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Du ciel au fond du trou, Karim Wade y pense toujours, tous les matins en se rasant Charles Tchalys SENGHOR, Desk central, Le Devoir

Karim Wade qui a connu toutes les gloires du temps de l’exercice du pouvoir par Me Abdoulaye Wade pendant 12 ans avec des prétentions présidentielles, s’est retrouvé au fond du trou avant d’être libéré. Toutefois, malgré des échecs aux locales de 2009 et à la présidentielle de 2019 pour laquelle sa candidature a été recalée, Karim Meïssa Wade croit toujours en son étoile de devenir président de la République. Et il se bat avec ses camarades pour y parvenir.

Karim Wade, huit ans après l’élection de Me Abdoulaye Wade, a titillé les sommets. Sa nomination au poste, de mai 2009 à la fin du régime en mars 2012, avec à la clé le balèze ministère de la Coopération internationale, de l’Aménagement du territoire, des Transports aériens et des Infrastructures, faisait de lui le collaborateur de son père de président le plus important, lui valant le surnom de « ministre du Ciel et de la Terre ».

L’homme ayant occupé auparavant les postes de conseiller et de patron de l’Agence nationale pour l’organisation de la conférence islamique (Anoci), chargée de la réalisation d’infrastructures pour le sommet de l’organisation de la conférence islamique (Oci) à Dakar, ne manque pas d’ambitions politiques. Aux élections régionales, municipales et rurales du 22 mars 2009, sa candidature est annoncée, pour la mairie de Dakar. Il est alors investi dans la liste de la coalition Sopi, dirigée par Pape Diop.

Mais la liste du président de la Génération du Concret, un mouvement affilié composé de proches du chef de l’Etat, créé en 2006, est battue par une puissante coalition dirigée par Khalifa Sall, brisant son rêve de diriger la ville de la capitale sénégalaise avec ses milliards de Fcfa.

A la fin du régime de son père, le natif de Paris n’aura pas le temps de savourer les dividendes. Il est incarcéré à partir de 2014, soit deux ans après la « chute » de son père, pour enrichissement illicite et détournements de fonds. En mars 2015, il est condamné à six ans de prison ferme et à plus de 138 milliards de Fcfa d’amende. En 2016, il est gracié par le président de la République tout en restant condamné à payer l’amende.

Une libération controversée

Sa libération, comme toute œuvre humaine, restera très controversée. Même si elle a été négociée en hauts lieux avec des interventions de présidents africains comme Ouattara, Denis Sassou Nguesso et même des chefs religieux, Karim Wade soutient avoir été pris de cours. Le 23 juin 2016, vers 23 heures, Karim Wade, en plein sommeil, a été réveillé par le colonel Daouda Diop, directeur de l’administration pénitentiaire, et Lamine Diop, directeur de la maison d’arrêt et de correction de Rebeuss.

Sur place, il sera informé de sa libération qui devra être précédée de la confection de son passeport diplomatique. Toutes les démarches (photographies d’identité et la prise d’empreintes digitales) sont effectuées dans les lieux, suivies de sa libération.

Karim expédié loin de la Teranga

L’ancien tout-puissant ministre n’aura même pas le temps de remercier ou dire au revoir à ses nombreux supporters, aux  curieux et même aux médias qui l’attendaient, jusque tard, dans les rues de Dakar, et pas loin de la maison d’arrêt et de correction. Les autorités, décidées à éviter les attroupements, emprunteront, vers 1 h 30 du matin, une porte dérobée et des voies détournées pour se rendre à l’aéroport international Léopold Sédar Senghor où le fils de l’ancien président était attendu par le jet privé de son ami, Cheikh Tamim Ibn Hamad Al Thani, Emir du Qatar.

Manœuvres

Visiblement aguerri par ses trois ans d’endurance en prison, l’homme qui vit depuis au Qatar et dont la candidature à la Présidentielle a été actée par le Parti démocratique sénégalais (Pds) en 2017, ne voit toujours pas le bout du tunnel. Il est recalé à la Présidentielle de 2019 à cause de sa condamnation.

Qu’à cela ne tienne, l’ancien patron de la Génération du concret ne démord pas. Le 9 août 2020, il est désigné par Me Abdoulaye Wade secrétaire général-adjoint du PDS chargé de l’organisation, de la modernisation et de l’élaboration des stratégies politiques du parti.

Cette réforme fait de lui, même à des milliers de kilomètres du Sénégal, l’homme fort du Parti, lui permettant d’écarter de fortes personnalités. En l’occurrence Oumar Sarr, ex-numéro deux du Pds, défénestré de son poste et de la direction en faveur d’un proche de l’ancien ministre, Bara Gaye.

Avant le maire de Dagana, Farba Senghor, Pape Samba Mboup, entre autres, ont fait les frais de la toute-puissance de l’ancien « ministre du ciel et de la terre ». Il est également à l’origine du départ du dernier Premier ministre de Me Wade, Souleymane Ndéné Ndiaye.

Aujourd’hui, Karim Wade continue de dérouler. Ses partisans continuent de croire en son étoile d’autant plus que la rumeur de l’amnistie ne dégonfle pas. L’expert financier pourra toujours compter sur l’expérience de 26 ans d’opposition de son père, actuel secrétaire général du Pds. Même si sa tentative à la candidature à l’élection de 2019 a été freinée nette. Le 30 août, la Cour suprême pays a rejeté son pourvoi concernant sa radiation des listes électorales, compromettant ses chances de pouvoir se présenter à l’élection présidentielle de février 2019 et surtout de concrétiser sa « détermination intacte d’affronter Macky Sall dans des élections ».

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