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Awa Mané, 17 ans, un violon d’encre Ecrivaine, elle assure la relève

Ecrivaine à 17 ans, Awa Mané assure la relève

Son talent découle de son encre !

« Aminata, tu es allée dans un bar avec tes amies, tu as montré ta carte d’identité pour y accéder. Vous avez bu de l’alcool, vous avez fumé et au moment de partir, vous avez volé cinq cent mille francs. C’est grâce à ta carte que tu as été identifiée. Aminata… Non… J’ai dû négocier pour que tu n’ailles pas en prison.
― Qu’est-ce-que tu dis papa ? Un bar ? Moi ? Mais je n’ai jamais fumé, ni bu de l’alcool, je n’ai jamais franchi le seuil d’un bar et…
Elle cherche dans sa poche, son sac… Elle s’est rendu compte qu’elle a perdu sa carte d’identité.» (…)Ceci est un extrait du livre «Le Mépris» paru en 2017 en France. En 47 pages, l’auteure réussit à tenir en haleine les lecteurs. Dans cet entretien, elle feuillette les grandes lignes de son œuvre.

Entretien dirigé par

Chérifa Sadany Ibou-Daba SOW,

Chef du Desk Culture

Awa Mané, sénégalaise de 22 ans, vous êtes une passionnée de la littérature et vous souhaitez faire de votre passion votre métier. Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?

(Rire)…Ce sera avec un immense plaisir !
Alors concernant mon parcours scolaire, j’ai fait le préscolaire (petite, moyenne et grande section) au jardin d’enfants Saint-Pierre des Baobabs. Ensuite, j’ai fait le primaire et le secondaire, jusqu’au 3e car il n’y avait pas de second cycle au Collège Sainte-Bernadette. Puis j’ai fait le second cycle au complexe Saint-Michel où j’ai eu mon baccalauréat en série littéraire. Puis, après mon baccalauréat, je n’assumais pas le fait de vouloir faire de ma passion mon métier car je craignais de décevoir mon père. Ce qui m’a poussée à suivre une série qui ne m’intéresse pas du tout, la comptabilité. Je l’ai suivie pendant 2 ans, c’était très difficile mais j’ai supporté. Cela l’était encore plus quand j’ai dû affronter le décès de mon petit-frère. Après la goutte de trop arriva, la Covid-19. Du coup j’ai mis une croix sur cette filière et j’ai discuté avec mon papa. Heureusement, il m’a compris comme il le fait toujours d’ailleurs et il m’a soutenue dans mon souhait de travailler comme scénariste et de continuer à publier mes livres. Finalement, j’ai participé à l’écriture de la deuxième saison de la série fiction – dessin animé, Junior Idées en or, qui passe sur la chaîne Gulli Africa sur le bouquet canal +. Présentement, je suis une formation d’écriture scénaristique à l’établissement Kourtrajmé de Dakar.

Votre premier livre Le Mépris, édité et publié par la maison d’édition Saint-Honoré de Paris, a eu un grand succès. Pour reprendre le terme scénaristique, pitchez-nous votre histoire : Le Mépris. De quoi ça parle ?

Alors, le livre Mépris nous parle d’une jeune fille, Aminata Niane, studieuse, cultivée, très belle et pleine de qualités, âgée de 17 ans. A la veille de ses 18 ans, elle assiste à sa délibération du bac avec ses deux meilleures amies Yacine et Nadia. Aminata, première du centre, suivie de ses copines, saute de joie et fait tomber son portefeuille dans lequel se trouvait toutes ses pièces d’identités. La jeune ne le remarque pas et continue de jubiler avec Yacine et Nadia. Mais Nancy, elle, n’a rien raté de cette scène et a discrètement récupéré les pièces d’Aminata du portefeuille. Elle n’hésite pas à les utiliser à sa guise.

En effet, Aminata est aimée de tous, hormis Nancy qui est d’une jalousie maladive contre Aminata. Nancy fait alors toutes les bêtises qui lui montent à la tête avec les pièces d’Aminata et nuit ainsi à la jeune fille au point d’y mêler la police. Les parents d’Aminata, croyant que c’est leur fille qui est à l’origine de tous ceux-ci, l’emmènent immédiatement au village sans la laisser parler. Dans ce village, tous les malheurs tombent sur Aminata : elle est violée, maltraitée dans sa propre maison. Elle s’est fait tabasser, insulter ; elle a esquivé à un deuxième viol. Etant enceinte, elle perd son bébé et fut envoyée en prison le jour même...

La vérité a tardé à se faire savoir, mais elle a quand même éclaté. Parmi les leçons de morale du livre, retenons celle-ci : il faut que les parents aient confiance en leurs enfants, qu’ils les écoutent, communiquent avec eux et soient toujours là avec eux quoi qu’il puisse se passer.

A 17 ans, vous évoquez un sujet sur un sentiment obscur et par lequel on ne tient pas en prix : Le Mépris. Comment vous est venue l’idée d’écrire ? Qu’est ce qui a déclenché votre inspiration ?

En fait, Mépris est la troisième histoire que j’ai écrite. Pour ce livre, j’avais vraiment voulu écrire sur une citadine qui sera envoyée au village de ses parents comme punition et qui y sera maltraitée par la suite mais il me manquait la cause. Un jour, au temps des élections, une publicité de sensibilisation passait très souvent à la télé. Cette publicité sensibilise les citoyens à déclarer la perte de leurs pièces d’identité ; autrement, d’autres personnes pourraient les utiliser à leur guise. C’était la pièce qui manquait au puzzle ! Alors, l’idée d’écrire m’est venue quand j’étais encore au collège en classe de 4e. Une de mes meilleures amies écrivait de petites histoires d’adolescents qu’elle nous faisait lire. Parmi ces histoires, il y en a une qui m’a marqué mais l’histoire était inachevée et elle n’avait pas l’intention de la terminer. Moi je voulais une fin à cette histoire. Donc, je me suis achetée un carnet, j’ai réécrit l’histoire avec ce que j’ai retenu de la lecture et je l’ai terminé. Cet essai m’a donné goût à l’écriture.

Quels sont les personnages forts de votre livre et pourquoi ?

Je citerai comme personnages forts : Aminata, Nancy, Moustapha, Abi, la vieille Anna. Ces personnages ont des objectifs différents mais qui les relient. Leurs conflits les rendent intéressants.

Souhaiteriez-vous partager avec nous l’anecdote de votre édition pour la première fois. ça devait sûrement être fantastique, non?

Fantastique ? c’est peu dire. Oh Seigneur ! rire…
En fait, l’édition de mon premier livre était juste magique. La maison d’édition était très organisée, chaque membre de cette équipe était dynamique, attachant et disponible. Ce qui m’a le plus marqué est que la responsable du service de l’édition et moi avions passé un moment incroyable avec l’édition de mon livre. Mépris était le dernier livre dont elle allait gérer l’édition avant sa retraite et pour moi c’était ma première fois. On sentait de l’excitation à chaque fois qu’on discutait ensemble et qu’elle me tenait au courant de l’évolution du livre.

Avez-vous eu des difficultés dans la procédure malgré l’envie et l’excitation ?

Des difficultés ? euh…non ! je n’en avais pas vraiment. Par contre, l’excitation avait pris le dessus et j’aurais pu éviter quelques petites erreurs.

Des réussites pour ce livre ?

AH oui machallah et Al Hamdoulilah, le livre a beaucoup été apprécié. Mépris m’a ouvert des portes dont celle du cinéma, les lecteurs ne sont pas déçus après l’avoir lu.

Puisque vous évoquez le cinéma, justement parlons en. Vous êtes élève à Kourtrajmé Dakar en tant qu’apprentie scénariste. Quelle est la plus-Value de ce métier dans votre carrière d’écrivaine ?

Elle est énorme, je dirais. Le cinéma m’apporte énormément de méthodes pour l’écriture. Même pour les livres, grâce au cinéma et à la scénarisation que j’apprends à l’école Kourtrajmé Dakar auprès des encadreurs disponibles et pédagogues, j’écris maintenant en image. Je garde mon style littéraire, ma créativité tout en restant logique et précise.

Awa Mané ou Maeva, avez-vous des projets ? Question évidente mais qui mérite une réponse n’est-ce pas ? répondez quand même.

( hahahaha)…Donc, évidemment, (rire…) j’ai des projets. In shaa Allah pour l’instant, je veux continuer à publier mes livres et à exceller dans le milieu du cinéma.