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La Ligne du Devoir

Raphaël Ndiaye parlait aux livres

Raphaël Ndiaye : philosophe devenu poète…

 

L’homme qui parlait

aux livres…

Raphaël Ndiaye n’est plus…
Le ‘’ royaume de la mer’’ a perdu un de ses fils illustres qui vivait sur terre…
Raphaël, directeur de la Fondation Léopold Sédar Senghor depuis 2013, connaissait bien le ‘’ royaume du Sine’’ où s’est déroulé, au milieu des lamantins et des palétuviers, la vie du poète des bolongs du Sine, le Président Léopold Sédar Senghor.
Raphaël Ndiaye était philosophe de formation, diplômé de la Sorbonne ; il était également ethno-linguiste et il avait préparé aussi, un diplôme en bibliothéconomie.
Ses connaissances sur les cultures africaines, sur la culture sérère – sa terre natale- étaient étendues et presque sans bornes…
Mais sa ‘’fréquentation assidue’’ des poètes et en particulier celle du poète Léopold Sédar Senghor a fait de lui un ‘’immense poète’’…
Il a publié aux éditions ‘’Feu de Brousse’’, un recueil de poèmes intitulé ‘’ cadences et lagunes’’…
Les mots viennent du littoral…
Ses amis écriront ” leurs souvenirs communs’’ et ses amis sont nombreux…
La dernière fois que j’ai entendu la voix de notre ami Raphaël Ndiaye, c’était le 13 décembre 2022…
Mes échanges avec lui avaient achevé de me convaincre qu’il regagnerait bientôt son bureau à la Fondation Léopold Sédar Senghor.
La triste nouvelle que j’ai apprise cet après-midi (5 janvier 2023) me laisse sans voix…
Raphaël était le président d’honneur de l’Association « les Amis du baobab » que nous avons créée le 22 mars 2014, à la salle Soweto de l’Université Cheikh Anta Diop.
Je l’avais invité à nous rejoindre et à écrire « l’hymne du baobab »
Il avait accepté avec un immense plaisir.
Il a écrit à la fois le texte et la musique de l’hymne du baobab dont il est l’auteur unique.
Nous porterons dans nos cœurs le deuil de notre ami Raphaël.
Tous les baobabs du Sénégal et des quatre continents (j’ai exclu à dessein l’Europe) porteront également le deuil de l’homme qui les a chantés, pour la première fois au Sénégal et au monde…
Le bel « hymne du baobab » a été officiellement présenté au public, pour la première fois, le 26 novembre 2014.
C’était au Monument de la Renaissance Africaine ( MRA)
Curieusement et cette coïncidence est heureuse, son ami et « frère en littérature », Racine Senghor, était, à cette époque déjà lointaine, Administrateur général du Monument de la Renaissance Africaine(MRA)
Ils ont animé, tous les deux, une belle émission littéraire sur les ondes de « radio Sénégal » vers la fin des années 80
L’émission radiophonique avait été baptisée certainement par les « frères en littérature », « Espace livres »
Ils nous ont fait aimer la belle littérature.
Nous avions proposé, ce jour-là du mois de novembre 2014, à l’ancien directeur de l’Orchestre national du Sénégal, M. Mamadou Seyba Traoré, qui a également étudié la philosophie à l’Université de Dakar, de prendre en charge littéralement la cérémonie de présentation de l’hymne du baobab, cérémonie qui s’est déroulée au théâtre de verdure Bakary Traoré sur l’esplanade.
L’Orchestre National était présent sur scène.
La nièce ou fille de la cantatrice sérère Yandé Codou Sène était venue nous rappeler que le “pays sérère’’ est aussi peuplé de ” grands baobabs’’ : elle a chanté pour les baobabs et pour nous, au pied du Monument de la Renaissance Africaine (MRA).
Curieusement, M. Seyba Traoré a animé il y a quelques années, à la télévision sénégalaise, une belle émission littéraire qui portait comme nom « Clefs littéraires » avec Éloi Coly, l’actuel Conservateur de la Maison des Esclaves à Gorée
Les « signes du ciel », pour tous ces hommes de lettres talentueux, étaient nombreux ce 26 novembre 2014…
Il pleuvait des ” notes de musique’’ sur scène…
Raphaël m’avait proposé, et je l’avais accepté joyeusement, de faire interpréter l’hymne du baobab par une forte chorale composée de cent vingt (120) choristes et dirigée par son ami et chef de choeur, Jean Benoît Bakhoum, qui dirige la chorale de l’église Ste Thérèse de l’Enfant Jésus à Grand Dakar.
Ce fut un succès retentissant et ce succès nous le devons à notre ami Raphaël, président d’honneur du LAB (Les Amis du Baobab).
Nous avions ensemble d’autres grands projets pour notre association et notamment le beau projet de créer une chorégraphie qui porterait comme titre ” Le Sacre du baobab’’ et qui serait également présentée au public, en ” avant-première ’’ sur la scène du ” Théâtre des baobabs ’’ au pied du Monument de la Renaissance Africaine (MRA)
Le premier plan de cette chorégraphie était déjà écrit : les danseurs devaient entrer sur scène, l’un après l’autre, ” la tête en bas ’’, en se servant dans leurs déplacements uniquement de leurs mains posées à la verticale du sol…
En effet, le baobab est un ” arbre à l’envers ’’…
Sache Raphaël que cette chorégraphie ” le Sacre du baobab’’ sera écrite, jouée et interprétée pour toi, au Monument de la Renaissance Africaine, dans le ” pays sérère ’’, au milieu des bolongs et partout ailleurs au Sénégal, à Bobo Dioulasso, à Bandiagara, à Djenné, Tombouctou mais aussi à Saint-Louis du Sénégal et à Palméo…
Ta disparition soudaine constitue pour nous tous une surprise…
Curieusement, l’ouvrage dont Raphaël a dirigé la rédaction et qui est consacré aux textes du président Senghor sur la culture et l’éducation, cet ouvrage est paru, le 1er décembre 2014, quelques jours après la présentation de l’hymne du baobab…
Toutes les musiques ne se ressemblent mais Raphaël était également musicien, comme l’autre professeur, penseur et écrivain, son ami, Felwine Sarr.
Raphaël aimait jouer de la guitare en lisant des poèmes…
Le philosophe est devenu poète et musicien…
Il avait organisé en 2015, sous l’égide de la Fondation Léopold Sédar Senghor, une ” leçon inaugurale’’…
Les philosophes Souleymane Bachir Diagne, Hountoundji et l’écrivain Felwine Sarr étaient tous venus pour ” placer leurs mots sous nos yeux’’
La ” leçon inaugurale’’, à cause d’un concours de circonstances, s’était déroulée en deux temps, à l’UCAD II et au CICES.
Les philosophes ont parlé au CICES…
Nous les avons entendus…
Raphaël avait un goût particulier pour l’écriture mais il aimait déclamer les poèmes.
Je le rencontrais toujours très tôt dans son bureau de la Fondation Léopold Sédar Senghor, une Fondation qu’il aimait de toutes ses forces et qui va beaucoup lui manquer…
Il manquera également beaucoup à la Fondation, à sa famille, au ” pays sérère’’, au Sénégal, à l’Afrique, au monde et à ses amis.
Un soir, Raphaël, Racine Senghor et moi nous sommes allés ” regarder la lumière naissante’’ et cette lumière avait trois sources :

– Le Monument de la Renaissance Africaine (MRA)
– Le Phare des Mamelles
– Le Rond-Point des Mamelles

Ce ” dialogue des lumières ’’ restera un de mes plus beaux souvenirs.
Nous étions près de la mer…
Raphaël venait du ” royaume de la mer…’’
Pour lui avoir parlé le 13 décembre 2022, je sais qu’il avait pour la Fondation Léopold Senghor de nombreux projets.
Il m’a dédicacé dans son bureau de la Fondation qu’il aimait rejoindre tôt le matin, un bel ouvrage, écrit avec amour et passion, son dernier ouvrage, publié au mois de février 2020 : « lutteur de légende », un long poème de 588 vers, dont la préface a été rédigée par son ami, le Pr Amadou Ly.
Je peux dire, non sans tristesse, que « le lutteur Raphaël est entré dans la légende »…
Lumen Christi…

Vovo Bombyx