauver tout le corps.

Comme le dit l’audio attribuée à maître Dior Diagne, coupable ou pas, Sonko ne sortira pas indemne de cette prise d’anaconda.

Les communales de janvier 2022, c’est dans huit mois et son cas est toujours mis au frigo avec une infime chance d’être réglée.

Si son cas n’est pas réglé urgemment, une crise politique, organisationnelle, voire structurelle est en vue pour le Pastef, s’il fait du Sonko Rek, sans plan B.

Comme Karim Wade.

Depuis sa création, un jour de janvier 2014, les Patriotes du Sénégal pour le Travail, l’Ethique et la Fraternité (PASTEF) enchaînent succès sur succès chez les intellectuels, la Diaspora, les jeunes notamment.

Ce mouvement, né hors des chantiers battus, suscita un regain d’intéressement des citoyens à la nouvelle offre politique.

Ils sont des millions, en effet, les Sénégalais que les discours des politiciens n’emballaient plus. Tous pareils, tous des pourris avait-on l’habitude de rétorquer, lorsque ces gens-là débitaient leur discours. L’électorat préférait s’abstenir de voter parce que Jean ou Paul président, c’était du pareil au même.

C’est ce qui explique, dans une certaine mesure, le taux considérable d’abstentions de tous les scrutins passés, 33% pour la Présidentielle de 2019, soient 2.254.363 sur plus de 6 millions 680 mille inscrits.

Ousmane Sonko et les siens ont insufflé une nouvelle dynamique, fait la politique autrement et qui avait commencé à dissiper le scepticisme de certains. Un programme, le patriotisme, avec une communication adaptée et efficace.

Une méthode tranchante qui confronte le régime à ses propres chiffres, l’inféodation de l’économie sénégalaise à celle française et la place de plus en plus exubérante que la Turquie de Recep Tayyip Erdogan et la Chine sont en train de se tailler dans le marché sénégalais.

Ousmane Sonko et le Pastef ont rudoyé ferme pour porter à l’attention des Sénégalais, au niveau de l’Assemblée nationale, sur les plateaux des télévisions, dans les réseaux sociaux, des dossiers sulfureux, à parfum de scandales : les contrats pétroliers et gaziers, Arcelor métal, zircon, 94 milliards d’un Titre foncier, le Train Express Régional (TER), l’Aéroport International Blaise Diagne (AIBD), le Bus Rapid Transit (BRT).

Des questions très sensibles qui poussent à l’honorabilité de certains hauts responsables dont le pouvoir peine encore à apporter des réponses convaincantes.

Ousmane Sonko a eu la chance de passer entre les mailles du parrainage, autrement on n’aurait pas parlé de lui comme chef de l’opposition avec 15,67% des suffrages exprimés, soit 687.523 voix, alors que, pour les Législatives, il est passé de justesse avec le plus fort taux de reste : 1,13%, et ceci, avec une coalition de petits partis.

Ousmane Sonko est celui qui traquera le pouvoir, en dépit de sa majorité mécanique, le président de la République ; les ministres, quand ils passent aux plénières à l’assemblée nationale, le président Moustapha Niass en reçoit pour son grade.

Il est parfaitement à l’aise Ousmane Sonko, à l’Assemblée nationale, comme sur les plateaux de télévision, égratignant certains, lacérant l’orgueil des vieux briscards ; Ousmane Sonko est partout sur tous les registres et communiquant de trop, au point qu’il était permis de penser pour un parti de jeunes intellectuels, issus des couvées de la Direction générale des Impôts et Domaines (DGID), pour la plupart, des hautes sphères de l’administration, des cadres qui n’ont jamais frayé avec la politique ou qui l’abhorraient et qui se sont résolus à s’engager autrement avec des propositions concrètes, une nouvelle vision du militantisme (le don de soi), selon laquelle le culte de la personnalité, ou du chef inamovible ne saurait prospérer ; mieux :! il commence à ouvrir les yeux sur une réalité intangible, que c’est le système qui produit les armes de sa propre destruction.