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Alternance générationnelle: Les Papies font de la résistance Par Pape Sadio THIAM

Ousmane Sonko et Thierno Bocoum, deux dirigeants, parmi tant d’autres représentant les deux versants d’un Sénégal nouveau : l’alternance démocratique et la vision économique fondée sur des programmes politiques. L’ironie veut cependant que ces deux visions soient incarnées par des leaders politiques âgés et presqu’en fin de parcours politiques :Moustapha Niasse de l’Alliance des Forces de Progrès et Madior Diouf du Rassemblement national démocratique.

L’alternance démocratique ne suffit pas ; il faut qu’elle aille de pair avec une alternance générationnelle. Or le Sénégal est aujourd’hui peuplé en majorité de jeunes, constituant ainsi près de 65% de sa population. Nos septuagénaires et octogénaires doivent tout simplement laisser la place aux quadra et quinquagénaires. Ou plutôt, ces derniers doivent prendre la place des premières cités.

L’alternance générationnelle, on en parle de plus en plus. Il y’a tout un peuple de jeunes cadres politiques ou politiciens qui frappent, avec insistance, à la porte des responsabilités publiques pour réclamer à tout prix une alternance générationnelle dans les partis politiques. Or les partis sont de plus en plus perçus comme des bureaucraties politiques davantage tournées vers la satisfaction des intérêts de quelques groupuscules vers la prise en charge réelle de la demande sociale. Peu importe que cela soit vrai ou faux, la perception déborde les catégories logiques du vrai et du faux : elle enveloppe son objet et lui donne un sens totalement arbitraire, mais très souvent fonctionnel. Or la façon dont la politique est perçue dans notre pays est tout sauf noble : le désenchantement est tel que la seule alternative était de se tourner vers d’autres idoles.

Il y a un désenchantement universel qui rend de plus en plus aléatoire la foi en l’homme politique. Les rideaux qui entretenaient le mystère de la scène politique sont tirés et l’homme politique est exposé à une évaluation quotidienne que sa nature humaine ne peut évidemment pas supporter. Est-ce à dire que les partis politiques ont perdu leur légitimité ?

Dans le langage populaire, on a instillé des termes très négatifs pour désigner la façon dont la politique est faite : la distinction entre homme politique et politicien ne repose sur aucune rigueur scientifique, mais elle est fonctionnelle surtout sur le plan émotionnel. Il est en de même pour le concept de « doorkat » en wolof : dès qu’un homme politique parle, on lui renvoie l’image d’un entrepreneur qui chercher à se faire connaître pour marchander des strapontins. Ainsi, avec la retraite politique de ces dinosaures comme Abdoulaye Bathily, le décès de Ousmane Tanor et celui de Dansokho, la scène politique sera désormais l’affaire des trentenaires et des quadras. Et les dernières élections locales ont consacré l’émergence de leaders jeunes, ambitieux, charismatiques et engagés.

Pêle-mêle, on peut citer : Barthélemy Dias, Abdoulaye Wilane, Malick Diop, Cheikh Bamba Dièye, Macky Sall, Talla Sylla. Le président Abdoulaye Wade avait juré d’emporter avec lui, dans sa retraite politique, ses contemporains. « Des personnes qui sont dans la politique depuis des décennies et ne veulent toujours pas en sortir. Nous sommes nés, avons grandi, sommes allés à l’école, avons eu du travail, sommes mariés, avec des enfants et ces mêmes personnes sont toujours là », disait le maire de Saint-Louis lors de son congrès d’investiture à Guédiawaye.  Le président sortant, qui prévoyait de quitter la scène politique dans trois ans, ambitionnait d’organiser sa succession et surtout de laisser le champ aux jeunes. Il voulait un renouvellement de la classe politique. Mais la victoire de Macky Sall va précipiter le renouvellement et la retraite politique de beaucoup de ténors dans la majorité présidentielle comme dans le camp d’en face, nés tous avant les indépendances du Sénégal.