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Le Vilane nouveau est arrivé: Le Parti, son statut et son futur valent toutes les batailles, même contre Macky Sall P. MBODJE

Seule Aminata Mbengue Ndiaye, « la roche-mère qui nous supporte tous », trouve grâce à ses yeux

Il ne faut pas se fier à ses paroles lorsqu’il affirme que « le parti au-dessus de tout, c’est obsolète » et qu’il croit en Benno et à la grande coalition : la rupture est évidente entre ce qu’il dit ce vendredi 21 mai et la bataille de Ndoucoumane qu’il a entamée en ce début de mois pour laquelle un ange est passé au sein de la coalition au pouvoir « gênée » par la diatribe de mai à Kaffrine, animée par Abdoulaye Vilane et ses amis cadres.

Certes, Sur Warref, ce jeudi 20, Vilane a pris de la hauteur : interpellé sur les candidatures à Kaffrine, il a souhaité laisser les problèmes au niveau micro pour une tribune plus locale, pour par exemple titiller un peu l’initiateur du forum sur l’emploi sauvé par le gong mais qui n’a pas donné plus de considération à ces grands électeurs dans le décompte des ouailles. Ce fut subtil. Et en droite ligne de cette agitation extrême qui l’anime depuis l’arrivée de Abdoulaye Sow au gouvernement, et après le subit accès d’un Serigne Mbaye Thiam, en octobre 2020, de disant né pour diriger le Parti socialiste (Ps).

À l’entendre parler, on comprend mieux le dogmatisme du président Mamadou Dia sur la primauté du Parti qui avait conduit à la crise de 1962 ; on saisit également mieux la logique de la discrimination positive de Senghor manifestée par cette décision à l’apparence anodine mais qui résumait le culte de la différence par la préférence : « Plutôt ceci ici que cela là-bas, ce qui eût pu paraître curieux ».

On comprend mieux les batailles de Abdoulaye Vilane contre ses camarades, ses adversaires, ses ennemis traduites aujourd’hui après le départ heurté d’un Khalifa Ababacar Sall, d’une Aïssata Tall Sall, d’un Barthélémy Dias ou d’un Malick Noël Seck : l’avenir du Parti socialiste et de son statut valent toutes les guerres, même contre Macky Sall et celui qui doit « régler d’abord sa situation à Keur Madiabel » ; il entend les mener en laissant sur place la « roche mère » qu’est Aminata Mbengue Ndiaye sur laquelle il faut « s’adosser ».

Sa démarche s’inspire un peu de l’histoire du Parti socialiste français à la traîne depuis Mitterrand avec cette folie de vouloir être « tous candidats ». Si les idées « procèdent du parti », chacun doit d’abord militer chez lui et dans le pays en ratissant le large possible mais en s’adossant sur le Parti : Vilane est « socialiste collé aux autres, avec d’autres ».

Le Vilane nouveau est donc arrivé, par totalement différent de celui d’hier mais outré par l’ingratitude manifestée par « des actes politiques et politiciens qui sont posés et qui ne s’accommodent pas à la loyauté dans un compagnonnage ». S’il attaque et cogne donc, c’est que ceux d’en face l’auront voulu pour avoir franchi le Rubicon en le titillant de l’intérieur et de l’extérieur par celui qui se croit appelé, au mépris de la discipline de parti, et celui qui se croit bien assis désormais pour se révéler dans toute sa réelle nature ingrate.

Si, comme le soulignait un rédacteur du Devoir le 10 mai dernier, « les Sénégalais retiendront toutefois de lui son côté bagarreur, ses diatribes, ses salives de mots outranciers, son regard hypnotisant », Abdoulaye Vilane n’est « ni dupe ni naïf » : après avoir aidé à asseoir l’autorité du chef à l’interne et dans la cadre de la cohabitation, après la déstructuration-reconstruction du Ps, « mon combat, c’est l’avenir du parti, l’avenir du Sénégal ».

D’une reconstitution du « combat des aînés et des résultats engrangés », il veut prendre date à partir de la rencontre du jeudi 20 mai : il mènera la dernière bataille de « la renaissance du parti en ratissant le Sénégal ».

Que fait-il alors de la réaction éventuelle du pouvoir ?

« Il entendra de partout la voix de la raison et ferait bien de l’écouter : je ne suis pas Malick Gakou, je ne suis pas Déthié Fall, je ne suis pas Thierno Bocoum, je ne suis pas Aliou Sow, je ne suis pas Modou Diagne Fada ».