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La Ligne du Devoir

Khalifa Sall dans le macquis ? Et s’il entamait un travail d’Hercule pour reconstituer la famille socialiste ? Par Habib KÂ, chef du bureau régional de Matam, Thilogne

Les faits de tous les jours ont démontré que la transhumance n’a jamais servi son homme puisqu’à tous les coups, il perd des plumes.

Khalifa Sall en est suffisament averti, et il n’a aucune excuse : ou il se démarque, et nettement il travaille, comme le dernier Mohican, à la reconstruction de la grande famille socialiste, ou il se laisse séduire par les sirènes apéristes et sombre pour toujours.

La radicalisation politique à un prix : des sacrifices énormes à concéder. C’est, pour n’avoir pas suivi feu Ousmane Tanor Dieng dans sa volonté effrénée d’arrimer le Parti socialiste à la locomotive Macky Sall, que Khalifa Ababacar Sall fut inculpé, jugé et condamné, puis exclu du parti avec 64 de ses compagnons d’infortune alors qu’il était incarcéré à la prison de Rebeuss.

Qui aurait cru un jour Idrissa Seck et Macky Sall se faire des accolades dans la maison du Parti socialiste, sous les vivats et applaudissements  des Verts de Colobane, Khalifa en prison ?

L’ancien maire de Dakar avait  toute raison sur ses frères de parti. Que l’UPS/PS, héritier du Bloc démocratique sénégalais (BDS) de Léopold Sédar Senghor, Mamadou Dia, Diaraf Ibrahima Seydou Ndaw, Valdiodio Ndiaye, 40 ans ininterrompus aux affaires, ne pouvait se saborder pour être un parti de contribution, porteur de valise du président Macky Sall et ceci, tant que celui-ci  juge nécessaire de convoiter les suffrages des Sénégalais pour sa réélection.

La transhumance est une voie sans issue ; les fruits de la cohabitation sont là, palpables. Ousmane Tanor Dieng, secrétaire général confiné au Haut conseil des Collectivités territoriales (HCCT) chargé de calmer les ardeurs des militants socialistes,  Aminata Mbengue Ndiaye, présidente des femmes et Serigne Mbaye Thiam, d’éternels ministres, en conflit depuis la disparition de leur chef, pour le poste du HCCT via celui du SG du parti. Bamba Fall, entre deux, isolé, sur le point de perdre le fauteuil  de maire de la Médina, Aïssata Tall Sall, complètement étrange, aphone, sans oublier le tonitruant porte parole du parti, député maire de Kaffrine qui risque d’être balayé par le jeune fougueux ministre de l’Habitat Abdoulaye Saydou Sow. Le maire de Ourossogui, Moussa Bocar Thiam, devenu APR,  est nommé Agent judicaire de l’État, le temps de déposer ses baluchons et atrendre les résultats des élections municipales prochaines.

Khalifa Sall est donc suffisamment averti.  Il lui faut se démarquer et nettement tracer sa voie. Ou suivre les sirènes apérienes et, comme les autres, sombrer.

Ou se poser en héritier des prédécesseurs du socialisme et alors travailler en beauté malgré la dureté de ce choix pour une nouvelle culture du socialisme, un nouveau mode d’engagement.

Khalifa Ababacar Sall est connu pointilleux, modéré, courtois, pacifique, un gentleman en politique. Ce qui fait son charme et certainement aussi ses défauts. La politique, surtout quand c’est celle de l’opposition, exige une certaine radicalité, du cran, une nette démarcation des lignes adverses. Peut-être aussi c’est sa qualité de militant des Jeunesses socialistes fomaté dans une école d’excellence, l’école du parti,  qui lui a donné ce caractère très trempé dans le respect des institutions et la pondération dans ses relations avec les autres, sans pour autant être signe de faiblesse.

Khalifa Sall s’est-il compromis lors de son emprisonnement ?

A-t-il flanché ? Il est sorti dans des conditions troubles, bénéficiaire d’une grâce présidentielle qu’il dit n’avoir jamais demandée. Toutefois, sa conférence de presse avait suscité doute et suspicion dans l’esprit de beaucoup de militants et sympathisants qui craignaient un deal semblable au scénario de la libération de Karim Wade, son exfiltration de la prison de Rebeuss vers le Qatar.

Qu’il en soit conscient, son temps de présidentiable est désormais compté, même s’il se sent encore plein de ressources pour l’être. Il est temps pour lui de passer le flambeau, d’organiser et structurer Taxawu Senegal.

Khalifa Sall doit rester ce trait d’union de l’opposition, un fédérateur et facilitateur du dialogue politique de l’opposition, même s’il traîne une jambe plombée.

Son avenir se trouve aussi dans la continuité de préserver le patrimoine du socialisme dont il est aujourd’hui le dernier des Mohicans, pour dire le gardien incontestable  du temple. Socialiste.