GMT Pile à l'heure

La Ligne du Devoir

Dembo Sakho, membre fondateur de l’Alliance Pour la République: « La politique, c’est comme un véhicule en panne… » Entretien dirigé par Sergio RAMOS

Découragé par la pratique politique dans nos tropiques, Dembo Sakho, membre fondateur de l’Alliance pour la République, préfère aujourd’hui se donner entièrement à ses propres affaires. Selon lui, la politique est à l’image d’un véhicule en panne. Pour autant, ce conseiller municipal à la Sicap garde un œil sur la politique. A l’en croire, le nouveau code électoral permettra de respecter le choix des citoyens avec le suffrage universel direct. M. Dembo Sakho, qui ne tarit d’éloges pour Ousmane Sonko, même s’il lui conseille de ménager sa fougue de jeunesse, n’en pense pas moins qu’au terme de son examen, Karim Wade et Khalifa Sall retrouveront leurs droits civiques.

M. Dembo Sakho, en tant que membre fondateur de l’Apr, on ne vous entend plus alors que vous militiez dans les Sicap. Avez-vous abandonné la politique ?

Bonjour, j’ai commencé à faire de la politique en 2008 quand le président Macky Sall fut président de l’Assemblée nationale ; pour des raisons politiciennes, il a été comploté et sorti de la tête de cette institution parlementaire. C’est cette injustice qu’il a subie qui nous avait motivé à l’époque, avec des amis de la Sicap, à nous rapprocher de lui pour le soutenir dans le combat de la restauration de la démocratie. Ce qui a valu la naissance de l’Apr le premier décembre 2008.

En 2009, nous avons dirigé avec un ami Nazir Bankolé la liste électorale de Dekkal Ngor à la Sicap pour être élu conseiller municipal. Donc je fais partie des premiers élus locaux que l’Apr a connus. On s’est battu corps et âme pour élire le président Macky Sall en 2012. Malheureusement, la politique au Sénégal, comme on l’a connu, « c’est un véhicule en panne. On le pousse pour le dépanner, mais une fois qu’il démarre, il ne s’arrête pas pour te prendre. Il va prendre ceux qui sont sur son chemin ». C’est ce que j’avais constaté au bout de six mois de l’exercice du pouvoir du président Macky Sall, quand il a limogé Alioune Badara Cissé, coordonnateur général de l’Apr d’alors de la tête du ministère des Affaires étrangères. Alors là, j’ai porté le combat pour rappeler au président que les causes et les principes démocratiques pour lesquels nous avons fondé l’Apr sont totalement en train d’être bafoués. C’est ce qui m’a valu mon éloignement de mes camarades de l’Apr.

Entre-temps, j’ai essayé de toujours participer dans la vie politique de mon pays en m’alliant avec d’autres dynamiques pendant les élections législatives de 2017 avec l’ACT où j’ai eu des déceptions encore, et en 2019 avec Madické2019 où j’étais dans le directoire de campagne. Voilà en résumé mon parcours de militantisme politique.

Maintenant où militez-vous et pourquoi ?

Là je n’en peux plus. J’ai arrêté la politique du militantisme de parti pour m’investir dans le mouvement sportif. Ensuite j’ai déménagé de la Sicap pour m’installer aux Hlm Grand-Yoff avec ma petite famille. Donc c’est là-bas que je me suis inscrit sur les listes électorales. Au moment où je parle, je ne sais pas encore quelle liste électorale je vais soutenir aux élections locales prochaines, mais j’ai des projets à caractère sportif à faire profiter dans ma commune.

On va vers le vote du code électoral avec beaucoup de points de désaccord entre pouvoir et opposition dont les affaires Karim Wade et Khalifa Sall. Qu’en pensez-vous ?

Je pense que le point le plus important de cette nouvelle loi électorale est la disposition qui permet à celui qui occupe la tête de liste majoritaire d’être maire une fois que sa liste remporte l’élection. Car, avec l’ancienne loi électorale relative aux élections locales, beaucoup de suffrages des Sénégalais ont été détournés parce que la tête de liste pour qui ces Sénégalais ont voté n’a pas finalement été maire de cette commune. Quant aux cas Karim Wade et Khalifa Sall, je pense qu’une fois que cette nouvelle loi électorale est votée, ils vont être rétablis dans leurs droits civils et civiques.

Les élections locales arrivent dans moins d’un an. A votre avis, comment les uns et les autres devraient se comporter pour réussir à préserver la paix sociale du pays ?

Le facteur le plus fondamental pour préserver la paix sociale du pays avant, pendant et après les élections locales prochaines est de respecter les règles démocratiques. En premier lieu restaurer tous les chefs de partis dans leurs droits civils, civiques et politiques. Car je ne souhaite pas que ce qui s’est passé brutalement au mois de mars dernier dans le pays soit renouvelé.

Dakar reste une ville particulièrement très disputée. Comment la majorité présidentielle devrait s’y prendre pour ne pas être surprise par une opposition disposée à lui barrer la route ?

Lol. Moi je ne suis ni du camp présidentiel, ni du camp de l’opposition. Ce n’est pas à moi de leur définir leur stratégie de conquête de la ville de Dakar. Mais tel que je lis le déroulement de la scène politique à Dakar, les responsables politiques les plus aptes à diriger la ville à mon avis dans le camp présidentiel c’est Abdoulaye Diouf Sarr maire de Yoff, pour avoir été le seul responsable de l’Apr à avoir gagné sa commune en 2014 parmi les 19 communes de Dakar. Ensuite Alioune Ndoye maire de Dakar-Plateau, mais lui a rejoint la mouvance présidentielle après avoir été élu sous la bannière de « Taxawu Dakar ». Il y a un jeune plein d’énergie et qui ose prendre des initiatives innovantes qui peuvent changer et améliorer le cadre de vie de la ville de Dakar. Il s’agit d’Abdou Karim Fofana, ministre chargé du suivi du PSE.

Il faut tenir compte d’une chose, beaucoup de communes sont paralysées par le pouvoir central du fait que leurs maires sont dans l’opposition. La politique de développement des localités étant liée à la politique du Président de la République, il faut que les élus locaux apprennent à collaborer avec le pouvoir central pour profiter des politiques publiques de décentralisation. Mais se radicaliser à tout bout de champ n’amène à rien nos maires et présidents de conseil départemental.

Que pensez-vous du phénomène Ousmane Sonko dans le champ politique et de sa fulgurance politique ?

Je pense que le Sénégal a besoin de lui et il faudra le protéger. Il porte en lui un combat nationaliste d’éveil de conscience que tout sénégalais devrait approuver. C’est un homme engagé et déterminé non seulement pour l’effectivité de l’indépendance du Sénégal, mais pour la restauration des valeurs de la République aussi. Mais je pense qu’il a intérêt à gérer un peu sa fougue de jeunesse, en respectant aussi nos institutions et en premier lieu le Président de tous les sénégalais.

Je ne suis pas de ceux qui pensent que le Président Macky Sall a l’intention de faire un troisième mandat qui risquerait de brûler le pays et de le rendre ingouvernable en 2024. Car pour moi, le référendum de 2016 a déjà tranché sur la limite des mandats présidentiels à deux et on ne va pas en revenir dessus.