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Premier ministre, un bien nécessaire Par Habib KÂ

Qu’on le dise ou pas, le retour du poste de premier ministre est le sujet dominant de l’actualité, en sus, la remise en cause du Fast track tel qu’il fonctionne présentement. La désignation d’un Premier ministre serait une grande annonce que le président de la République est prêt à s’engager à terminer certains travaux, faire les dernières retouches de son action gouvernementale qui doit s’éteindre en mars 2024.

On se rappelle que c’est suite à la crise de 1962 qui l’opposa au président du conseil Mamadou Dia que Senghor organisa en 1963 un référendum supprimant le poste. Sept ans après, le même Senghor, par référendum rétablit le fauteuil de PM, costume trois pièces taillé sur mesure pour Abdou Diouf, dauphin constitutionnel.

Depuis, ses héritiers au palais, comme pour perpétuer sa mémoire, Abdoulaye Wade, Macky Sall aussi, s’évertuent avec les ciseaux pour réajuster le pantalon, comme quoi quand on est président on peut tailler, retailler la Constitution à sa guise et n fois.

Comme Senghor, Macky Sall doit avoir la grandeur de savoir partir, et à point comme Senghor, préparer sa propre “succession”. C’est vrai que c’est dur de se détourner des lambris du pouvoir au sommet de sa gloire, à son âge, surtout quand c’est à cet âge que certains de ses pairs y accèdent.

Tenter de forcer un troisième mandat serait trop hasardeux. Le Pape du Sopi l’a fait à ses dépends avant de se rendre compte, trop tard d’ailleurs, que ce même peuple qui l’adulait au point de scandait partout et en tout temps “Baayileen Gorgui mu liggeey”, “Gorgui dolliñu”, ce même peuple en avait assez de sa politique, des intrigues du palais, de ses hommes et de leurs comportements face aux biens publics et aux populations. Belle leçon pour Wade, son fils Karim et les libéraux. Ils ont appris, certes par la négative, que ce que les Sénégalais savent le mieux faire, c’est de déchoir un président. Quand il faut élire, ils peuvent y aller sans trop de précautions, pour le “folli” ils ne font pas se faire prier deux fois.

Aussi, c’est n’accorder aucune considération aux leaders des membres de son parti, de ceux de la coalition Macky 2012, de BBY. Il ne leur reconnaît comme prérogative que de renoncer à toute ambition présidentielle, fermer la bouche, aller au charbon pour ses bons soins.

Certains voudraient présenter la position du président Macky Sall sur le 3ème mandat comme ambiguë, alors qu’elle est plus claire que l’eau de Kirène. Il exhorte ministres et directeurs de sociétés de se concentrer sur le travail pour finir le mandat pour lequel il est élu.

Ces ministres et directeurs de sociétés de la République ne sont pas des enfants de chœur pour être soumis au forçat. Pour la plupart, ceux sont des compagnons politiques avant tout, qui comme lui, rêvaient légitimement d’un destin présidentiel. Ils ne peuvent pas, par conséquent rester ad vitam aeternam  au quai, pendant que le chrono électoral est lancé pour les autres à une vitesse exponentielle.

A trente-neuf mois du grand soir, pas de présidentiable du camp au pouvoir dans les starting blocks, tenus en laisse par la horde d’insulteurs et une presse inquisitrice, prête à débusquer partout de supposés cafards.

Macky Sall doit mettre fin à cette terreur entretenue, cette prise d’otages de ces vieux compagnons de route dans ses prisons à ciel ouvert. Seul Maitre abord, il lui faut franchir le Rubicond, se prononcer sans ambages sur le 3ème mandat  en rappelant que lui-même reconnaissait sur les plateaux et les ondes des radios en français et en wolof, qu’il lui est impossible de demander un 3ème mandat.

Quiconque parmi les membres de son parti ou de sa Coalition abonde dans le même sens que lui, qu’il est à son dernier mandat et qu’il ne peut plus se représenter se voit criblé par les foudres de ses francs-tireurs. D’autres plus loyalistes que le roi, versant dans un excès de zèle, vont jusqu’à conseiller leurs fidèles de s’armer de djaasi contre ceux qui refusent à leur président le troisième mandat.

Le rétablissement du poste de PM se pose donc avec acuité dans un contexte où même si certains analystes voient au futur nommé un destin présidentiel. Ce poste pose en arrière-fond, dans le nouveau contexte, la problématique de la succession du président de la République.

Supprimé par l’Assemblée nationale le 4 mai 2019, le président a révélé qu’il voulait réduire les délais des procédures entre le parlement, la primature et la présidence de faire du «fast track», c’est-à-dire réduire les procédures.

Macky Sall avait pris de court tout le monde en annonçant cette réforme qui lui donne une emprise directe sur le gouvernement sans s’en référer à un PM.

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