Dérives politiques : Sans lumière intérieure
Dérives politiques
Lampions éteints
L’État du Sénégal manque de lampions. La conscience citoyenne se constitue en partie civile pour faire face à la donne
Par Daouda DIOUSSÉ,
consultant, analyste politique, également expert des questions migratoires.
L’État et le peuple sénégalais ont vécu les moments les plus sombres de leur histoire politique, après les évènements de juillet 1960 relatifs au Parti africain de l’Indépendance (PAI) et les soulèvements populaires de mai 1968. Depuis, le temps était bien aménagé pour s’adapter aux nouvelles réalités de l’heure. Mais suite à des dérives politiques et des mécanismes empiriques qui ont émaillé les incidents de mars 2021 puis ceux de juin et de juillet 2023, les Sénégalais restent plus que jamais éveillés et ont pris toutes leurs dispositions pour faire face à cette nouvelle donne.
Evidemment, l’État du Sénégal a une vieille tradition politique, elle date de bien avant notre indépendance. Cela est dû en partie à sa position stratégique dans l’Afrique occidentale française (AOF) et à la valeur de son capital humain qui lui ont valu d’éminents succès au plan international. En plus, le Sénégal jouit d’une bonne stabilité politique dans le monde.
De ce fait, près de 60 ans après, on n’aurait imaginé vivre d’intenses moments chargés d’incivilités et de violences dans les attitudes et les comportements des acteurs politiques. Du pouvoir comme de l’opposition, l’obsession de diriger la cinquième République les amène à bafouer les règles fondamentales de la démocratie et de s’affronter entre factions rivales. Des actes de politique politicienne qui consacrent l’essentiel de leurs stratégies à des invectives et des futilités aux conséquences désastreuses sur la grande masse.
Au rythme où les violences multiformes s’érigent en mode d’action dans l’espace public pour régler des contentieux politiques, d’énormes dégâts s’abattent sur de paisibles citoyens sans que l’État ne puisse éclairer nos lampions. La sûreté nationale, d’habitude alerte et efficace dans ses interventions, n’a pas pointé ses jumelles pour pouvoir aménager un cercle de feu redoutable aux fauteurs de troubles.
En somme, l’État n’a pas été prompt à faire preuve d’efficacité pour assurer et garantir la sécurité de cette population désœuvrée et de leurs biens.
Le jeu politique devient tracassant et dangereux en traînant des lots de morts, essentiellement des jeunes, une atrocité difficilement partagée par les autorités de l’État.
La politique est un jeu de ruses, sa pratique fait appel à un certain nombre d’astuces souples, intelligentes et captivantes pour servir et gagner le cœur des grands électeurs.
En réalité, la contingence politique exige une conjugaison d’efforts ainsi que la capacité de se prémunir de fortes stratégies tendant à absorber les préoccupations des flux de besoins de toutes sortes issus de la mondialisation (de travail, d’échanges, d’assistance, de services, de circulation, de capitaux, de marchandises, etc…)
La population, confrontée à des actes de violences de tout azimut, malmenée, laissée à elle-même et face à la montée du coût de la vie (prix élevé des produits de première nécessité, la cherté des soins de santé, inaccessibilité des structures de financement chez les jeunes, également manque de formation et chômage endémique), se démène pour sortir de l’ornière.
Au regard de tous ces manquements aux relents chaotiques, la plupart des Sénégalais savamment roués dans « la débrouillardise » s’emploie à protéger leurs biens.
À ce titre, le sursaut de l’éveil citoyen s’est constitué pour sa propre défense.
Dans ce sillage, il est d’une nécessité de comprendre que les États sont les références des citoyens du monde : dans leur statut de collaboration d’État souverain et indépendant, ils sont les seules entités qui s’imposent sur la scène mondiale et le prouvent dans les guerres qu’ils mènent, dans la diplomatie qu’ils conduisent, dans les organisations internationales qu’ils contrôlent et même dans la production et le commerce qu’ils influencent.
Au demeurant, toute la société civile devait se constituer en corps défendant les causes des citoyens et de la République. Une forte société civile peut desserrer l’étau d’une population sous l’emprise d’une angoisse aiguë.
En définitive, les barbaries grossières et les pertes considérables en vies humaines qui résultent de ces évènements regrettables de mars 2021 et de juin et juillet 2023 ne sauraient être cautionnés par le grand public.
C’est le lieu indiqué de prendre de la hauteur et de se démarquer des dérives politiciennes aux mécanismes empiriques.
Le public est censé tenir entre ses mains la clef du progrès et de prétendre à une stratégie intelligente, de cultiver la bonne gouvernance et l’efficacité afin de relever le bien-être de la population.
Devant l’éveil de conscience qui se constitue en partie civile, l’État doit être obstinément en mesure de veiller convenablement à la sécurité des personnes et des biens avant que cela ne dégénère.