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Non-orientation des bacheliers: Le Gouvernement s’entête à sacrifier des générations Par Charles Thialys SENGHOR, Desk central, Le Devoir

Près de 2.500 étudiants attendent toujours leur orientation

Malgré les dénégations du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, près de 1.500 bacheliers des années 2019 et 2020 continuent de réclamer leur orientation. Un retour à la case départ sacrifie des centaines de bacheliers et va à l’encontre de la volonté du président Macky Sall qui, dès son arrivée à la magistrature suprême, a mis fin à la mise à l’écart de nombreux bacheliers.

Pendant de longues années, les bacheliers éprouvaient d’énormes difficultés au Sénégal pour poursuivre des études supérieures. Il y en avait même qui s’arrêtaient au baccalauréat à cause des places limitées au niveau du supérieur. Mais, à son arrivée à la magistrature suprême, en 2012, le président Mack Sall, peiné par une telle situation injuste, a trouvé la géniale idée d’orienter tous les bacheliers dans les universités publiques et dans les instituts privés ou écoles d’enseignement supérieur.

Négligence

Mais cette formidable trouvaille, initiée à l’ouverture académique de 2013, se heurtera à la négligence de l’État qui manquait à ses obligations d’honorer ses dettes vis-à-vis de ses partenaires. Aujourd’hui, il doit près d’une dizaine de milliards de Fcfa de dettes à ces écoles et instituts, dans la période de 2013 à 2018. Le 27 juillet 2020, veille de la dernière Tabaski, ces écoles partenaires ont reçu seulement 50% du reliquat des 4,9 milliards de Fcfa votés dans le budget de l’État.

Les dettes de la rupture

Asphyxiés par les banques qui n’arrivaient pas à entrer dans leurs fonds à cause du comportement d’un État mauvais payeur, les responsables des écoles et instituts privés d’enseignement Supérieur sont entrés dans un bras de fer. Cheikh Oumar Ann, qui venait de remplacer Mary Teuw Niane à la tête du département, à force de menaces, a fini par rompre le fil du dialogue en décidant de retourner, pour l’ouverture de 2019-2020, tous les bacheliers dans les universités et instituts publics du Sénégal. Mais, ce retour à la case départ n’est pas la vraie solution. Elle continue d’exacerber les tensions.  Puisque malgré les dénégations du ministre de tutelle, des centaines de bacheliers, impuissants, désabusés errent toujours dans les rues du Sénégal parce qu’ils ne sont pas orientés et ne savent plus à quoi s’en tenir, ne pouvant pas se payer une formation dans les écoles de formation privées.

Au total, 1.489 bacheliers regroupés au sein d’un collectif réclament leur orientation. Mais, ils n’ont toujours pas trouvé une oreille attentive à leurs nobles doléances. Leur dernier espoir vient d’être « anéanti », selon leurs propres termes, par Amadou Abdoul Sow, directeur général de l’enseignement supérieur, qui leur a annoncé qu’aucun parmi eux ne sera orienté parce que les universités n’ont plus de place. Cette posture est « incompréhension » pour Joachim Diatta et ses camarades dont le seul « péché » est de réclamer un droit à étudier.

Vers une confrontation

Mais Cheikh Oumar Ann et ses services ne perdent rien pour attendre puisque ces bacheliers ne vont pas se laisser abattre sur l’autel de la « négligence » dont ils se disent victimes parce qu’ « il s’agit ici d’un droit élémentaire ». Ils promettent de passer à la vitesse supérieure et d’utiliser tous les moyens à leur portée, d’autant plus que le président de la République a ordonné, « lors du conseil des ministres de ce mercredi 7 octobre 2020, l’orientation de tous les bacheliers y compris ceux restant au titre de 2019 et ceux attendus pour la session 2020 ».

Avec la posture de ces bacheliers, il est certain qu’une confrontation est inévitable puisque le ministère de tutelle est catégorique. Cheikh Oumar Ann a déclaré le 28 novembre dernier que les allégations selon lesquelles des centaines de bacheliers de l’année 2019 ne seraient pas orientés dans les universités publiques étaient non fondées. Parce que « le ministère n’a reçu que 13 réclamations qui sont toutes infondées ». Autrement dit, il nie l’existence de ces bacheliers non orientés qu’il voit pourtant tout le temps manifester.

Le Devoir