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L’infertilité dans les couples sénégalais: Dix à quinze pour cent des couples se font consulter Par Aminata SARRE

Au Sénégal, nombreux sont les couples qui font face à l’infertilité. Une situation très mal vécue par les femmes au sein de leur ménage car elles font objet de moqueries et de jugements par leur entourage.

L’infertilité se définit comme cette incapacité qu’une femme a de mettre au monde un enfant dans de bonnes conditions, après douze mois de rapports réguliers sans contraception. L’infertilité peut toucher la femme comme l’homme, un fait que semble ignorer beaucoup de personnes qui pointent du doigt les femmes.

Au Sénégal, 10 à 15 pour cent des couples se font consulter pour infertilité ; également, les femmes se consultent plus tard. Une situation qui n’est pas sans conséquence parce qu’il y a le problème de l’âge, principale gêne dans le domaine de l’infertilité.

Aujourd’hui, une femme de 20 ans a beaucoup plus de chances de grossesse qu’une femme de 40 ans. Il est donc conseiller de se faire consulter tôt.

Cette dame nous raconte son histoire sans tabou ; elle nous confie : « Je me suis marié à 17 ans ; maintenant j’en ai 35 et je n’arrive toujours pas à avoir un enfant. Mon couple a connu des hauts et des bas, je me suis fait insulter par ma belle-famille qui a poussé mon mari à épouser une deuxième femme. Ce cauchemar, je le vis au jour le jour tout en sachant très bien que le fait de ne pas concevoir un enfant venait de mon mari. Au début,  je ne pensais même pas aller faire une consultation à l’hôpital, j’allais voir les marabouts qui me donnaient toutes sortes de médicaments car je pensais que le problème venait de moi. Mais c’est après plusieurs tentatives que j’ai décidé enfin de me faire consulter  auprès d’un gynécologue qui m’a fait savoir que tout allait bien et que le problème pouvait se situer au niveau de mon mari. »

Elle poursuit toujours : « J’ai alors convaincu mon mari d’aller se faire consulter. Une fois chez le gynéco, il lui a fait savoir qu’il était la source de mon infertilité. Depuis lors je suis dans un dilemme. Je regrette de ne pas partir me faire consulter plus tôt : peut-être je n’en serais  pas là ».

L’infertilité occupe aussi les hommes. Plusieurs causes d’infertilité dans un couple ont une origine masculine. Si les femmes sont les premières à être pointées du doigt  quand l’enfant se fait attendre, il est aussi conseillé aux hommes de se faire consulter pour détecter le problème.

Au Sénégal, il existe un fait réel avec cette situation. Elles sont nombreuses les femmes qui cherchent une solution à leur problème en s’adressant d’abord à leurs proches qui leur conseillent d’aller vers des marabouts. « Beaucoup de familles évoquent des causes surnaturelles, et amènent leurs filles vers des marabouts avant même de penser  à se rendre chez un spécialiste »,  témoigne K. Ndiaye.

De l’incompréhension,  de la colère, de la rancune, de la frustration, de l’injustice, beaucoup de sentiments se succèdent et personne ne peut comprendre. La honte de ne pas être comme tout le monde s’installe. Envahi par le complexe de son infertilité, le couple se renferme dans la solitude. Chacun essaye, espère, attend et recommence, et chaque tentative devient de plus en plus difficile à gérer ; ne pas concevoir un enfant est souvent synonyme de honte, de tabou.

L’impossibilité de mettre au monde un enfant est vécue comme un drame ou une malédiction. Tous les couples infertiles ne sont pas assez solides pour surmonter cette épreuve difficile et certains d’entre eux  finissent par se séparer.

Autant de témoignages de victimes montrent que l’infertilité est un fléau qui crée beaucoup de malheureux au Sénégal ; elle est la base de la destruction de nombreux mariages et souvent ce sont les femmes qui paient les pots cassés. Ces femmes qui vivent dans l’ombre d’un enfant se voient ainsi diaboliser par cet entourage qui devrait les soutenir dans l’épreuve.