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Pds : Les Liaisons Dangereuses

Présidentielle-Pds

Une constance suspecte

Comment exploiter au mieux le rapprochement entre Benno et le Pds au profit du candidat de la majorité pourtant objet de leur courroux commun ? La force du pouvoir pourrait-elle les obliger à frapper ensemble, quitte à marcher séparément ensuite ?
Vaste programme de campagne.

La fidélité du Parti démocratique sénégalais à ses principes en a fait une formation suspecte : on le juge proche de la majorité dans les enjeux majeurs ; aussi bien dans l’affaire de l’expulsion de Mimi Touré de l’Assemblée que pour la motion de censure contre le Premier ministre Amadou Bâ, en passant évidemment, pour rafraîchir certaines mémoires, par la loi no 4/2024 adoptée par l’Assemblée nationale en sa séance du 5 février 2024 qui repoussait la Présidentielle du 25 février.
Cette proximité avec la majorité dans certains grands moments devrait se vérifier à la Présidentielle lorsque nombre de ténors estiment que le moment est là de vivre sa propre directive, quelles que soient les recommandations du parti.

Sauf pour la motion de défiance à laquelle il n’a pas été associé, le parti de Me Wade a agi pour tous les autres grands moments de l’Assemblée en conformité avec ses propres règlements et statuts. Même si cela semble proche de la démarche de la majorité.

En votant par exemple l’éviction de Aminata Touré de l’assemblée, le Pds retournait à l’aube des pérégrinations d’un Macky Sall et de l’expulsion d’un certain Mbaye Ndiaye pour collusion avec l’ennemi ; le Pds avait en effet intégré dans son règlement intérieur la disposition de la Constitution ainsi libellée : « Tout député qui démissionne de son parti en cours de législature est automatiquement déchu de son mandat. Il est remplacé dans les conditions déterminées par une loi organique ». (Loi N° 2001-03 du 22 Janvier 2001 portant Constitution, modifiée, article 60, article premier de la  loi constitutionnelle n° 2016-10 du 05 avril 2016 portant révision de la Constitution, JORS, numéro spécial 6926 du 07 avril  2016, p. 505), article modifiant et remplaçant l’article 60.
Les plus jeunes des anciens pourraient se souvenir également du différend avec Mamadou Fall Puritain qui était sorti des rangs dans les années 80. Il avait pu siéger comme député indépendant. Mimi n’a pas eu cette chance : elle perdu son statut de députée, à 10 voix contre 6. Le Pds s’était déjà solidarisé avec la majorité “pour être logique avec ses statuts qui voulaient qu’un député qui quitte sa formation de base perde son mandat parlementaire au profit du parti qui l’a élu“. Un glissement a été observé pour les cas de Madické Niang, Omar Sarr et Ahmet Fall Braya en particulier, la collusion avec l’ennemi : Madické Niang, candidat devant le candidat libéral officiel,  Omar Sarr et Ahmed Fall Braya annoncés chez Macky Sall ont été exclus, leur geste ayant été assimilé à une démission de fait.
De même, lorsque le Parlement sénégalais a rejeté, le 15 décembre 2022, une motion de censure déposée contre le gouvernement par la coalition Yewwi Askan Wi, le Parti démocratique sénégalais s’est rangé du côté d’une majorité tellement à l’étroit qu’elle n’avait été sauvée que par une voix, celle de Bokk Giss Giss de l’ancien maire Pape Diop, dissident du Pds ; aux dires des députés libéraux, ils n’avaient “pas été associés à la démarche” et ont conséquemment voté contre.
Depuis, le rapprochement avec Benno semblait dans l’air, jusqu’à ce fameux 05 février avec la loi N° 4/2024 votée par l’Assemblée nationale, en sa séance de ce jour demandant le renvoi de l’élection du 25 février en attendant que quelques vérifications soient faites.

Curieux retour du boomerang : cette fois-ci, c’est la majorité qui se fait solidaire des Libéraux ulcérés par le rejet de la candidature de leur inamovible mais impossible champion, Karim Meïssa Wade; le Pds suspectait quelque dol et n’a pas hésité d’ailleurs à crier haut et fort que quelque magistrat du Conseil constitutionnel aurait pu être éclairé dans sa décision par un tiers qui ne voulait pas de Karim comme candidat à la Présidentielle. L’anéantissement des efforts pour ce grand investissement par la décision 1/C/2024 du 15 février Conseil constitutionnel ne devrait pas être un frein à cette coalition Benno-Pds née sur les bancs de l’Assemblée.

Pathé MBODJE