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Trois figures marquantes de la période des luttes collectives pour les libertés fondamentales : Valdiodio Ndiaye, Abdoulaye Ly, Assane Seck El Hadji Ibrahima Ndao

El Hadji Ibrahima Ndao est un historien et homme politique : au sein du Parti socialiste, il a joué un grand rôle dans les années de braise au Sénégal ; il est également l’auteur du livre intitulé
« Sénégal, Histoire des conquêtes démocratiques ».
La présente étude est sa contribution à un ouvrage collectif dont elle est la principale épine dorsale : Les évolutions politiques de Valdiodio, d’Abdoulaye Ly et d’Assane Seck dans la période des luttes collectives pour les libertés fondamentales au Sénégal jusqu’à la crise de décembre 1962.

X-Me Valdiodio Ndiaye sauveur du Sénégal

La réaction sénégalaise vint aussitôt. A peine Modibo Keïta avait-il terminé son allocution que le colonel Amadou Fall s’en allait quérir Valdiodio Ndiaye, ministre de l’Intérieur du Sénégal. Après avoir constaté de visu, en passant devant les centres névralgiques de Dakar, la traduction concrète des mesures de sécurité ordonnées par Modibo Keïta, tous deux se rendirent à la Résidence de Médina  (résidence du Président du Conseil sénégalais, Mamadou Dia) d’où ils téléphonèrent à la plupart des dirigeants sénégalais pour les inviter à les rejoindre.
Mamadou Dia, en voyage à l’intérieur du pays, était absent. En revanche, le lieutenant-colonel Pierre, chef de la Gendarmerie sénégalaise venait d’arriver à ladite résidence.
La Gendarmerie relevant directement du Président du Gouvernement sénégalais, ce que voulait le lieutenant-colonel Pierre, c’était d’abord de savoir s’il devait répondre à une convocation qu’il avait reçue de Modibo Keïta, c’était ensuite rendre les autorités sénégalaises attentives à ce qu’il n’était pas exclu que le colonel Soumaré prît la décision d’aller à la Gendarmerie de Médina pour s’adresser directement aux troupes dans le cas où lui, lieutenant-colonel Pierre, refuserait d’exécuter les ordres d’une autorité auprès de laquelle la France ne l’avait pas placé.
Considérant que dans pareille éventualité, le fait pour Soumaré d’être un Sénégalais originaire de Saint-Louis et de bénéficier de surcroît du titre prestigieux de chef d’état-major pourrait impressionner les troupes et les déterminer à se mettre derrière lui, il fut décidé qu’un responsable sénégalais de haut rang se rendrait à la Gendarmerie de Médina pour indiquer aux gendarmes où se trouvait leur devoir.
Obèye Diop (ministre de l’Information du Sénégal) et Gabriel d’Arboussier furent alors dépêchés auprès de Senghor pour l’inviter à se rendre à la Résidence de Médina.
A son arrivée, le Président eut un aparté avec le ministre de l’Intérieur, Valdiodio Ndiaye. Celui-ci lui fit part de la suggestion du lieutenant-colonel Pierre, à savoir l’urgence pour un Sénégalais de haut rang de s’adresser aux troupes de la Gendarmerie.
Le président Senghor se récusa, estimant que du fait qu’il n’était pas membre de l’exécutif sénégalais (pas plus d’ailleurs que de l’exécutif fédéral), il ne pouvait pas légalement s’adresser à des troupes relevant du Gouvernement sénégalais.
Le ministre de l’Intérieur, Valdiodio Ndiaye, décida alors de parler lui-même aux troupes. A cette fin, il se rendit au camp de la Gendarmerie en compagnie du président Senghor, du lieutenant-colonel Pierre et des dirigeants et hauts fonctionnaires sénégalais qui se trouvaient à ce moment à la Résidence de Médina et parmi lesquels il y avait notamment, outre Obèye Diop et Gabriel d’Arboussier, André Guillabert (vice-président de l’Assemblée législative sénégalaise), Amadou Louis Guèye (Directeur de Cabinet du ministre de l’Intérieur), Jean Collin (Conseiller technique au Cabinet de Mamadou Dia) et Mamadou Moustapha Dramé (Chef de Cabinet du ministre de l’Intérieur).
Là, en wolof, Valdiodio Ndiaye  ministre de l’Intérieur s’adressa aux troupes. Il fit appel à leur sens patriotique et leur rappela l’obligation qui s’imposait à elles de n’obéir qu’aux seuls chefs sénégalais dont elles relevaient.
Quand il eut terminé, Senghor, estimant sans doute qu’il avait tort de se laisser inhiber par des considérations légalistes alors que Modibo Keïta en faisait fi, prit spontanément la parole et à son tour galvanisa  en wolof les forces de Gendarmerie.
Moins d’un quart d’heure après ces deux allocutions, le colonel Soumaré arrivait à la Gendarmerie alors que les dirigeants sénégalais s’y trouvaient à son insu. Il remit au lieutenant-colonel Pierre des ordres de réquisition signés de Modibo Keïta. Ces ordres devaient être exécutés « sans délai ». Il lui fut répondu par le ministre de l’Intérieur du Sénégal, Valdiodio Ndiaye, qu’il était hors de question pour la Gendarmerie sénégalaise, qui dépendait du Gouvernement sénégalais, et plus précisément de Mamadou Dia chef de l’exécutif sénégalais, de déférer à des ordres de réquisition émanant d’un chef sous l’autorité duquel elle n’était pas placée.
Le colonel Soumaré fit remarquer qu’il n’était pas venu pour engager une discussion juridique mais pour faire une remise matérielle de documents administratifs.
Alors, Valdiodio Ndiaye, le ministre de l’Intérieur donna l’ordre aux officiers de la Gendarmerie qui se trouvaient dans le bureau d’arrêter le colonel Soumaré. Aucun de ces officiers ne s’exécuta. Les quatre officiers présents étaient des officiers français.
Les officiers français se rendaient compte, en effet, que Valdiodio Ndiaye, qui n’avait aucune délégation de pouvoirs du président Dia, n’avait pas qualité pour leur donner des ordres. La Gendarmerie ne reçoit de l’autorité administrative ou judiciaire que des réquisitions et non des ordres, lesquels ne peuvent lui être donnés que par ses propres chefs. De plus, un officier de Gendarmerie, sauf le cas de nécessité urgente et absolue, n’appréhende pas lui-même. Ce n’est pas son rôle.
Le colonel Soumaré s’apprêtait à quitter la Gendarmerie, quand entra le commandant Tamsir Bâ, venu informer le ministre de l’Intérieur que, conformément aux instructions reçues, il venait d’arriver à Dakar avec ses pelotons de Gardes Républicains. Le ministre de l’Intérieur Valdiodio Ndiaye lui ordonna de maîtriser le colonel Soumaré ; ce qui fut immédiatement fait avec l’aide du chauffeur du ministre, le brigadier de police Birane Ndiassé Guèye.
Puis assisté du colonel Fall, le ministre de l’Intérieur alertait par téléphone le commandant Wane, officier sénégalais, adjoint du colonel Soumaré, pour l’informer de l’arrestation de celui-ci et lui demander d’ordonner aux unités de l’armée malienne dispersées en ville de rejoindre leurs cantonnements après que la Gendarmerie et la Garde Républicaine les eut relevées. Cette relève s’effectua sans incidents. Les principaux bâtiments publics de Dakar occupés, la Gendarmerie investit l’émetteur radio de Rufisque faisant cesser les émissions de Radio-Mali qui devenait Radio-Sénégal.
Enfin les ministres maliens d’origine soudanaise, dont Modibo Keïta, étaient arrêtés et mis en résidence surveillée. Au moment de leur arrestation, ceux-ci se trouvaient presque tous au domicile du président Modibo Keïta, au Palais du Gouvernement fédéral et attendaient le colonel Soumaré, lequel avait commis l’imprudence de s’être rendu à la gendarmerie seul, sans escorte.
De retour à Dakar, le président Mamadou Dia convoquait les membres de l’Assemblée législative du Sénégal, avant de présider, vers une heure du matin, un conseil des ministres au cours duquel, Me Valdiodio Ndiaye était nommé ministre de la Défense nationale, cumulativement avec ses fonctions de ministre de l’Intérieur et le colonel Fall chef d’état-major de l’Armée sénégalaise.
A l’issue de ce conseil, parlant en wolof au micro de Radio-Sénégal, Mamadou Dia déclarait :
« Sénégalaises, Sénégalais !
Vous nous avez confié la responsabilité de gouverner ce pays. Forts de la confiance que vous nous avez témoignée, nous l’avons libéré du colonialisme, en association avec tous nos amis Soudanais auxquels d’ailleurs nous avions délégué une partie des compétences qui revenaient normalement au Sénégal. Modibo Keïta a éprouvé le besoin d’abuser de la force qu’il détenait pour s’en servir contre notre peuple, espérant sans doute que les Sénégalais seraient suffisamment veules pour tolérer que lui, Modibo Keïta, venu de Bamako, puisse disposer d’eux à sa guise.
C’est bien mal connaître les sénégalais qui, en d’autres circonstances, ont défendu des causes qui les touchaient moins directement. Je suis certain que tout le Sénégal se dressera pour défendre son honneur. Nous qui avons participé à des combats pour d’autres races et d’autres peuples, nous sommes à plus forte raison prêts à donner le meilleur de nous-mêmes pour défendre la patrie. Nous n’accepterons pas d’être réduits en esclavage sous quelque prétexte que ce soit ».
Succédant au président Dia sur les antennes de Radio Sénégal, Senghor prononçait en français l’allocution suivante :
« Citoyennes, citoyens du Sénégal, c’est le Secrétaire général de l’UPS qui vous parle. Comme vous le savez, Modibo Keïta, poussé par une ambition folle vient de tenter un coup de force contre le peuple sénégalais. Il a destitué Mamadou Dia de son poste de ministre de la Défense du Mali. Il fallait pour cela l’approbation de la délégation sénégalaise à l’Assemblée fédérale. Il a mobilisé les troupes du Mali contre le peuple sénégalais, troupes dont la plupart sont des Sénégalais. C’est une autre illégalité car la Sécurité Intérieure appartient aux Etats fédérés, non à l’Etat fédéral.
Mais, comme chacun le sait, Modibo Keïta n’a cure de la légalité. A la force, nous répondrons par des forces supérieures. Nous avons d’abord nos forces de sécurité qui, en ce moment, tiennent la situation bien en mains à Dakar. Nous avons surtout nos forces populaires. A partir de cette heure, tous les militants de l’UPS sont mobilisés, toutes les militantes et tous les militants, toutes les sections de l’UPS doivent se transformer immédiatement en milices populaires et s’armer.
Sénégalaises, Sénégalais, l’heure est grave, et je n’ai pas besoin de vous le dire. Jamais le Sénégal n’a été dans une telle situation. Il s’agit aujourd’hui pour nous, Sénégalaises et Sénégalais, de défendre notre indépendance, cette indépendance dont les hommes politiques sénégalais ont été les principaux artisans dans les pays d’Afrique noire de langue française. Ce que l’on veut c’est vous coloniser. Ce que l’on veut c’est vous réduire en esclavage. Vous ressusciterez aujourd’hui la bravoure et l’honneur de vos ancêtres, d’un Ndiadiane Ndiaye et d’un Lat Dior Diop. Pour ma part, je suis prêt à mourir, comme tous les leaders de l’UPS, vous aussi n’est-ce pas, pour que vive le Sénégal ! »  
Plus tard, aux environs de deux heures du matin, en l’absence de son Président, Me Lamine Guèye, l’Assemblée législative du Sénégal se réunissait à son siège situé à la Place de l’Indépendance (actuel Ministère des Affaires étrangères), sous la présidence de André Guillabert et votait trois projets de loi :
  • Le premier de ces projets abrogeait toutes les lois et tous les décrets portant transfert de compétences au profit de la Fédération du Mali, notamment la loi sénégalaise n° 60-033 du 10 Juin 1960. L’article 2 de ce projet prononçait le retrait de la République du Sénégal de la Fédération du Mali et l’article 3 proclamait juridiquement l’indépendance du Sénégal.
  • Le second projet de loi instaurait l’état d’urgence sur toute l’étendue du territoire sénégalais.
  • Le troisième accordait les pleins pouvoirs au Gouvernement Dia pour une durée de trois mois.
A l’issue de la séance, un nouveau Conseil des ministres de la République du Sénégal se tint. Il déléguait au ministre de l’Information les pouvoirs de censure prévus par la loi proclamant l’état d’urgence et décidait de reprendre les accords franco-maliens et de les adapter à la situation nouvelle du Sénégal.
Enfin, par décret du Président du Conseil, Doudou Thiam était nommé ministre des Affaires Etrangères, Gabriel d’Arboussier ministre de la Justice et Abdoulaye Fofana ministre des Postes et Télécommunications, de la Marine marchande et des Transports aériens.
Le 20 Août 1960, tôt dans la matinée, le calme régnait à Dakar malgré une foule nombreuse composée de sympathisants de l’UPS à laquelle s’étaient joints des habitants de la brousse accourus à l’appel du Secrétaire général et du Bureau national des Jeunes de l’UPS.
Le 21 Août 1960, en fin d’après-midi, Modibo Keïta quittait le Sénégal pour le Soudan dans un train de la ligne Dakar-Niger. Il était accompagné des ex-ministres maliens d’origine soudanaise, de leurs collaborateurs et de leurs familles. L’expulsion de Modibo Keïta et des dirigeants soudanais du territoire sénégalais marquait la fin de la Fédération. Le Mali avait vécu !
Le 25 Août 1960, l’Assemblée législative du Sénégal, érigée en Assemblée constituante, adoptait à l’unanimité le projet de loi portant révision de la Constitution de la République du Sénégal. Le 5 Septembre 1960, l’Assemblée législative élit Léopold Sédar Senghor Président de la République du Sénégal. Le 11 Septembre 1960, la France reconnaît l’indépendance du Sénégal et la rupture de la Fédération du Mali. Le 28 Septembre 1960, le Sénégal est admis par la 15ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies.
Que retenir de ces évènements ?
Ce que l’on peut retenir, c’est que le 19 Août 1960, pour les dirigeants sénégalais, a été à la fois une victoire et une défaite. Une victoire parce qu’ils ont échappé au destin des colonisés que leur préparaient les Soudanais, mais une défaite parce qu’ils ont vu mourir un rêve qui leur était cher : ils avaient lutté au sein des assemblées parlementaires françaises contre la balkanisation de l’Afrique noire. Vaincus sur les bords de la Seine, ils rêvaient de prendre leur revanche en édifiant un Etat fédéral solide et prospère dont le pouvoir attractif aurait été tel que d’autres Etats africains y seraient entrés en grand nombre, convaincus que l’isolement n’est guère payant et que le XXème siècle doit être le siècle des grands ensembles et non celui des poussières d’Etats.
La Fédération du Mali aura vécu exactement 18 mois.
La thèse sénégalaise :
Le 18 Août 1960, les services sénégalais captaient deux messages du colonel Soumaré, officier sénégalais chef d’état-major de l’armée malienne, à deux compagnies de l’armée malienne stationnées en Casamance. Par ceux-ci, il donnait l’ordre aux commandants de compagnie de se tenir prêts et en tenue de combat pour gagner la capitale afin d’y assurer « le maintien de l’ordre ». Sur l’ordre de Modibo Keïta, ces messages avaient été expédiés par le colonel Soumaré à l’insu de son supérieur hiérarchique, Mamadou Dia, ministre de la Défense.
« Ce sont ces deux messages, devait dire Léopold Sédar Senghor, qui nous ont mis en état d’alerte et nous ont incité à lancer à notre tour un appel aux milices pour résister à ce « coup de force ». C’est seulement à ce moment-là, affirme-t-on au Sénégal, que des contre-mesures ont été envisagées.
Par « milices populaires », Senghor veut parler des sections de l’UPS à qui avait été donné l’ordre de se tenir en état d’alerte. De même, le Secrétaire général et le Secrétaire politique avaient pris contact avec la direction du Mouvement des Jeunes de l’UPS et avec quelques responsables de l’Union des Travailleurs du Sénégal.
Après la mobilisation des forces populaires, une réunion eut lieu dans les appartements du président Senghor, au Palais de l’Assemblée fédérale, entre Senghor, Mamadou Dia et Valdiodio Ndiaye afin d’envisager les contre-mesures de précaution qui s’imposaient, eu égard aux mesures illégalement et clandestinement arrêtées par le Gouvernement fédéral.
Il y fut décidé, pour faire contrepoids aux troupes dont allait disposer le colonel Soumaré, de faire descendre à Dakar les forces de sécurité dites Garde Républicaine, commandées par le commandant Tamsir Bâ et stationnées à Thiès (80 km de Dakar).
Il y fut décidé aussi que les forces de maintien de l’ordre stationnées à Dakar seraient consignées à partir du 19 Août 1960 à 12 heures. Ce même jour, à 10 heures 30, le commandant de Gendarmerie reçut une réquisition générale du Président du Conseil du Sénégal fixant à 8 pelotons de gendarmerie les forces nécessaires pour maintenir l’ordre dans la ville de Dakar à partir du 19 Août, à 12 heures.
« Cependant, devait dire Léopold Senghor, quelles que fussent les précautions qu’ils avaient prises, le Gouvernement sénégalais et le parti ne pouvaient croire à un coup d’Etat. Le coup d’Etat décidé au cours du Conseil des ministres extraordinaire qui se tint au début de la soirée du 19 Août m’a trouvé dans mon lit, tandis que le Président du Conseil, Mamadou Dia, rentrait à Dakar ».
C’est en effet vers 22 h 30, le 19 Août 1960, que furent rendues publiques les décisions prises par le Conseil des ministres extraordinaire et que commença l’occupation des principaux bâtiments publics de Dakar par les forces armées. C’est à ce moment-là qu’on mit en application, côté sénégalais, les mesures décidées la veille.
A qui revient l’initiative de la rupture ?
Depuis les conférences politiques maliennes d’Avril et Mai 1960, un climat de tension et de méfiance régnait entre les délégations sénégalaise et soudanaise. Ce malaise, longtemps dissimulé pour permettre la survie de la Fédération, se révélait au moment de la nomination du candidat à l’élection présidentielle. Il apparaissait dès cet instant aux Sénégalais que l’élection de Léopold Sédar Senghor serait difficile, voire impossible, en raison de l’opposition des dirigeants soudanais.
Les modalités du vote étaient telles qu’elles interdisaient pratiquement l’élection de Senghor. En vertu de l’article 8 de la Constitution fédérale modifiée le 18 Juin 1960, le Président de la Fédération devait être élu par un collège électoral comprenant les membres des assemblées législatives des Etats, étant entendu que dans l’éventualité où une assemblée législative locale apparaîtrait numériquement plus faible que son homologue, elle serait élargie de manière à supprimer son infériorité numérique.
Quelques 200 voix au total devaient donc en principe élire le Président de la Fédération du Mali. La Constitution ne précise pas si l’élection devait avoir lieu à la majorité qualifiée ou à la majorité absolue.
Il est à noter que s’il est vrai que l’UPS avait investi Senghor, il n’en est pas moins vrai qu’aucune obligation n’était faite à un candidat éventuel de bénéficier au préalable de son propre parti, ni de l’investiture de sa propre délégation.
Le risque de voir échouer la candidature de Senghor et de voir triompher celle de Lamine Guèye (s’il se présentait comme le souhaitaient les Soudanais) suffit à lui seul pour se persuader que les Sénégalais n’étaient guère décidés à aller à des élections perdues d’avance et qu’ils étaient animés de la volonté inébranlable de sortir du Mali.
Ainsi donc, malgré sa détermination militante, l’UPS perd les deux batailles dans lesquelles elle s’est engagée : celle de la Communauté confédérale et celle de la Fédération du Mali. Le Parti est obligé d’assumer les faits accomplis et de conduire le Sénégal à l’Indépendance nationale en 1960, mais dans un contexte de « balkanisation ».
Dès son entrée en fonction de Président de la République, le 7 Septembre 1960, Senghor reconduit Mamadou Dia au poste de Président du Conseil et ce dernier forma immédiatement, le même jour, un nouveau gouvernement de 15 membres dont la composition est la suivante :
  1. Doudou Thiam, ministre des Affaires étrangères ;
  2. Gabriel d’Arboussier, garde des sceaux, ministre de la Justice ;
  3. Valdiodio Ndiaye, ministre de l’Intérieur, chargé provisoirement de la Défense ;
  4. Amadou Karim Gaye, ministre du Plan, du Développement et de la Coopération technique ;
  5. André Peytavin, ministre des Finances ;
  6. François Dieng, ministre de l’Education nationale ;
  7. Amadou Cissé Dia, ministre du Commerce et de l’Industrie ;
  8. Joseph Mbaye, ministre de l’Economie rurale ;
  9. Ibrahima Sarr, ministre de la Fonction publique et du Travail ;
  10. Alioune Badara Mbengue, ministre des T.P., de l’Habitat et de l’Urbanisme ;
  11. Abdoulaye Fofana, ministre des transports et des Télécommunications ;
  12. Amadou Babacar Sarr, ministre de la Santé et des Affaires sociales ;
  13. Emile Badiane, ministre de l’Enseignement technique et de la Formation des cadres ;
  14. Alioune Tall, ministre de la Jeunesse et des Sports ;
  15. Obèye Diop, ministre de l’Information, de la Radiodiffusion et de la Presse.
Il s’agit du 7 septembre et non du 17 septembre comme mentionné sur la légende.
Prochain:

Valdiodio Ndiaye, maître d’œuvre  de la réforme administrative