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La Ligne du Devoir

Perspectives-Les contradictions démocratiques

Nouvelle gestion démocratique

 

Le cas du Sénégal

 

La gestion démocratique telle que pratiquée

au vingtième siècle est entrée en contradiction avec

l’aspiration à plus de démocratie des peuples

 

La démocratie est souvent assimilée à un régime politique qui fait participer les citoyens aux décisions publiques et à la gestion de la cité.

Les valeurs de la démocratie renvoient à la Constitution, au principe de la primauté du droit, à la défense des droits et des libertés.

Selon l’indice de démocratie qui est composé de plusieurs critères (une soixantaine) parmi lesquels on peut citer : le processus électoral, le pluralisme, le fonctionnement du gouvernement, les libertés civiles, la culture politique, etc….

Le classement des grandes démocraties dans le monde fait apparaître en tête la Norvège, l’Islande, la Suède, la Nouvelle-Zélande et le Canada. Ni l’Angleterre ni les Etats-Unis ne figurent dans le peloton de tête…

En Afrique, le Cap-Vert est classé troisième après Maurice et le Botswana et avant la Tunisie (8ème) ; le Sénégal arrive en douzième position.

L’indice de démocratie n’est certainement pas le seul indice qui permette d’apprécier le fonctionnement d’une démocratie. Plusieurs autres indices existent ou pourraient être construits.

Le Cap-Vert s’est doté d’un régime parlementaire et son expérience devrait être étudiée. Il s’agit d’un petit pays de 4.033 km2 qui a accédé à la souveraineté internationale le 5 juillet 1975….

Le Sénégal fonctionne depuis la crise de 1962 avec un régime politique qualifié de présidentiel. Il arrive régulièrement que l’on parle pour le Sénégal de régime semi-présidentiel. Les experts du droit constitutionnel connaissent toutes les nuances juridiques qui séparent le régime présidentiel du régime semi-présidentiel.

Comme nous pouvons le constater, les régimes politiques diffèrent d’un pays à un autre mais les démocraties dites « avancées » ne sont pas celles que l’on croit… L’indice de démocratie nous fournit un classement qui nous conduit à nous interroger quant à la valeur des critères et au poids relatif de chaque critère.

Analysons un article de la Constitution du Sénégal : l’article 25-1.

Des amendements ont été introduits dans la Constitution du Sénégal en 2016, et ils ont été adoptés par voie référendaire le 20 mars 2016 ; l’article 25-1 de la Constitution du Sénégal dispose que les ressources naturelles appartiennent au peuple. Le changement de propriété introduit dans la Constitution confère au peuple sénégalais un pouvoir important.

A la fin de l’année 2023, le Sénégal deviendra un pays producteur de gaz naturel (exportateur de gaz naturel liquéfié) et de pétrole brut (exportateur de pétrole brut). Le fonctionnement de l’économie sénégalaise sera basé sur de nouvelles ressources qui vont générer des recettes dont la répartition sera placée sous le « contrôle du parlement »

Nous pouvons le constater ensemble : une donnée juridique nouvelle-les ressources naturelles appartiennent au peuple-conduira le gouvernement du Sénégal à associer étroitement les représentants du peuple sénégalais à la gestion des recettes tirées de l’exploitation des hydrocarbures.

Les juristes sénégalais devraient pouvoir développer une réflexion neuve par rapport à ce régime de propriété. D’autant que la Mauritanie dispose d’un régime de propriété différent puisque dans ce pays les ressources naturelles appartiennent à l’Etat.

Or donc la Mauritanie et le Sénégal ont décidé, et cela est une excellente décision, d’exploiter en commun les ressources de gaz naturel qui seront extraites du champ de Grand Tortue Aymehim (GTA). Deux pays voisins qui ont découvert un gisement important de gaz naturel à cheval sur leur frontière maritime verront les ressources naturelles allouées à chaque pays être gérées sous des régimes de propriété différents, encore une fois.

Le « contrôle parlementaire » instauré au Sénégal devra toutefois se doubler d’un renforcement de capacités des représentants du peuple sénégalais. L’expertise devra se construire.

Une autre solution possible serait de créer un groupe d’experts-la structure porterait un nom précis-qui serait placé sous l’autorité du parlement.

De toute évidence, l’Initiative pour la Transparence dans les Industries extractives (Itie) qui est un organe compétent en la matière ne pourrait jouer ce rôle car cette structure devrait conserver une certaine indépendance.

Nous pouvons le comprendre aujourd’hui mieux qu’hier : « Les habits neufs » de la démocratie (20 mars 2016) appellent une réflexion neuve sur le fonctionnement de la « démocratie économique » qui fait partie intégrante de la démocratie.

Un glissement progressif s’opère dans les Constitutions de plusieurs pays qui conduiront tôt ou tard à une mise en adéquation des formes politiques et des formes économiques, à tout le moins…

C’est là un premier exemple qui est cité et qui est extrait de la Constitution du Sénégal et du régime de propriété qui a été conféré aux ressources naturelles du pays.

La gestion démocratique telle que pratiquée au vingtième siècle est entrée en contradiction avec l’aspiration à plus de démocratie des peuples.

 

Vovo Bombyx

25/12/2022