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Retour sur une Crise Israélo-palestinienne qui perdure Dossier réalisé par Mame Gor NGOM, Rédaction Centrale, Le Devoir

Arrêtez le massacre !

Plus de 200 morts en une semaine à Gaza. Macabre bilan d’événements tragiques. Les tirs de roquettes ne s’arrêtent pas. Les sirènes continuent de retentir à Jérusalem. Riposte déterminante mais pas assez efficace contre Israël qui dicte sa loi. Du sang, de la sueur et des pleurs. Retour sur un massacre. Sans fin.

Des morts, des blessés. Drames immenses. Qu’est-ce qui est à l’origine de ce regain de tension en terre Palestinienne ? Des
troubles alimentés en grande partie par une tentative de longue date des colons juifs de s’emparer des maisons des familles palestiniennes à Jérusalem-Est annexée par Israël. En plein ramadan, des affrontements ont éclaté entre les manifestants et des colons juifs de cette partie de la ville occupée depuis 1967 et annexée par Israël. La décision, de la Cour suprême Israëlienne de l’expulsion de leur domicile de familles palestiniennes, a ravivé la tension.

Des heurts qui ont eu notamment lieu devant la mosquée Al Aqsa , à Jérusalem. Des jets de pierres, des tirs et des gaz lacrymogènes. Éternelle rengaine.
Les forces de police israéliennes ont déclaré que des milliers de Palestiniens s’étaient barricadés sur les lieux avec des pierres et des cocktails Molotov en prévision d’un affrontement lors d’une marche juive prévue lundi pour marquer la Journée de Jérusalem. Une perception des choses largement contestée par le Hamas qui dénonce un “banditisme”.

“Trump a mis le feu aux poudres”

Sandrine Mansour dans son livre , “La question palestinienne marginalisée”, explique que la décision de Donald Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et d’y transférer l’ambassade américaine en 2018, marque un tournant dans la politique américaine, qui rompt avec des décennies de négociations et de précautions.

” Désormais, Israël peut poursuivre sa politique de colonisation de peuplement, grâce à l’appui américain et au silence international, pour progressivement et définitivement faire disparaître la question de Palestine, tant au point de vue politique que diplomatique et géographique”, poursuit cette chercheuse associée au centre de recherche internationale et Atlantique, (Crhia) de l’université de Nantes. Selon elle, le plan de “paix” appelé “deal du siècle “, présenté début 2020 par Donald Trump et Benjamin Netanyahu, “parachève cette politique avec la reconnaissance des annexions israéliennes, passées et à venir.” Prémonitoire. Dès lors, il est évident donc comme le souligne la chercheuse, “rien n’a été fait pour résoudre la question palestinienne, bien au contraire. “L’objectif des différents gouvernements israéliens soutenus par les États-unis a été de dissoudre cette question, de la réduire à un épiphénomène. Dès lors qu’il n’y aura plus de question palestinienne, la domination israélienne sur l’ensemble du territoire de la Palestine se poursuivra. Dans cette perspective, et comme il n’est plus possible pour Israël d’expulser les Palestiniens comme en 1948 et 1967, ils seront condamnés à être soumis au diktat israélien, ou à partir ailleurs, comme le mouvement sioniste l’avait souhaité.” Avec Joe Biden président démocrate américain, rien n’a changé. L’Amérique est du côté d’Israël.

Aux origines d’une crise

L’histoire remonte au début du 20éme siècle, le mouvement sioniste cherche à établir un État pour les Juifs. La Palestine située entre le Jourdain et la Mer Rouge est sollicitée. Cette région est une terre sacrée pour les musulmans, les juifs et les catholiques. A l’époque, elle appartenait à l’Empire ottoman et était occupée principalement par des Arabes et d’autres communautés musulmanes.

Une forte immigration juive, favorisée par les aspirations sionistes, commençait à susciter la résistance des communautés.

C’est après la Seconde Guerre mondiale en 1945 et après l’Holocauste, que la pression s’est accrue. Initialement, il était prévu le partage du territoire contrôlé par la puissance européenne entre Juifs et Palestiniens. Des grincements de dents.

La Nakba ou la catastrophe !

Après la fondation d’Israël, le 14 mai 1948, la tension est passée d’une question locale à une question régionale. Le lendemain, l’Égypte, la Jordanie, la Syrie et l’Irak envahissent ce territoire. C’est la première guerre israélo-arabe, également connue des Juifs comme la guerre d’indépendance ou de libération.

Les forces juives ont déjà expulsé près de quatre cent mille Palestiniens du territoire prévu pour l’État juif et occupent la majorité de ses villes arabes.Quelque 415 villages palestiniens seront détruits ou deviendront des villages israéliens.

Pour les Palestiniens, c’est le début de la Nakba, la “destruction” ou “catastrophe” : le début de la tragédie nationale. 750 000 Palestiniens fuient vers les pays voisins ou sont expulsés par les troupes juives.

La guerre de 6 jours, la guerre du Kippour…

1948 ne sera pas la dernière confrontation entre Arabes et Juifs. En 1956, une crise à propos du canal de Suez opposera l’État d’Israël à l’Égypte, qui ne se définira pas sur le champ de bataille mais par la pression internationale sur Israël, la France et l’Angleterre.

Mais les combats auront le dernier mot en 1967 lors de la guerre des Six Jours. Ce qui s’est passé entre le 5 et le 10 juin de cette année-là a eu des conséquences profondes et durables à différents niveaux. Ce fut une victoire écrasante pour Israël contre une coalition arabe.

Israël a pris la bande de Gaza et la péninsule du Sinaï à l’Égypte, la Cisjordanie à la Jordanie et le plateau du Golan à la Syrie. Un demi-million de Palestiniens fuient.

Le dernier conflit israélo-arabe sera la guerre du Kippour en 1973, qui oppose l’Égypte et la Syrie à Israël et permet au Caire de récupérer le Sinaï (complètement cédé par Israël en 1982), mais pas Gaza. Six ans plus tard, l’Égypte devient le premier pays arabe à faire la paix avec Israël, un exemple qui ne sera suivi que par la Jordanie.

Deux territoires palestiniens, les raisons ?

Dans son rapport à l’Assemblée générale en 1947, le Comité spécial des Nations unies sur la Palestine (Unscop), a recommandé que l’État arabe comprenne “la Galilée occidentale, la région montagneuse de la Samarie et de la Judée, à l’exclusion de la ville de Jérusalem, et la plaine côtière d’Isdud jusqu’à la frontière égyptienne. “

Mais la division du territoire a été définie par la ligne d’armistice de 1949, établie après la création d’Israël et la première guerre israélo-arabe.

Les deux territoires palestiniens sont la Cisjordanie (qui comprend Jérusalem-Est) et la bande de Gaza, qui sont distants d’environ 45 km. Ils ont une superficie de 5 970 km2 et 365 km2, respectivement.

La Cisjordanie se situe entre Jérusalem, revendiquée comme capitale par les Palestiniens et les Israéliens, et la Jordanie à l’est, tandis que Gaza est une bande de 41 km de long et de 6 à 12 km de large.

Gaza, bande stratégique…

Gaza, ville stratégique et symbolique a une frontière de 51 km avec Israël, 7 km avec l’Égypte et 40 km de côte sur la mer Méditerranée. Elle est occupée à l’origine par les Israéliens qui gardent toujours le contrôle de sa frontière sud, la bande de Gaza a été capturée par Israël lors de la guerre de 1967 et ne l’a libérée qu’en 2005, bien qu’elle maintienne un blocus aérien, maritime et terrestre qui restreint la circulation des biens.

Actuellement, la bande est contrôlée par le Hamas, le principal groupe islamique palestinien qui n’a jamais reconnu les accords signés entre les autres factions palestiniennes et Israël. Tout le contraire de la Cisjordanie, dirigée par l’Autorité nationale palestinienne et le gouvernement palestinien internationalement reconnu. Précision de taille : Fatah, la principale faction, n’est pas islamique mais laïque.

Arafat, Olp…Fatah

Créée en 1964, l’Organisation de libération de la Palestine gagne son indépendance. M. Yasser Arafat en devient en 1969 le président jusqu’à sa mort en 2004 et la résistance va peu à peu s’engager dans la voie de la revendication d’un Etat palestinien indépendant, à côté d’Israël. L’OLP qui devient incontournable, a lancé des opérations contre Israël, d’abord à partir de la Jordanie, puis du Liban. Des attaques qui comprenaient également des attentats contre des cibles israéliennes sur le territoire européen. Des victimes collatérales se comptaient.

L’ Olp et Israël signent en 1993 les accords de paix d’Oslo. L’organisation palestinienne renonce à la “violence et au terrorisme” et reconnaît le “droit”. Israël “d’exister dans la paix et la sécurité”, une reconnaissance que l’organisation islamique Hamas n’a jamais acceptée.

Avec la première Intifada (1987-1993), la résistance palestinienne se recentre sur le territoire occupé. La première négociation israélo-arabe (entamée en 1991 à Madrid) et israélo-palestinienne permet une reconnaissance réciproque, mais dissymétrique, entre l’Etat d’Israël et l’OLP. L’échec de la négociation de Camp David (juillet 2000), de même que le doublement du nombre de colons durant la négociation, aboutissent à la Seconde Intifada (2000). Se succèdent alors plusieurs offensives israéliennes, la construction d’un mur d’annexion, la victoire électorale du Hamas aux élections législatives de 2006, puis l’offensive israélienne de la bande de Gaza durant l’hiver 2008-2009, territoire toujours assiégé depuis.

Processus de paix si…lent

Le retard dans la création d’un État palestinien indépendant, la construction de colonies pour les colons juifs en Cisjordanie et la barrière de sécurité autour de ce territoire – condamnée par la Cour internationale de justice de La Haye – ont compliqué la progression d’un processus de paix.

Ce ne sont pas les seuls obstacles, comme l’a montré l’échec des derniers pourparlers de paix sérieux entre les deux groupes qui ont eu lieu à Camp David, aux États-Unis, en 2000, lorsqu’un Bill Clinton sortant n’a pas réussi à trouver un accord entre Arafat et le Premier ministre israélien de l’époque, Ehud Barak.

Violences inouïes israéliennes

Les violences selon Israël, ont un objectif limité : désarmer les militants palestiniens et détruire les tunnels construits par le Hamas et d’autres groupes dans le but de s’infiltrer en Israël. Mais en réalité, Tsahal, l’armée israélienne fait beaucoup de dommages collatéraux en tuant des jeunes sans défense et des innocents, comme c’est le cas actuellement.

Israël affirme ainsi avoir le droit de se défendre et dit souvent que tout État confronté à la réalité de vivre avec un voisin qui lui lance des roquettes réagirait comme il le fait, et reproche au Hamas d’utiliser des boucliers humains et d’attaquer à partir de zones civiles.

L’organisation islamiste quant à elle, nie tout et assure qu’elle lance des roquettes sur Israël en tant que légitime défense. Cela, en représailles à la mort de partisans du Hamas aux mains d’Israéliens et dans le cadre de “leur droit à résister à l’occupation et au blocus”.

Israël doit cesser le massacre !

Depuis que la question de la Palestine a été abordée pour la première fois en 1948, le Conseil de sécurité de l’Onu a adopté plus d’une centaine de résolutions à ce sujet qui n’ont rien donné. Depuis, les Palestiniens ont vu leur terre et leurs biens confisqués, leurs droits ont été violés et, aujourd’hui, la perspective d’un État palestinien contigu est grandement compromise. La solution des deux États est la seule qui vaille.

Hélas, depuis 2016, 46 000 unités de logement illicites ont été annoncées et/ou construites par Israël dans les territoires occupés. Aucune mesure n’a été prise pour contrer ces graves violations.

Tirer des balles n’est pas une riposte raisonnable ou proportionnelle aux lanceurs de pierres. D’ailleurs, plus de 157 enfants palestiniens sont détenus par Israël.