Dette publique : La pyramide de Ponzi
Dette Publique-Dr Djiby Ndao, spécialiste en économie s’interroge sur le niveau de la dette publique
« Les chiffres erronés balancés par le gouvernement
nécessitent des preuves»
L’État se constitue en un agent dont la durée de vie est a priori infinie. De ce fait, on ne peut exclure que l’État puisse toujours emprunter pour rembourser sa dette (« dette ou jeu de Ponzi »). Tant que la dette de l’État ne dépasse pas le PIB, l’État reste toujours solvable et peut continuer à emprunter
Par Khadidiatou GUEYE Fall,
Cheffe du Desk Société
Le point de presse tenu le 26 septembre par le gouvernement et son Premier ministre s’est révélé comme un coup de marteau pour les Sénégalais. Le Premier ministre Ousmane Sonko et le ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération, Abdourahmane Sarr, ont apporté des éclaircissements sur la situation économique du pays à l’arrivée de l’actuelle équipe gouvernementale. Le ministre de l’Économie a fait part d’une sous-évaluation de la dette publique par l’ancien régime. Pour le docteur en économie Djiby Ndao, coordonnateur des cadres du Mouvement politique “Gox Yu Bess Anta”, les accusations doivent être prouvées au plus vite.
L’image économique du pays a été falsifiée. Ce que l’opinion peut retenir de la sortie du gouvernement ce jeudi 26 septembre. D’après le ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération, Abdourahmane Sarr, “La dette de l’État central, hors secteurs parapublics, est de 15.664 milliards de FCFA, soit 83,7% du PIB, alors qu’elle avait été annoncée à 13.272 milliards de FCFA, soit 73,6% du PIB. Cela représente un supplément de dettes de près de 1.892 milliards de FCFA, soit 10% du PIB de plus ». En d’autres termes, de 2019-2023, la dette publique notifiée est moins que la dette réelle avec un surplus de 1.892 milliards de FCFA.
Le docteur en Économie Djiby Ndao revient sur le budget de l’État avant d’aborder la question de l’endettement.
“Le budget de l’Etat regroupe l’ensemble des recettes et des dépenses d’une nation. Nous avons deux recettes (ordinaires et extraordinaires) et deux dépenses (fonctionnement et investissement). Les recettes ordinaires regorgent les impôts (directs et indirects), les droits d’enregistrements et de timbres, les recettes tirées du domaine foncier, maritime et aérien“, explique M. Ndao.
Il fait savoir que dans les pays en développement comme le Sénégal, les recettes ordinaires sont d’habitude utilisées pour les dépenses de fonctionnement puisque étant insuffisantes pour les investissements publics ; par contre, les recettes extraordinaires regroupent exclusivement les endettements de l’Etat et sont d’habitude destinées aux dépenses d’investissement. Cela n’empêche pas qu’elles peuvent financer aussi le fonctionnement. Ainsi, le coordonnateur de Gox Yu Bess Anta signale cependant que l’État se constitue en un agent dont la durée de vie est a priori infinie. De ce fait, on ne peut exclure que l’État puisse toujours emprunter pour rembourser sa dette (« dette ou jeu de Ponzi »).
Le principe d’une pyramide de Ponzi est simple : payer aux premiers investisseurs des taux d’intérêts attractifs en utilisant l’argent des suivants–Wikipedia.
Il déduit de ses propos : “Nous verrons que la possibilité d’une telle politique dépend crucialement des autres instruments à la disposition de l’État : tant que la dette de l’Etat ne dépasse pas le PIB, l’Etat reste toujours solvable et peut continuer à emprunter. D’un point de vue pragmatique, l’ignorance des taux d’intérêt futurs, des dépenses publiques et des recettes à venir pousse à l’adoption de ratios budgétaires contraignants afin d’assurer la solvabilité de l’État. Dans la mesure où l’Etat dépend en grande partie de l’endettement pour suivre, les institutions financières comme le FMI, la Banque Mondiale… se basent sur les indicateurs économiques pour évaluer et financer.” Le professeur à la faculté des Sciences économiques et de gestion à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar déclare que les institutions financières comme le Fonds monétaire international et la Banque mondiale utilisent toutes les expertises en leur possession pour vérifier l’utilisation de la dette passée avant d’accorder un autre financement ; elles misent beaucoup sur un fonctionnement autonome dans leur démarche d’accord de financement.
La question à se poser pour Dr Djiby Ndao est celle de savoir si le pays était soumis au complot des institutions et de l’Etat sortant. A défaut, comment les informations véhiculées par le Premier ministre et le ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération peuvent être justifiées ?
Propos recueillis par Khadidiatou GUEYE Fall