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1924-2024 : le Surréalisme a cent ans…

1924-2024 : le Surréalisme a cent ans…

Ode à André Breton

Les pères fondateurs : de gauche à droite : Tzara, Eluard, Breton, Arp, Dali, Tanguy, Ernst, Crevel, Man Ray.

Une du 2 août 2024

En ce temps-là, je marchais dans la Casbah à Alger, la Casbah qui descend vers la mer, la mer Méditerranée.
La Casbah que le Corbusier a aimée pour son architecture et ses maisons étagées qui permettent de ne jamais “masquer la mer’’…
Breton, tu fais partie des signataires du Manifeste des 121, publié à Paris le 6 septembre 1960, pour dénoncer les exactions de l’armée française en Algérie.
Le “lien invisible’’ du “monde invisible’’ que tu as décrit du temps où tu marchais aussi avec tes amis dans Paris, sur le Boulevard du Montparnasse…
C’était l’époque de “Arcane 17’’ et des “Grands transparents’’..
Le “monde invisible’’ que nous côtoyons sans le savoir, dans toutes les villes du monde et certainement du “continent disparu’’ côté “Outre-mer’’, dans l’Océan indien où vivait ton ami Malcom de Chazal, celui-là même qui écrivait et dessinait comme les surréalistes, je veux parler de toutes celles et tous ceux qui avaient fait “acte de surréalisme’’ un jour de l’année 1924…
En empruntant la fameuse “Moutonnière’’ qui permet d’atteindre la ville d’Alger par la route, le spectacle incandescent de la ville d’Alger, Alger la blanche, construite en amphithéâtre et qui descend vers la mer, à la fin de l’année 1976, des “passages entiers’’ des “entretiens de André Breton et d’André Parinaud’’ me revenaient en tête…
Breton, tu l’as écrit avant tout le monde : “La beauté sera convulsive ou ne sera pas’’…
Alger, Alger la blanche est une ville “magique circonstancielle’’…
Karl Marx que tu connais avec tes amis surréalistes est venu à Alger regarder la mer et le soleil…
Il est venu se reposer sur les conseils avisés de son médecin…
Il est arrivé à Alger le 20 février 1882…
Tu es né le 19 février 1896 à Tinchebray, en France…
Le temps et l’espace ont été créés par les hommes, “tout coïncide’’ ou presque à un jour près…
Karl Marx a séjourné à l’hôtel de l’Orient…
L’hôtel Aurassi n’existait pas encore sous sa forme connue et avec sa vue imprenable sur la magnifique baie d’Alger…
Il faut apprendre à regarder la mer depuis le ciel…
A Alger la blanche, il faut monter et descendre et garder les yeux fixés sur la mer aux couleurs du ciel…
Ils sont nombreux à avoir fait le “voyage d’Alger’’…
Albert Camus est un “fils d’Alger’’…
Je vivais un peu plus loin sur la côte, à Boumerdès, ex-Rocher noir, la ville qui a accueilli en 1962, après la signature des “Accords d’Evian’’, le siège du GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne).
J’ai vécu là-bas, avec mes amis et frères étudiants sénégalais et africains, et traversé les “espaces communs’’ où le passé touche le présent quand le présent touche l’avenir ,”l’à-venir’’…
C’est là que mon cothurne, étudiant sénégalais à Boumerdès comme moi, Malick Ndiaye, a mis entre mes mains “Le surréalisme’’C’était en 1976 et il rentrait de vacances à Paris, l’autre citadelle de la lumière… Je n’ai plus quitté, depuis ce jour-là, la “terre surréaliste’’ et tous ses habitants à travers le monde…
Combien d’habitants serons-nous à la date du centième anniversaire, le 15 octobre 2024 ?
Combien de milliers ?
Et de toutes les couleurs…
Tous les règnes seront confondus, fusion totale : règne minéral, règne végétal, règne animal, interrègne…
Le surréalisme a triomphé…
Le surréalisme a vaincu…
La victoire sans la guerre que tu détestais est totale…
Pincez tous vos koras, frappez les balafons…’’ a écrit le poète des bolongs du Sine, Léopold Sédar Senghor, le “frère fondamental’’ du “poète considérable’’, Aimé Césaire, dont tu as écrit la lumineuse préface de son ouvrage retentissant : ” Le cahier de retour au pays natal’’…
“Un grand poète noir’’, as-tu écrit…
Aimé Césaire, le “grand poète noir’’, a avoué sa dette envers le surréalisme et il a été, je crois, le seul à le faire explicitement ; les chercheurs confirmeront ou infirmeront comme ils savent si bien le faire…
Breton, je cherche encore le “point’’ que tu décris dans un de tes ouvrages majeurs, “Les vases communicants’’ : Tout porte à croire qu’il existe un certain point de l’esprit d’où la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, le passé et le futur, le communicable et l’incommunicable, le haut et le bas cessent d’être perçus contradictoirement’’

J’ai lu, comme toi, les “états multiples de l’être’’ du philosophe René Guénon et j’ai compris que je devais continuer à marcher dans Mumbaï côté mer…. A marcher dans Mumbaï (Bombay) et à regarder fixement “The Gate of India’’… C’est la “porte d’entrée’’… L’unique…
Je crois que le “point de l’esprit’’ que tu as décrit ne passe pas loin de la mer à Mumbaï…
A mon “retour’’ de Mumbaï – suis-je vraiment revenu ? – j’ai écrit “Les passerelles de la mer’’…
Je t’enverrai le texte et tu pourras le lire, face à la mer…
Breton, ma ville “natale’’ se nomme Dakar et nous ne sommes pas nombreux à Dakar à t’écrire à l’occasion des “Cent ans du Manifeste du Surréalisme’’
J’ai alerté quelques amis qui te connaissent et ils savent que le jour approche, le 15 octobre 2024…
Si je suis à Paris, le 15 octobre 2024, je me rendrais au cimetière des Batignolles, à Paris dès l’ouverture des “portes du temps’’ et j’irai relire cette épitaphe inscrite sur ta « pierre tombale’’ qui continue toujours à m’interpeller : “Je cherche l’or du temps’’
Tu comprends pourquoi j’ai écrit “Les portes du temps’’ car les cimetières n’existent que de nom…
Seuls des noms et des prénoms ont été gravés dans la pierre, souvent gravés dans le marbre : destination éternelle…
Le temps s’écoule, “j’écoute mon temps’’…
Breton, je t’écris assis sur “La dernière marche de mes souvenirs algériens’’ face à la mer…
La mer vue de haut, côté nuages de l’hivernage, les “nuages gris’’ de Dakar…
Les fameux “gris-gris’’…
J’aime écrire face à la mer même lorsque je dois imaginer celle-ci au cœur du Sahara…
Coïncidence heureuse : j’étais dans le désert algérien en 1976, quelques mois avant ma “rencontre avec Breton’’, l’auteur du Manifeste du Surréalisme (1924).
Lorsque tu “survoleras’’ le champ de pétrole de Gassi Touil, près de Hassi Messaoud, la nuit de préférence, tu seras entouré de lumière, la “lumière du gaz et du pétrole’’, celle des torches qui illuminent le désert du Sahara algérien.
Tu pourras apercevoir, posée à l’entrée de la base pétrolière de Gassi Touil où j’ai vécu, la “tête de puits GT2’’ ; son histoire est célèbre, c’est encore l’histoire de la lumière qui illumine le ciel…
Il n’y a jamais eu d’explosion mais une flamme touchait le ciel..
C’était en 1962 et j’étais à l’école primaire à Dakar…
Breton, le Sahara algérien et tu le sais, c’est aussi la grande et belle histoire des peintures rupestres du Tassili…
Les hommes qui passaient par-là ainsi que celles et ceux qui ont vécu dans ces grottes ont laissé chacun une trace et une seule…
Traces plurielles, traces agrégées, traces du ciel dans l’obscurité des grottes…
Breton, la France qui me lira, celle qui a appris “par cœur’’ le surréalisme, m’écrira après la célébration majeure des “Cent ans du Surréalisme’’ et elle te racontera, dans son style imagé, qu’un ancien étudiant à Alger (1974/1979) devenu “ingénieur en économie pétrolière’’, le 1er juillet 1979, a laissé sur la plage de Fann  quelques traces “surréalistes’’…
Si un jour, tu revenais à Dakar, je crois que tu es venu à Dakar secrètement, lors de l’exposition de Malcom Chazal au “Musée dynamique’’ en 1973, l’écrivain et le peintre du “continent disparu’’ qui a vécu au milieu de la mer à Maurice, dans l’océan indien, tu pourras “longer la mer’’ et tu pourras, surtout, retrouver les “traces surréalistes’’ qui t’attendent à la Pointe de Fann qui était déjà peuplée comme la Casbah d’Alger au néolithique…
La “jonction du néolithique’’ est faite…
Feu d’artifice…
Breton, je te fais la seule révélation africaine du nouveau siècle, le vingt-et-unième : le surréalisme est né au néolithique sur le chemin qui relie la Casbah d’Alger, Boumerdès (ex-Rocher noir), Gassi Touil, Dakar et Mumbaï…
Breton, tu connais la cellule qui nous constitue car tu as été étudiant en médecine comme ton ami Louis Aragon, le “Fou d’Elsa’’…
Je connais la cellule car j’ai été étudiant en biologie, à Lyon-Villeurbanne…
La cellule vit toujours…
Breton, je te salue de Palméo, sur la route de Saint-Louis du Sénégal…

Vovo Bombyx
19/9/2024