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Madia Diop: Le Petit Père des travailleurs était aussi un ardent africaniste

Bamako, refuge, a développé le sentiment d’amitié et de solidarité  des combattants pour la dignité des dominés

Député, Secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal 1982-2001, Madia Diop né le 3 octobre 1928 à Bambey (Région de Diourbel) est décédé à Dakar le 11 novembre 2008.
Comptable, on retient surtout le syndicaliste et l’homme politique sénégalais. Ancien membre du Parti socialiste (PS),  Madia Diop a longtemps été le secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (CNTS) ; il fut un militant du panafricanisme syndical et l’initiateur de la « participation responsable ».
Madia Diop est le petit-fils de Séga Diallo, ancien érudit de l’Islam. Son grand-père a su représenter El hadji Malick Sy dans l’éducation de l’Islam à travers le Sénégal. Madia Diop a su appréhender le leadership à travers les écoles que ses descendants avaient fondées à Bambey. De même que sa maison natale, vous y trouverez un puits qu’il a creusé pour la communauté de Bambey (les traces de Séga Diallo sur la nationale,  en allant à Mbacké). Les parents de Madia Diop sont enterrés à Mbacké,  là où est sa maison paternelle.
Le jeune Madia travaille très tôt  avec son père, Malick Diop alors employé à la maison de commerce Vézia, avant de monter à Dakar où il est employé de commerce.
En 1947, il est recruté aux chemins de fer à Thiès, à 70 km de Dakar, et se forme à l’action syndicale sous la férule de Biram Touré, un leader prématurément disparu vers la fin des années 40. Madia Diop jure ainsi de suivre la voie tracée par ce cheminot à qui il vouait presque un culte.
En 1951, il est embauché comme comptable à la Société des Brasseries de l’Ouest africain (SOBOA) et en devient trois ans plus tard le délégué syndical. En 1957, il conduit sa première grève qui dure 23 jours. En même temps que le syndicalisme, il tâte de la politique au milieu des années 50 dans un petit parti : l’Union démocratique sénégalaise (UDS), une branche locale du Rassemblement démocratique africain (RDA) très puissant en Côte d’Ivoire, en Guinée et au Mali.
En 1958, il rejoint le Parti du regroupement africain/Sénégal (PRA/Sénégal) qui prône le ’’Non’’ à la Communauté entre la France et les pays de l’ex-AOF (Afrique occidentale française) et revendique l’indépendance au référendum du 28 septembre.
Sous le régime du président Léopold Sédar Senghor, Madia Diop va se distinguer comme un opposant irréductible. En 1963, il est sur la liste de l’opposition pour les législatives du 1er décembre. Ces élections tournent mal ; la troupe tire sur la foule qui manifeste et fait une dizaine de morts. Un policier figure parmi les victimes. Madia Diop, l’un des principaux meneurs de la manifestation, est accusé du meurtre.
Condamné à 20 ans de travaux forcés, il réussit à s’enfuir du Sénégal en janvier 1964. Déguisé en mécanicien, il rejoint le Mali à bord d’un train. Commence alors pour lui un exil qui va durer 2 ans et 7 mois. Le 13 juin 1966, lorsque ses camarades du PRA Sénégal réintègrent la parti de Senghor, l’Union progressiste sénégalaise  (UPS), son exil malien n’a plus de raison d’être. Il rejoint Dakar après avoir été gracié.
En juillet, son syndicat, la CNTS,  rejoint l’Union nationale des travailleurs du Sénégal (UNTS) dirigée par Doudou Ngom. Ce dernier est absent de Dakar lorsqu’en mai 1968, le pays est secoué par le mouvement de revendication des étudiants relayé par les travailleurs.
Madia Diop est parmi les dirigeants de l’UNTS qui lancent le mot d’ordre de grève des travailleurs. Il est arrêté avec ses camarades et interné dans un campement militaire à Diodji à 250 Km de Dakar, tandis que l’Unts est dissoute par Senghor.
A la place de l’UNTS, la CNTS voit le jour avec la bénédiction du pouvoir. Dans le cadre de la ‘’participation responsable’’, le syndicat réduit ses exigences. En échange, le régime lui accorde des postes de ministres et de députés. Après avoir hésité un moment, Madia Diop finit par adhérer à la CNTS en se convainquant de se battre à l’intérieur du syndicat et non en dehors.
En 1970, il est élu secrétaire général de la CNTS de Dakar et restera à cette fonction jusqu’au départ de la présidence de Senghor en 1980. Dès l’arrivée de Abdou Diouf comme président de la République, Madia Diop crée au sein du syndicat un mouvement interne de contestation dénommé ‘’renouveau syndical’’ qui est dirigé contre le patron national de la Cnts de l’époque, Babacar Diagne. Ce mouvement s’oppose également à la règne de participation de deux membres du syndicat au gouvernement.
Lorsqu’il accède à la tête de la Cnts lors du congrès d’avril 1983, il change les termes de la collaboration qui permettent au secrétaire général de devenir ministre. Mais le syndicat garde toujours un membre dans le gouvernement. Devenu un des barons du Parti socialiste, il intègre le Bureau politique et devient membre du directoire du candidat Abdou Diouf pour l’élection présidentielle de 1993.
En 1993, il est à la point de la grève générale contre le plan d’austérité ‘’Sakho-Loum’’, du nom des ministres de l’Economie (Pape Ousmane Sakho) et du Budget (Mamadou Lamine Loum).
Alors que l’autorité de Madia Diop commençait à être contestée au sein de la CNTS, plusieurs responsables de centrales affiliées sont destitués. Il réussit à obtenir des concessions de la part du gouvernement et se désolidarise, en juin 1999, de la grève déclenchée par l’Union nationale des syndicats autonomes du Sénégal (UNSAS) pour une hausse des salaires.
Membre du directoire de campagne du président Abdou Diouf, lors de la présidentielle de 2000, en même temps que trois autres membres de la CNTS, Diop s’éloigne progressivement de la direction du Parti socialiste, après la défaite de mars 2000. Il est remplacé à la CNTS en novembre 2001 par Mody Guiro. Depuis lors, Madia Diop était le président d’honneur de la centrale.
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