Attention : Qui s’y frotte, …
Serpents, scorpions, scolopendres,
abeilles et guêpes
Qui s’y frotte, ..
Le Sénégal connaît une forte mortalité par envenimation avec près de 8.000 morsures par an dont 300 mortelles de serpents, scorpions, scolopendres et autres abeilles et guêpes, soit environ un décès par jour ; le phénomène se vérifie surtout en milieu rural et dans les zones humides, principalement autour du pourtour du territoire national abondamment arrosé.
Un projet développé il y a une dizaine d’années ambitionne une lutte sérieuse contre un phénomène dont la solution est hors de portée des possibilités financières des populations touchées à cause de l’inaccessibilité et de la cherté du sérum antivenimeux oscillant entre 100.000 et 150.000 FCFA ; cette solution va s’inscrire dans une dynamique de partenariat entre la médecine moderne et la médecine traditionnelle en privilégiant l’utilisation des savoirs locaux des tradipraticiens et le savoir-faire des médecins.
Envenimations
8.000 morsures
de serpents, dont 300 mortelles par an
Au Sénégal, la mortalité par envenimation est importante avec près de 8.000 morsures des serpents par année dont 300 mortelles, soit environ un décès par jour. Ces morts surviennent en particulier en milieu rural et dans les zones humides, principalement autour du pourtour du territoire national abondamment arrosé. La documentation disponible avance le chiffre de 70 % de variétés de serpents recensées au Sénégal, sur les 81 espèces dénombrées en Afrique de l’Ouest.
Les remèdes sont encore timides : une étude menée il y a quelque temps dans les quatre sites du projet de gestion intégrée des écosystèmes du Sénégal montre par exemple que les tradipraticiens utilisent un savoir local à base de plantes, d’incantations magico-religieuses et de plantes médicinales pour lutter contre les morsures de serpents et les piqûres de scorpions. De telles pratiques semblent plus à la portée des populations rurales quand on sait qu’un sérum anti-venimeux coûte entre 100.000 et 150.000 FCFA, hors de la portée des victimes et de leurs parents.
Le Sénégal possède une biodiversité considérable avec 2.400 espèces de plantes dont 600 espèces de plantes médicinales utilisées dans la médecine traditionnelle par rapport aux 20.000 espèces recensées par l’Organisation mondiale de la Santé (Document de stratégie de conservation de la Biodiversité, 1998), 2.000 espèces d’insectes, 100 espèces de reptiles, 192 espèces de mammifères, 622 espèces d’oiseaux, 400 espèces de poissons.
Les ophidiens ont fait l’objet de plusieurs études, depuis les premiers travaux de Rochebune (1884) et Boulanger (1919) et la publication d’une liste des espèces de l’Afrique de l’Ouest. En effet, quelques 81 espèces (Trape et Mané, 2006) de serpents sont actuellement connues en Afrique occidentale.
Au Sénégal, des travaux relativement nombreux ont porté sur la faune ophidienne (Villers, 1953, 1954,1956, 1975, Dupuy, 1975, Chippaux, 2006, Trape et Mané, 2006). Ainsi, sur l’effectif total des espèces dénombrées en Afrique de l’Ouest, environ 70 % sont présentes au Sénégal et sont réparties entre six et sept familles : les Typhlopidés et les Leptophlopidés, les Boïdés, les Colubridés (très représentés au Sénégal), les Atractaspididés, les Elapidés et les Vipéridés.
Ces serpents se rencontrent un peu partout, tandis que d’autres sont spécifiques à certains biotopes comme par exemple le Ferlo et les zones arides du Sénégal Oriental ; parmi ceux-ci, nous pouvons citer :
· Bitis arietans (la vipère heurtante ou Puff adder),
· Dendroaspis polylepis (mamba noir, serpent des savanes ou Black mamba),
· Dendroaspis viridis (mamba vert ou Western green mamba),
· Echis leucogaster (Echidé à ventre blanc ou White-bellied carpet viper)
· Naja katiensis (cobra cracheur ou West African brown spitting cobra),
· Naja melanoleuca (cobra noir ou serpent à capuchon noir et blanc ou Forest cobra)
· Naja nigricollis (cobra cracheur noir ou Black-necked spitting),
· Naja senegalensis (cobra noir ou Senegalese cobra) ; malheureusement, ils ne sont pas pris en compte dans le code de la chasse et de la protection de la faune du Sénégal.
Et pourtant, dans le cadre d’un partenariat public-privé, leur venin collecté et exploité dans le cadre d’une collaboration entre les deux médecines pourrait contribuer au développement endogène des terroirs.
La région naturelle de la Casamance et la Vallée du Fleuve Sénégal accueillent quant à elles une densité et une variété de serpents supérieures aux autres régions en raison de leur écosystème humide.
D’autres espèces à morsure ou à piqûre venimeuse comme les Scorpions, les Scolopendres, les abeilles, les guêpes sont abondantes dans la plupart des régions du pays et quelques-unes parmi ces espèces ont un venin contenant une toxine utilisée pour guérir la prostate.
Le Sénégal, à travers son Document de Stratégie de la Réduction de la Pauvreté (DSRP), a identifié des axes stratégiques (la création de richesse, la promotion de services sociaux de base et la protection de groupes vulnérables, etc.) qui sont dépendants de l’état de l’environnement et des services des écosystèmes qui sont fournis.
En se fondant également sur les initiatives d’alliances, le projet “Méduse” de lutte contre les envenimations a été conçu pour appuyer les efforts du gouvernement dans la voie de l’atteinte des OMD, en particulier, l’OMD 1, l’OMD 6 et l’OMD 7.
Le projet en place depuis dix ans aujourd’hui s’inscrit dans une dynamique de créer une synergie entre les tradipraticiens et les médecins des districts en utilisant les savoirs locaux des tradipraticiens et la technique des médecins afin de capturer les serpents, de recueillir le venin, ensuite fabriquer des sérum en collaboration avec des firmes occidentales. Le Sénégal pourrait devenir leader dans cette nouvelle approche.
Les retombées seraient équitablement partagées et seront au profit des populations par l’intermédiaire des tradipraticiens.
Colonel (ER) Papa Momar FAYE
Conservateur des Parcs Nationaux, Wildlife Specialist,
Expert plantes médicinales. Master Sciences de Gestion,
ex-coordonnateur du Programme national de Semences forestières.
Tél: +221 77 633 86 61 BP: 1831 Dakar Sénégal
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Pour en savoir plus :
https://lepetitjournal.com/dakar/communaute/fallou-gueye-createur-du-reptilarium-de-hann-dakar-266383
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