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Procès Sonko-Le peuple comme avocat

Procès Sonko

 

Le peuple comme avocat

Un discours corsé le 22 janvier  entre menaces et avertissements

Le méga meeting organisé à Keur Massar dimanche dernier 22 janvier par le leader de Pastef reste encore sur les Unes des journaux. Une forte mobilisation a été notée ce weekend. Le discours de l’homme du jour laisse certains perplexes. Chacun a sa manière de comprendre la nature du discours. Entre menace, appel à l’insurrection et avertissement, le discernement se fait difficilement.

 

Par Khadidiatou GUEYE Fall,

Cheffe du Desk Société

Depuis une semaine, le discours de Sonko face à une foule furieuse est décrypté dans les colonnes des quotidiens.

Son discours jugé très osé est une alternative pour se démarquer des autres prisonniers politiques : c’est du moins l’avis de Mbaye Babacar Guèye, un gérant d’une boutique de tissus à Pikine Tally Bou Mag.

« Nous sommes arrivés à un moment où le changement s’impose. Nous avons vu que l’actuel régime est un régime de dictateur. Le président cherche à éliminer tous ses potentiels adversaires dans l’arène politique. Ce qui est à l’origine de cette crainte, c’est que le président a peur d’être poursuivi. Il est presque sûr que si Ousmane Sonko est déclaré candidat légitime à l’élection présidentielle de 2024, lui et ses proches paieront la prison. C’est pourquoi il cherche coûte que coûte à éliminer un candidat de l’opposition », explique le partisan de Sonko.

Mbaye Babacar Guèye trouve insensé de continuer les poursuites : « A mon avis, tout est clair : le  peuple est témoin des documents sonores entre l’accusatrice du leader de Pastef et son guide religieux. Les partisans de Macky Sall sont convaincus que leur cible ne lâchera pas prise, raison pour laquelle ils l’obligent à un procès. Mais rien n’écarte le complot. Toutes les révélations concordent avec un projet d’élimination d’une menace politique. Le certificat médical montre qu’il n’y a pas de viol. Puisqu’il en est ainsi, nous restons sur la défensive en attendant les évènements. Nous écoutons notre leader pour le procès ».

Le gérant de la boutique de tissus a un espoir fou en la personne de Ousmane Sonko. Il fait savoir qu’il ne voit pas ce qui pourrait ressembler à une menace dans son discours. Au contraire, des proches du président ont plusieurs fois menacé leur leader sans suite ; « C’est Sonko lui-même qui constitue la menace contre Macky Sall à l élection présidentielle de 2024 ».

Dans ce même sillage, Abdou Guèye Sourang, un professeur d’Arabe à Touba, innocente son leader et parle d’avertissement pour ne pas subir la même chose que Karim Wade et Khalifa Sall : « Je pense que Sonko ne pouvait pas rester sans rien dire ; on dit que qui ne dit rien consent. S’il n’avait pas tenu un tel discours, je dirais qu’il est coupable. Il doit se blanchir parce qu’il est un espoir pour la jeunesse sénégalaise. Il a à choisir entre être prisonnier politique comme Mamadou Dia ou bien être le Ousmane Sonko qui ne se laissera pas faire. Karim Wade et Khalifa Sall ont vu leur avenir politique hypothéqué par un adversaire qui doute de la transparence de ces actions ». D’après Abdou Guèye Sourang, si Ousmane Sonko est sûr de son innocence comme il le prétend, il ne doit pas accepter d’être éliminé en tant adversaire politique.

« Nous savons tous de quoi est capable le régime en place. Ils sont capables de le mettre en prison pour ensuite l’éliminer physiquement et laisser croire que c’est un accident. Maintenant, si réellement Macky Sall est par hasard derrière tout ça, qu’il laisse Ousmane Sonko mener sa vie calmement pour la stabilité du pays ou assumer la responsabilité sur tout ce qui arrivera au Sénégal. Dans son  discours, Sonko n’a fait que dire au président Macky Sall ce qu’aucun détenu politique n’a osé lui dire », souligne le professeur d’Arabe.

Ce dernier nourrit l’espoir que les organisations des Droits de l’homme vont intervenir pour éviter que le pays vive encore des émeutes.

« Son discours fera reculer les comploteurs de son incarcération. Le forum civil a parlé, les organisations pour les droits de l’homme insistent pour éviter une guerre civile. Peut-être qu’ils vont dissuader Macky Sall d’arrêter d’entacher la carrière politique de Ousmane Sonko. Le peuple sénégalais a tranché le week-end dernier et la justice doit représenter le peuple », a constaté Abdou Sourang.

Notre interlocuteur soutient que « le leader de Pastef a voulu avertir le peuple sénégalais dans son discours pour que dans l’avenir ses partisans puissent le défendre. Certains parlent de menace envers le président de la République, alors qu’il a juste voulu tirer les choses au clair en prenant à témoin les Sénégalais », poursuit-il.

Contrairement à M. Sourang,  Pape Diop retient dans le comportement de Ousmane Sonko un manque de respect envers la Justice alors qu’il a toujours voulu qu’un procès se tienne. « Il a manqué de respect à la Justice et loi qu’il veut incarner demain ; nul n’est au-dessus de la loi et si vraiment il est sûr de lui-même et de ce qu’il avance, son rôle et devoir est d’aller répondre à cette justice pour que la lumière soit faite », conseille M. Diop.

Pour Pape Diop, un homme qui aspire à diriger ce pays, qui a toujours prôné la droiture et qui incarne l’homme parfait doit montrer le bon exemple. Monsieur explique : « Nous savons tous que l’indépendance de la justice est une réalité au Sénégal, et l’affaire Sweet beauté est une affaire privée qui concerne deux personnes, lui et Mademoiselle Adji Sarr qui a porté plainte contre lui, et, mieux, il reconnaît lui même qu’il était sur les lieux ce jour-là. Si le juge a pris une décision de les envoyer devant la chambre criminelle, je pense qu’il à suffisamment d’éléments nécessaires pour le faire, donc le mieux c’est qu’il aille répondre devant les juridictions de ce pays ; mais vouloir entraîner ce pays dans un chao est inadmissible et l’Etat veillera à ce que les Sénégalaises et Sénégalais puissent vaquer tranquillement à leurs occupations ».

D’après son entendement, Ousmane Qonko a dépassé les limites non seulement en menaçant le président Macky Sall, mais d’appeler ses militants à identifier la maison des responsables APR et de s’organiser partout dans chaque région, pour faire quoi, peut-être brûler le pays.

C’est un appel à l’insurrection et qui est condamnable par notre justice, selon Pape Diop.

Hormis le discours, la manière dont le peuple a montré son attachement au leader de Pastef mérite une étude approfondie. Sa montée fulgurante  est une énigme, sa source d’audace étonnante.