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Train express régional: L’émergence ventre à Ter De notre correspondant à Matam, Habib KÂ

Bientôt deux ans, après la réélection de son président, que le gouvernement de la République ne s’enflamme plus de son plan « Sénégal émergent » (PSE). La dernière fois, l’on se souvient, c’était lors de la “réception-inauguration” du premier tronçon du Train express régilonal (TER) Dakar-Diamniadio et celle de la gare de Dakar rénovée : le couple présidentiel était sorti avec, pour une première excursion avant l’heure, le TER, dévoilant ses atours aux Sénégalais les plus sceptiques. C’était le 21 janvier 2019, veille de la présidentielle de mars : le président-candidat avait besoin de brandir ce trophée pour confirmer la vitalité de son plan phare et redorer son blason.

Depuis, le TER est à terre, marron de poussière.

Depuis, aussi, c’est le black-out total, personne ne peut prédire quand la bête mettra la tête dehors. Et l’Etat peine encore à trouver le gap nécessaire pour finaliser les travaux.

De 656 milliards de francs cfa initialement prévus pour le coût de revenu du TER, certaines sources avancent que le chiffre de 1.200 milliards serait largement dépassé.

Abdoulaye Daouda Diallo, ministre des Finances et du Budget, renseigne que la dette du Sénégal au 03 avril 2020 est sensiblement égale à 8.231 milliards.

Du groupe consultatif de Paris réuni les 17 et 18 décembre 2018 pour le Sénégal, le président Macky Sall réussit à décrocher le jackpot de 14.000 milliards francs cfa au lieu des 5.000 escomptés. Une paillasse financière majorée de 280% avec comme objectif un taux de croissance de 9,1% en fin 2023. Encore que le taux de croissance est un des critères d’émergence mais il ne traduit pas le développement.

Les emprunts serviront plus de financements de projets prestigieux souvent pas vraiment prioritaires, à coups de milliards, pour donner à l’international, au Sénégal une façade de modernité alors que la population fait face au quotidien à des impératifs bien plus pressants : hôpitaux, universités, centres de formation, route, eau, agriculture, élevage, pêche etc . . .

Le désenclavement des régions, greniers agricoles, et la constitution des hubs économiques de développement autour des zones minières sont la priorité des priorités pour réaliser l’autosuffisance en produits alimentaires, condition sine qua non de tout développement, durable, intégré pour plus de 65% des Sénégalais.

Notre TER, vitrine parmi d’autres du plan « Sénégal émergent » (PSE), toujours à quai, parce que les ressources se font rares. Sur le terrain, le constat n’est pas du tout reluisant :

  • difficultés de lever des fonds comme auparavant,
  • passerelles pour piétons inachevées,
  • nouvelle gare de Thiaroye,
  • des entreprises obligées d’arrêter pour des arriérés de paiements lourds à supporter,
  • la deuxième phase du projet prévoit que la ligne du TER rejoigne l’aéroport international Blaise Diagne.

La clé de la réussite est en ceux qui veulent relever le défi. Il faut d’abord commencer par soi, changer les comportements et les mentalités. “Aide-toi, le ciel t’aidera”, dit-on ?

Les financements extérieurs sont des graines d’appoint et pour qu’elles germent, il faut un terreau fertile. Et là où le bât blesse, c’est justement le terreau. Ce qu’on y constate, n’est guère reluisant :

  • des institutions et agences budgétivores,
  • des caisses noires multiples,
  • un pléthore de ministres du gouvernement, de ministres conseillers, de chargés de mission,
  • 307 milliards de francs CFA pour l’achat de véhicules
  • des dépenses exorbitantes liées à l’usage des téléphones fixes et portables, de l’eau, du carburant, de l’électricité, etc . . .

Il y’a un préalable que tout pays qui aspire à l’émergence doit avoir : une volonté, un peuple jeune, laborieux, discipliné, une administration motivée, dotée d’une conscience professionnelle éprouvée, des dirigeants, à tous les échelons de responsabilité, intègres, transparents, vertueux. Une administration et une justice libres, libérées des entraves d’un Exécutif inhibiteur.

Un État “impersonnel”, structuré, démocratique, soucieux d’une gestion orthodoxe des biens publics, des ressources minières, gazières, halieutiques, capable de redonner espoir à la jeunesse et de tourner une bonne fois pour toute la page des “boats barzack”.

Vivement notre Train Express Régional (TER) de se déployer majestueusement bientôt entre le Centre Ville et l’Aéroport International Blaise Diagne (AIBD, en 45 minutes pour une distance de 57 kilomètres avec des trains tous les 10 minutes et 12 gares à traverser.

D’ici là, le président Macky Sall change de paradigme et nous exhorte à nous concentrer sur une séquence triennale où la centralité des enjeux serait politique.

Amorcer ce virage nous mènerait à nous enliser dans un bourbier où l’essentiel pour les Sénégalaises et les Sénégalais est mis en berne, notamment la santé, l’éducation, les infrastructures routières, ferroviaires, aériennes, maritimes, l’agriculture, l’industrie et surtout le très stratégique volet de sauvegarder et de préserver nos ressources minières, gazières, énergétiques et aujourd’hui halieutiques.

Et l’on ne discuterait que du sexe des anges, de la nouvelle configuration de Bennoo, du tandem Macky-Idy, de l’incertitude du calendrier électoral d’ici l’an 2024, où le Sénégal est attendu avec une “croissance à deux chiffres”.