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Certainement plus de guerre: Autrement le combat continue Entretien dirigé par Chérifa Sadany SOW

En colère parce que traités de lutteurs. Et si les jeunes le prenaient du bon côté ?  Le secteur de l’emploi est un championnat lequel  ne peut gagner que celui qui lutte à devenir un leader, un innovateur, un compétent et un responsable dans son secteur d’activités. L’obligation de répondre de ses actions, ici, incombe à la jeunesse, à la quête d’emploi.  Désormais, le vrai grand combat des jeunes doit se jouer dans la recherche de connaissances, c’est la clé du succès. Pour mieux comprendre, lisez Cheikh Moubarack Wade, manager général du groupe « Trust Coach », formateur en marketing entrepreneuriat, et Amadou Wagne chercheur en Sciences politiques, auteur écrivain.

Comment peut-on faire pour initier les jeunes à la culture d’entreprise ?

Cheikh Moubarack Wade : L’entreprise quels que soient son secteur et nature, est un lieu d’affirmation d’une jeunesse dépositaire du développement durable. Cette jeunesse qui représente plus de 52% de la population doit être consciente de ses potentialités à travers un encadrement civique pour éveiller l’engagement citoyen et par l’amélioration de leur cadre de formation selon le niveau et leur orientation dans les sciences, y compris religieuses. Ainsi, les initier à la culture d’entreprise qui repose sur des valeurs, serait plus facile.

Quelle doit être la responsabilité des jeunes face aux réponses en termes de formations, d’emplois, financement de projets ?

Cheikh Moubarack Wade : Pour situer la responsabilité des jeunes face aux réponses de développement, il me plairait de citer Mawlana Cheikh Ibrahima Niasse qui affirmait que ” L’avenir de toute Nation repose certes sur sa jeunesse mais pas sur n’importe quelle jeunesse mais sur les jeunes dotés de caractères nobles et d’ambitions élevées “.  Il revient alors aux jeunes du Sénégal de jouer un rôle entier dans l’acquisition de connaissances d’abord et la quête de leurs propres opportunités tant sur le plan de l’emploi salarial et l’auto-emploi. Qu’ils ne soient pas en position de défenseur en attendant l’État pour les opportunités. A la jeunesse de stimuler les opportunités !

Sur quelle base doit-il, l’Etat, s’appuyer pour créer de l’emploi ? Si on sait que la majorité des jeunes ont quitté depuis l’école.

Cheikh Moubarack Wade : Quitter l’école trop tôt ou ne l’ayant jamais intégrée ne peut en aucun cas constituer un frein pour notre jeunesse car en chacun de nous dort une connaissance. En conséquence, l’État , dans ses politiques de financement, doit mettre en priorité la compréhension de la psychologie de notre jeunesse, ses orientations pour transformer la jeunesse en champions du développement. La politique de formation technique et professionnelle doit permettre de former des jeunes rapidement opérationnels dans des secteurs demandeurs d’emplois, surtout sur les nouveaux métiers à l’heure où le Sénégal connait des transformations dans le secteur du transport (TER- BRT), du pétrole et gaz. Chacun de ces secteurs cités peut être une opportunité pour notre jeunesse qui devrait y jouer un rôle central dans le recrutement et implication des PME dans le cadre de la promotion de l’entrepreneuriat.

Comment interprétez-vous les mesures prises par le président Macky Sall dans le domaine de l’emploi ?  Croyez-vous que cela puisque se faire aussitôt ?

Cheikh Moubarack Wade : S’il y a un secteur où je reste convaincu que l’Etat du Sénégal est en train de déployer des efforts considérables, c’est bien le secteur de l’entrepreneuriat qui est la solution adéquate à la réduction du chômage, chaque entreprise créée est pourvoyeuse d’emplois à formaliser surtout. Sans oublier de miser sur le secteur informel qui représente plus de 97 % de notre tissu économique. Cette politique d’emploi ne doit pas être précipitée mais plutôt adaptée aux contextes et anticipation, la pandémie du Coronavirus étant l’exemple parfait des perturbations.

L’entrepreneuriat au Sénégal est-il bien émergent ?

Cheikh Moubarack Wade : L’entrepreneuriat au Sénégal a ses beaux jours au Sénégal car, en plus des ressources naturelles découvertes, le Sénégal est un gisement d’opportunités d’affaires si nous convoquons la citation de Winston Churchill qui affirmait “qu’un optimiste voit des opportunités dans chaque difficulté”. Alors, si nous venons à diagnostiquer les difficultés dans chaque secteur (santé, éducation…), nous nous rendrons compte des innombrables solutions que chaque jeune pourrait trouver surtout avec les avancées technologiques et les possibilités de transformation digitale de tous les secteurs.

Cependant, j’invite la jeunesse sénégalaise à suivre les pas tracés par nos devanciers et références imbus de valeurs, de droiture ; je l’invite à croire en ses propres capacités et de viser l’excellence qui ne peut être de mise que dans la quête des connaissances modernes, l’endurance, la résilience face aux difficultés à transformer en notre faveur. Enfin, de croire fermement que nous sommes le véritable changement.

Et vous M. Wagne, Comment analysez-vous le combat mené par les jeunes ces derniers jours ?

Amadou Wagne : Si c’est pour la démocratie, l’Etat de droit et la bonne gouvernance, je dirai que c’est un combat noble et légitime. Même le président Macky Sall devrait être sur le terrain car ledit combat constitue l’axe 3 du Plan Sénégal émergent (PSE). Toutefois, l’analyser dans un paradigme aussi simpliste que simplificateur, serait un bémol. Le peuple souffre de plusieurs épiphyties, bien avant l’apparition de la Covid-19. Cette dernière n’est que la goutte de trop qui a attisé le feu de la colère. Les jeunes sont colériques parce que désespérés. Colériques parce qu’à bien des égards déçus. Sociologiquement, tous ces facteurs rentrent en jeu pour constituer un cocktail de colères : chaque jeune, son mobile. Chaque jeune, son combat. Y en a même qui avaient des problèmes crypto-personnels, ils se sont engouffrés sur cette brèche pour défier l’autorité. Car « n’avoir rien à faire, c’est s’exposer aux tentations ». Tout Etat doit s’évertuer à occuper son peuple en mettant sur pied une bonne politique d’emploi.

J’entends dire que c’est la Covid-19 qui en est l’élément déclencheur, je répondrai par le négatif : la pandémie en est un supplément et non l’origine. Les jeunes sont en quête de bien-être, de mieux-être, le président de la République le sait et a fait des promesses en ce sens. Croisons les doigts et attendons, voilà mon invite.

Comment les jeunes doivent-ils désormais procéder pour demeurer la première priorité de nos dirigeants, futurs comme actuels ?

Amadou Wagne : En tant que jeunes, nous devons inlassablement nous former. Car l’emploi dépend de l’employabilité. Comment insère-t-on un jeune sans formation ? Où l’insérer ? Voilà ce qui fait la pertinence du professeur Cheikh Anta Diop : le primat de la formation sur tout ! La formation, l’apprentissage et la recherche doivent s’ériger en train-train, pour un Sénégal des possibilités. Certes, les jeunes doivent demeurer la priorité mais ils doivent être prêts à être employés. Ne nous laissons pas berner par la facilité et l’utopie. Nous trouverons inconsciemment une pirouette pour nos gouvernants si nous restons sans métier, sans qualification, sans spécialité, sans connaissance. Marchons de pied ferme dans la planète-pensée de John Fitzgerald Kennedy dans son discours inaugural de 1961. Il nous disait de ne pas demander ce que le pays peut faire pour nous, mais de demander ce que nous pouvons faire pour notre pays. C’est cela le grand défi de la jeunesse que nous sommes pour mériter le statut des priorités dans l’agenda étatique. Tous, autant que nous sommes, nous devons verser dans cette perspective car d’autres jeunes, dans d’autres contrées, l’ont réussi patriotiquement.

En quoi doivent-ils faire attention dans le combat qu’ils mènent corps et âme ?

Amadou Wagne : Le peuple doit, d’abord, éviter de se perdre en pleine mer. Sa boussole doit être soigneusement gardée car en dépit de la marée haute, sous les vents hostiles, il doit conduire à bon port le navire avec le drapeau tricolore qui flotte pourtant. Ensuite, il doit, à tout prix, obvier la récupération. Cela déçoit et dévoie ! Enfin, il doit cogiter sur la machination, elle est intrinsèquement hostile. D’elle découle l’instrumentalisation qui peut pousser les jusqu’au-boutistes à l’écroulement de la barque des acquis de notre très cher pays. Ce qu’on ne souhaite guère !

Après la pluie vient le beau temps. À nous, jeunesse sénégalaise « déconfinée », d’agir dans le sens d’arrêter la pluie. Je parle de la pluie de pierres, de gaz lacrymogènes, de balles, de victimes. Je parle de la pluie inouïe car sachant en mon for intérieur qu’on peut l’arrêter. Comment ? En s’inscrivant à faux contre les propos de Jules Payot qui opine qu’« une foule n’est accessible qu’à des émotions, elle est incapable d’une attitude d’esprit objective ». Bien qu’il y ait des gestes abjects dans les deux camps, le peuple sénégalais doit user de sa maturité “internationalement reconnue” pour mettre le holà sur cette crise…mortelle.

L’histoire nous a enseigné que la jeunesse sénégalaise est capable de jouer, plus que jamais, la carte de la retenue, de la responsabilité et du sens du devoir quand elle veut. On ne perd pas de vue que le Sénégal est en quête de sens d’une “theoros” susceptible de le sauver des ennemis du développement. Cette quête « impensée » a priori pousse la population à osciller tantôt vers la couleur verte, tantôt vers la couleur rouge. Le pouvoir théorique et salvateur doit provenir du peuple car il est souverain et son destin doit être tracé à travers ses propres desseins. C’est cela le grand projet d’avenir. Le contraire, sans doute contraire au contrat, à éviter.

Le Devoir