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Football : Une grande équipe, c’est la défense

Une grande équipe,

c’est d’abord

une grande défense !

Merci à son Excellence l’Ambassadeur, M. le Ministre Dr Papa Abdoulaye Seck, pour l’analyse pertinente de la victoire du Maroc sur l’Espagne et des enseignements à en tirer pour le football en général et l’équipe du Sénégal en particulier.

Puskas
Kocsis

Vous me donnez en même temps l’occasion, après avoir laissé notre peuple bien digérer l’élimination en 8eme de finale de la Coupe du monde suite la défaite contre l’Angleterre de fort belle manière, en tant que peuple connaisseur et fair-play, d’estimer le moment  venu de commencer le diagnostic ex-post de notre équipe nationale, de son jeu, de sa stratégie, de sa tactique, de ses forces, de ses faiblesses et surtout des chantiers à engager illico presto, pour rectifier et en faire une équipe plus performante.
De ce point vue, je vais commencer par la défense, puisque elle a eu une part déterminante dans les contre-performances du Sénégal, en particulier, lors des deux défaites dans cette coupe du monde, contre les Pays bas et contre l’Angleterre .
Vous me permettrez chers amis, dans cette réflexion d’un amoureux du football, d’un Saint-louisien qui, à force d’écouter et de suivre durant mon adolescence, ce monument du football sénégalais, africain et mondial, que fut feu Mawade Wade, paix a son âme, a fini par parler de cette discipline comme un « connaisseur».
Mawade Wade, tous ceux qui l’ont connu ou approché le savent, était un partisan fervent du football offensif, d’attaque, de conservation du ballon, du beau jeu groupé et de déséquilibre partant  de la défense. Il était fondamentalement contre les systèmes défensifs appelés « béton » ou « catenaccio. » dont les spécialistes étaient principalement les Italiens et les Uruguayens.

Cruyff

En tant adepte de l’école hongroise des années 1950, des Puskas et Kocsis, qui révolutionna le football avec le système du 4-2-4, de la défense en ligne, du jeu groupé de déséquilibres avec des triangles mobiles, offrant ainsi au porteur du ballon chaque fois, au moins, deux possibilités de passe. Cette grande équipe de Hongrie a lors de la Coupe du monde de 1954 balayé tout sur son passage, pour être finalement stoppée à le surprise générale par l’Allemagne. L’école hongroise est la génitrice, 20 ans après, du football total inventé par l’Autrichien Riunius Michels avec l’Ajaax, la Hollande de 1974 et 1978, puis Joan Cruyff avec le Barca.

Contrairement Mawade, qui proclamait urbi et orbi que la meilleure façon de se défendre est d’attaquer, je défendrai la défense, je parlerai de défense et de la bonne défense, comme une condition nécessaire pour prétendre à accéder au plus haut niveau, pour aspirer à gagner une coupe du monde. .
Défendre en général et en football en particulier, est en même temps une stratégie et une tactique.
Une stratégie parce qu’n peut opter comme l’Atletico de Madrid ou le Maroc de faire un bloc bas a médian pour l’essentiel comme système de jeu et placer des contre-attaques.
Une tactique, selon les péripéties du match, choisir de laisser le ballon à l’adversaire et s’adapter à des conditions de temps faibles.
Défendre, c’est chercher à récupérer les ballons devant l’adversaire, c’est écarter le danger devant son camp.
Être défenseur, c’est d’abord être un bon athlète en termes de condition physique, de puissance, de vitesse, de résistance, d’endurance, de détente, de timing, d’anticipation, de vigilance et de concentration.
Défendre en football, c’est protéger sa cage pour qu’elle ne soit pas violée, éloigner le danger de ses buts.
Défendre n’est pas dégager le ballon uniquement, c’est-à-dire l’éloigner momentanément de sa surface de réparation, c’est aussi le récupérer, le conserver le plus longtemps possible en vue de relancer le jeu et d’attaquer .
Défendre en football, c’est d’abord l’affaire du gardien de but, ensuite des défenseurs, mais aussi, des autres, de toute l’équipe, les mileux récupérateurs, les excentrés et les attaquants.
Tout le monde défendre dans une équipe, par le marquage individuel, la défense de zone, ou le pressing permanent ou intermittent sur les adversaires, les défenseurs en particulier.
Les défenseurs doivent être capables techniquement de faire un marquage, strict ou de zone, sur les adversaires sans faire beaucoup de fautes dangereuses, de conserver le ballon et de relancer proprement.
Les meilleurs défenseurs doivent être non seulement d’excellents athlètes, mais aussi de bons techniciens, de bons manieurs de ballon, de bons contre-attaquants, à l’instar des Bouba Diakhao (ci-contre), Moustapha Dieng, Yerim Diagne, Petit Gueye, Edouard Niacadia, Malick Diallo, Abdoulaye Guèye, Eusebio, Bosquier, Diakhou Gaye , Roger Mendy, Mamadou Tew, Abdoulaye Ba, Oumar Daf, Ferdinand Coly, Kalidou Koulibaly, etc.
Une bonne défense commence par un gardien exceptionnel comme Bounou du Maroc.
Si, en 2002, le Sénégal a pu battre la France en match d’ouverture de la Coupe du monde, résister au Danemark et à l’Uruguay et battre en 8eme de finale la Suède et nous qualifier en quarts de finales, nous le devons pour beaucoup à une bonne défense et surtout aux arrêts exceptionnels de notre gardien Tony Sylva.
Edouard Mendy, en baisse de forme durant cette coupe du monde, a pourtant été décisif dans la victoire finale à la CAN et la qualification à la Coupe du monde et la victoire en Ligue des Nations de Chelsea.
Une grande équipe n’encaisse pas beaucoup buts et qui n’encaisse pas, ne perd pas .
Une équipe qui ne sait pas résister et verrouiller sa défense dans ses temps faibles et être efficace dans ses temps forts ne peut pas prétendre à gagner une Coupe du monde .
Contrairement à ce que beaucoup pensent, le Sénégal n’est pas une équipe forte en possession du ballon, une équipe joueuse, c’est une équipe de contre-attaques et de balles arrêtées ; nous sommes de ce point de vue, dans notre style de jeu, plus proches des Italiens que des Espagnols du Barca ou de l’Equipe du Brésil de 1970 ou 1982.
Notre équipe de 2002 avait individuellement des joueurs extrêmement talentueux et elle demeure selon moi, au plan intrinsèque, notre meilleure équipe de tous les temps, même si elle n’a pas gagné de trophée.
Mais le seul fait qu’elle ait eu le meilleur classement en Coupe du monde, en accédant aux quarts de finale, peut étayer mon affirmation.
Elle comportait en son sein au moins huit joueurs de classe mondiale : Tony Sylva, Ferdinand Coly, Oumar Daf, Salif Diao, Kalilou Fadiga, Elhadj Diouf, Henry Kamara, Pape Bouba Diop.
Pour conclure avec le Maroc, je pense que si cette équipe avait un attaquant de classe mondiale comme Sadio Mane ou Mouhamed Salla, un véritable leader et surtout « un tueur » devant les buts, je parierais sur lui pour la victoire finale.
Pour finir, je pense à mon sens que le chantier le plus urgent à explorer pour faire de notre équipe nationale une équipe du haut niveau mondial surtout capable de conserver la CAN en 2024 est et demeure la défense.

Youssou DIALLO
Président du Club Sénégal Émergent